Chasse à l'homme avant élections en Italie
(en France, nous connaissons bien). Tous contre Salvini: tel semble être le mot d'ordre de la classe politico-ecclésio-médiatique en Italie après que le ministre de la Ligue ait rappelé les racines chrétiennes de son pays et brandi un chapelet à l'issue du grand meeting de samedi dernier à Milan. Documents éclairants (23/5/2019)
Tout d'abord un article déniché par Carlota sur le site espagnol <Infovaticana.org>.
Carlota écrit en préambule:
«Salvini a osé brandir un chapelet et toutes les "bonnes âmes" y compris ecclésiales de s’horrifier et de parler de sa vie personnelle peu catholique et de l’instrumentalisation politique de son geste.
Voici un texte évoquant un évêque italien, qui contrairement à la majorité de ses confrères, commence à ne plus faire de politiquement correct, un site espagnol parle de "chemin de Damas"» !
L’évêque des immigrants donne raison à Salvini
infovaticana.com
22 mai 2019
Traduction de Carlota
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Connu pour ses prêches sur l’accueil des immigrants, Antonio Suetto, évêque de Vintimille – San Remo, l’«évêque no-border», trouve naturel que l’homme à la tête de la Ligue, Matteo Salvini, donne un témoignage public de sa foi et il lui donne raison dans sa croisade contre le multiculturalisme.
«Je ne vois rien de blasphématoire ou d’irrespectueux dans le geste du ministre qui se déclare croyant», assure Mgr Antonio Suetta. «Il parlait de l’Europe, il a baisé le rosaire et il a invoqué la bénédiction de Dieu et des saints. C’est parfaitement compatible avec les convictions qu’il dit avoir».
Si nous n’avions pas la crainte d'être irrévérencieux, nous comparerions cela avec la chute de cheval sur le chemin de Damas. Antonio Suetta, évêque de Vintimille - San Remo, connu pour sa position d’ouverture et d’accueil des migrants jusqu’au point de se démarquer de ses frères de l’épiscopat italien et d’être surnommé «l’évêque sans frontières» semble avoir subi une conversion subite et exprime dans une lettre sur l’Europe et dans une récente interview des opinions que personne n’aurait attendues de sa part, encore moins dans le climat aggravé de «guerre froide» qui sévit dans l’Italie pré-électorale entre Salvini et le haut clergé (ndt: et même très très haut clergé ?).
Dans cette guerre sans quartier, la lettre de Suetta a résonné pour beaucoup comme un appel à la désertion et d’une façon particulièrement surprenante.
Il y a quatre ans, le prélat était apparu d’un coup à la une des journaux de la presse nationale, en accueillant les immigrés refoulés par la France à la frontière, et il s’était ainsi gagné une réputation de prélat favorable à l'accueil universel, celui-là même que le Pape François et la Conférence Episcopale Italienne ont transformé en «test» de christianisme, seulement comparable à la conscience écologique. Et aujourd’hui Mgr Suetta monte à la charge contre «le multiculturalisme qui annihile les racines chrétiennes de l’Europe».
Cependant, Suetta assure ne pas avoir changé… enfin pas trop. «Je n’ai pas changé d’idée sur la solidarité envers celui qui se trouve dans une situation de besoin immédiat, comme dans le cas des immigrés lors de l’accueil de 2015, mais ma perplexité était déjà alimentée en ce qui concerne le multiculturalisme, une société réduite à une simple somme de cultures et d’ethnies, sans une identité forte».
Mais ce qui nous fait lui augurer un futur ecclésial pas vraiment brillant, tout au moins pendant le pontificat du Pape régnant, c’est que cette même « perplexité » il l’a aussi en ne voyant pas d’un mauvais œil la politique des ports fermés de Salvini, véritable «bête noire» de la Curie Romaine.
«Il est certain que lorsqu’on utilise des slogans pour faire avancer les thèses elles-mêmes on risque de ne pas être compris, mais je maintiens que c’est une chose que d’aider son prochain dans une urgence et une autre d’organiser de manière stable une activité de secours en haute mer», fait remarquer l’évêque. «Dans la logique de la redistribution des migrants entre les pays de l’Union, c’est compréhensible d’exiger que les navires soient dirigés vers d’autres ports européens ou de répartir l’accueil avec d’autres nations, entre autres choses, parce que les réfugiés ne veulent pas tous rester en Italie».
Attendez, il y a plus encore : « Je suis convaincu que l’Eglise a fait beaucoup, avec une grande humanité et une intention totalement droite», reconnaît Suetta. Mais il lance un avertissement : «Il reste le risque de ce que quelques instances ‘solidaires’ puissent utiliser le phénomène migratoire pour d’autres fins, appauvrir l’Afrique pour la laisser à la merci de quelques centaines de potentats; favoriser la dissolution de l’identité européenne moyennant l’apport des masses humaines hétérogènes. L’Occident ne doit pas avoir honte de son histoire».
