La disgrâce de Mgr Aguer
Il part au "bon" moment: adversaire acharné de la culture de mort, il fallait le réduire au silence au moment où le Parlement d'Argentine s'apprête à voter une loi facilitant l'avortement... (10/6/2018)
>>> Voir aussi: Limogeage express
Voici la vraie raison du "limogeage express" de l'archevêque de La Plata, Mgr Aguer. Le Parlement d'Argentine s'apprête à légiférer sur l'IVG, et les pronostics sont très serrées. Et, comme par hasard, Mgr Aguer, adversaire acharné de l'avortement, était le fer de lance du front pro-vie dans l'épiscopat argentin. Andrea Zambrano utilise la métaphore footballistique pour expliquer le sens de son départ précipité: «Un peu comme si, lors de la finale de Champions League, on remplaçait l'attaquant de l'équipe favorite».
Aguer exilé, le "Non à l'avortement" perd son attaquant.
Andrea Zambrano
1à juin 2018
www.lanuovabq.it
Ma traduction
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L'une des conséquences de l'exil de l'évêque argentin Hector Aguer du diocèse de La Plata est de priver, au moment même où commence la bataille parlementaire, le front du "Non à l'avortement" d'un des principaux représentants de l'épiscopat argentin contre la loi sur la dépénalisation.
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L'une des conséquences les plus immédiates de la non-prolongation du mandat de l'évêque argentin Hector Aguer est de priver le front contre l'avortement d'un des représentants de pointe de l'épiscopat local opposé à la loi sur la dépénalisation. Après l'Irlande, qui a approuvé un amendement constitutionnel pour permettre la rédaction d'une loi facilitant l'interruption de grossesse (cf. Irlande, avortement, une défaite catholique), les projecteurs sont désormais braqués sur le pays andin. Le 13 juin, après de longs débats en commission, un projet de loi unifiant les différents projets présentés à ce jour sera déposé au Parlement et la bataille se joue jusqu'au dernier député. Selon les dernières données de Unidad Provida ["fédération" de mouvent anti-avortement en Argentine], 130 membres sont en faveur du "non", alors que 112 se sont déjà exprimés en faveur [du oui]. Quinze députés encore indécis manquent encore à l'appel. Sur le papier, c'est le vote contre qui devrait passer, mais dans les faits, les obstacles et les imprévus sont encore si nombreux qu'on ne peut pas considérer la partie comme terminée. Au contraire, étant donné que même au sein du gouvernement de Mauricio Macri, il existe des positions en faveur de l'interruption de grossesse.
Dans cette campagne qui polarise l'opinion publique argentine, la figure d'Aguer, évêque considéré comme traditionaliste et pas du tout enclin à des compromis avec le monde, s'est distinguée comme celle du leader principal du courant pour le non.
Aguer, en effet, a souvent tonné contre l'avortement et a soutenu à plusieurs reprises les nombreuses marches qui ont eu lieu dans le pays ces derniers mois en soutien du slogan: Salvemos las dos dos vidas.
Il y a tout juste une semaine, à l'occasion de son homélie pour la solennité de la Fête Dieu, qui était sa dernière messe publique en tant qu'archevêque titulaire de La Plata avant de quitter brausquement la direction du diocèse, Aguer a eu des mots clairs de condamnation. Il a qualifié l'avortement de meurtre, de crime abominable, et il a poursuivi: «Les petites âmes des innocents seront accueillies dans la miséricorde de Dieu, mais qui libérera une société meurtrière des pauvres et des sans défense, qui la libèrera de la vengeance pour le sang versé? Ce ne sera certes pas le Fonds monétaire international - a-t-il ajouté - faisant allusion aux polémiques qui lient la campagne en faveur de l'avortement dans le pays avec le prêt que le FMI devra accorder pour sauver l'économie argentine (cf. www.lanuovabq.it).
Puis il a dit : «La chair et le sang d'une fillette violée, enceinte sans le vouloir et la chair et le sang de son enfant sacrifié sont unis à la chair et au sang du Christ. Caïn, Hérode, Pilate et tous les bourreaux peuvent nouer un mouchoir vert autour de leur cou (symbole de la campagne en faveur de l'avortement, ndr), mais le prix du crime sera facturé au monde le jour du Jugement, et à la société argentine bien avant».
Des mots durs, très durs, mais en accord avec la doctrine catholique de toujours sur le thème du meurtre d'enfants dans le sein maternel.
Eh bien, le 24 mai dernier, à peine atteint l'âge de 75 ans, Aguer a remis son mandat entre les mains du Pape et une semaine après, il a été remplacé par son successeur, qui prendra ses fonctions à la fin du mois, Victor Tucho Fernandez. Nous avons déjà évoqué des soupçons d'inimitiés personnelles de la part du Pape Bergoglio, derrière ce changement, et de l'humiliation et l'exil de l'émérite qui s'est retrouvé de fait sans abri du jour au lendemain.
Ce qui est remarquable maintenant, c'est qu'avec la sortie de scène d'Aguer, le front du Non à l'avortement perd l'un de ses principaux acteurs. Un peu comme si, lors de la finale de la Champions League, l'attaquant de l'équipe favorite était remplacé. Des positions de Fernandez sur le débat politique en cours, on ne sait encore rien. Mais il est difficile d'imaginer qu'il soutiendra la cause avec la force d'Aguer.
Les politiciens ont également remarqué cette absence. Ces derniers jours, par exemple, une délégation avec Maria Eugenia Vidal, gouverneur de la province de Buenos Aires, soutien du non à l'avortement avec son parti Cambiemos del no et grande admiratrice d'Aguer, est arrivée à Rome.
Pendant la rencontre, elle a demandé au Pape François les raisons du changement soudain de locataire dans le diocèse de La Plata. La rencontre s'est tenue à huis clos et on ne connaît pas les réponses du Pape.
Restent toutefois le regret et la consternation, y compris de la part de nombreux politiques, qui voyaient en Aguer un leader, en constatant qu'au moment décisif d'une bataille pour la liberté et la vérité, l'Église envoie "dans la tribune" ses meilleurs hommes. Au-delà des motivations qui sont derrière ce changement, c'est une conséquence qui jette un éclairage lugubre sur l'engagement de l'Eglise en Argentine pour arrêter une loi contre la vie et contre l'homme.
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