Andrea Zambrano revient sur l'épisode dans son éditorial de La Bussola ce matin, sous le titre: "EVÊQUES PARTISANS, MAIS IL Y EN A QUI FONT USAGE DE LA RAISON", et dont voici le "chapeau":
La haine politique de nombreux évêques italiens à l'égard de Salvini touche au grotesque. Il y en a même qui "excommunient" les fidèles qui votent pour lui. On ne peut pas tout réduire à un affrontement historique pour ou contre Salvini en le présentant comme un mal absolu. Mais il y en a qui ont choisi une autre voie et ont décidé de parler des élections aux fidèles en offrant les vrais critères du jugement chrétien.
C'est dans cette dernière catégorie qu'entre l'évêque de Vintimille, justement:
Andrea Zambrano
www.lanuovabq.it
23 mai 2019
Extrait (ma traduction)
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L'évêque de Vintimille-Sanremo, Antonio Suetta, a utilisé l'instrument de la lettre aux fidèles, mais son nom est depuis quelques jours au centre de polémiques pour une interview accordée au Quotidiano Nazionale, dans laquelle il a dit que «Salvini a raison au sujet des débarquemenst». L'évêque a ensuite corrigé le tir en attribuant la faute au titriste, mais en substance, ses paroles n'étaient pas différentes de celles qui lui étaient attribuées. Et de fait, cela lui a valu de la part de La Repubblica le surnom d'«ennemi de la ligne du Pape François». Stigmate des années 70 (vous vous rappelez, les ennemis du peuple ?) capable de «tuer» médiatiquement. Et en effet, le pauvre évêque qui s'est retrouvé dans l'œil du cyclone a ensuite annulé toutes les interviews prévues ces jours-ci, y compris celle avec la Bussola. Intimidé par les réactions venant de sa maison. Inquiétant...
Mais ce qui est écrit dans la lettre aux fidèles reste - et est plus exhaustif que l'interview -.
«Une pensée anti-chrétienne s'est établie comme hégémonique, au nom d'une tolérance interreligieuse singulière et d'une laïcité mal comprise», dit-il, allant jusqu'à écrire des phrases résolument politiquement incorrectes aujourd'hui :«L'Europe est née aussi dans les passages cruciaux de Poitiers, de Lépante et aux portes de Vienne le 11 septembre 1683» démolissant non seulement le «catho-islamisme» dominant mais aussi la culture hégémonique qui fait de l'avortement et de l'euthanasie ses piliers.
Le document de Suetta est un texte très précieux pour une analyse des maux de l'Europe et des remèdes, qui partent inévitablement d'une re-christianisation du vieux continent. Tout cela l'a conduit à être accusé d'être un «évêque souverainiste». Pourtant, il n'est qu'un évêque qui vit à la frontière avec la France, où, à cause du far west immigrationiste, la défaite de l'européanisme idéologique que nous avons connu jusqu'à présent est plus dramatique et évidente.
Les pasteurs qui jugent la réalité avec les lentilles de la raison et de l'Église sont toujours là. Mais leur voix n'est qu'un souffle de vent.
Voici enfin le dernier éditorial d'Antonio Socci, qui continue à régler ses comptes avec François (il est trop rare ces temps-ci pour négliger de le traduire...).
Sur un sujet très voisin, voir aussi:
Un Pape altermondialiste
Elections européennes: le Pape fait campagne
La campagne électorale de Bergoglio
Antonio Socci
22 mai 2019
Ma traduction
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On peut critiquer Matteo Salvini, comme tous les politiciens. Mais aujourd'hui, nous sommes face à une diabolisation de la personne jamais vue auparavant. Salvini semble être l'obsession collective de l'élite. C'est une fixation, surtout dans les médias. Le parti de la diabolisation semble être agité par la volonté de l'estropier et d'empêcher la Ligue de gagner.
Mais ce qui est le plus déconcertant, c'est que ce "parti de la diabolisation" (on peut parler dans certains cas de "parti de la haine") a identifié son leader moral et politique dans un évêque qui devrait s'occuper des choses du Ciel, un évêque qui n'est même pas italien et qui est à la tête d'un État étranger, à savoir Giorgio Mario Bergoglio.
Depuis des semaines, Bergoglio est en campagne électorale sous les applaudissements des médias. Avant tout sur le thème des migrants.
Indépendamment du fait que finalement, les départs ayant été bloqués, on assiste à un effondrement en chute libre du nombre de victimes en mer, il continue à bombarder pour forcer l'Italie à céder à une émigration massive (mais il n'en accepte aucune au Vatican). Chaque jour, il fait son meeting. Hier, Lucia Annunziata [journaliste de la télévision italienne] a elle aussi célébré «l'opposition du Pape Bergoglio» à Salvini.
Il est curieux que le front anti-Salvini qui l'acclame - composé en grande partie de laïcistes, anticléricaux, athées, communistes et post-communistes - reconnaisse avec enthousiasme «le rôle de véritable opposant à un monarque théocratique». Ils ont restauré le pape roi, et bye bye la laïcité de l'Etat et le Concordat.
Pourtant, en tant que pasteur de l'Église universelle, Bergoglio aurait bien d'autres choses à faire. A commencer par la crise de la foi: en Italie, par exemple, un sondage récent parle d'un effondrement de 7% des croyants au cours des cinq dernières années (ses propres années).
Sans parler des persécutions subies par les chrétiens. Ces jours derniers, il n'y a pas eu seulement le massacre des chrétiens dans les églises du Sri Lanka, à la messe de Pâques (des dizaines d'enfants massacrés). "Il Foglio" a titré: «C'est une guerre mondiale contre les chrétiens. Canada, Afrique, Asie, Moyen-Orient: une semaine de christianophobie islamiiste».
Mais Bergoglio n'a pas entendu : il devait faire sa campagne électorale contre Salvini (avec des Roms ou des migrants). Et son bras droit vêtu de pourpre devait jouer à l'électricien dans un immeuble occupé de Rome.
Du reste, Bergoglio ne veut pas entendre parler de chrétiens persécutés par les islamistes et les communistes (il a pratiquement remis au régime chinois l'Eglise qui avait résisté à la persécution). Il ne critique jamais les islamistes et les communistes. C'est aux chrétiens qu'il réserve des critiques très féroces et même des insultes (une longue liste a été dressée).
Vittorio Sgarbi soupçonne que Bergoglio est athée. Pour notre part, nous l'ignorons. Il est certain qu'il préfère s'occuper de politique plutôt que de Dieu. Une politique d'extrême-gauche qui, par exemple, lui permet de recevoir au Vatican des mouvements comme le Centre social Leoncavallo, mais pas les catholiques de la Journée de la famille ou de la "Marche pour la vie", qui sont écoeurés.
La Ligue est l'un des partis les plus sensibles aux questions catholiques. Mais selon "Il Fatto [quotidiano - un quotidien de... gauche]", Bergoglio a dit à propos de Salvini: «Je ne peux et ne veux pas lui serrer la main». Au catholique Salvini, non. En revanche, il a serré la main, publiquement, à Emma Bonino qui - comme nous le savons - est laïciste, ultra-abortistique et anticléricale. Bergoglio est même allé jusqu'à désigner Bonino et Napolitano «parmi les grands de l'Italie d'aujourd'hui».
Malgré son obsession pour le pouvoir (typique du pire courant jésuite), il convient de souligner que, d'habitude, les leaders que Bergoglio soutient coulent. Il est entré dans les élections présidentielles américaines a gamba tesa (*) contre Trump et Trump a gagné, battant la laïciste Hillary Clinton. Il était notoirement contre Macrì en Argentine et Bolsonaro au Brésil, qui l'ont emporté tous les deux. En Colombie, une autre défaite. Le PD lui-même a obéi à l'invective bergoglienne sur les migrants, qui ont débarqué par milliers en Italie, et il est sorti en morceaux des élections de 2018.
Hier, le bras droit de Bergoglio, le Père Spadaro a lancé une invective horrifiée contre Salvini parce qu'il a exhibé un chapelet lors de la manifestation à Milan (Bergoglio préfère Bonino et Napolitano qui ont d'autres bannières).
Mais Spadaro, qui élimine Dieu de la politique en interdisant les chapelets et les crucifix, oublie que ce pays a été gouverné pendant un demi-siècle par un parti qui se définissait "chrétien" et dont le symbole portait une croix. Un parti que l'Église a beaucoup soutenu. "Chrétien" est aussi le nom donné au parti de Merkel. Et aux États-Unis, les présidents jurent sur la Bible.
Beaucoup au Vatican ont oublié Dieu et s'attendent à ce que tout le monde fasse de même. Mais les catholiques ne veulent pas trahir leur foi et leurs valeurs.
A un Bergoglio qui fait des déclarations déplaisantes (y compris sur Jésus) et fait de la politique de gauche, la plupart des catholiques préfèrent Salvini qui invoque Notre Dame pour protéger l'Italie et l'Europe et qui chérit l'enseignement de Jean Paul II et Benoît XVI. Ce sont eux la vraie Église.
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(*) Expression du jargon footballistique, entrare a gamba tesa signifie «tacler l’adversaire». Par extension, dans le langage courant, l’expression indique un coup bas, une action déloyale
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