C’est de l’humour, bien sûr, issu du blog hispanophone conservateur Info Vaticana en réaction au motu proprio de François sur les « gardiens de la tradition », et découvert par Carlota: pour détendre un peu l’atmosphère et renvoyer la balle dans le camp moderniste

Propositions pour un Rite amazonien de la Messe

Par  Carlos Esteban | 19 juillet 2021
Traduction de Carlota

Dans l’intention de prendre du recul par rapport à l’avalanche d’analyses hâtives faites sur le motu proprio papal Traditionis Custodes, je voudrais, dans ces lignes, essayer de traiter de quelque chose qui n’a rien, mais vraiment rien à voir: le futur rite amazonien de la Messe.

Les enthousiastes du dernier synode universel, prétendument consacré à l’Amazonie, ont été tellement frustrés par le Motu proprio papal qui a repris leurs propositions en laissant de côté les principales, qu’ils en ont perdu tout intérêt pour les autres initiatives qui en comprenaient pourtant une des plus novatrices: la commande auprès de la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements d’une forme liturgique spécifique de la Sainte Messe pour les peuples d’Amazonie.

Ce que répète tant ce siècle, à savoir que « la diversité est notre force », notre Église l’a compris depuis des millénaires et c’est ainsi qu’il y a actuellement 23 rites différents, tous également valides.  Je comprends que le rite susmentionné est encore en préparation, les difficultés n’étant pas des moindres, et donc, avec à l’esprit la lutte contre le néfaste cléricalisme, moi un simple laïc, je me risquerai à avancer quelques propositions sur lesquelles pourrait s’appuyer le nouveau rite.

Je commencerai par la langue. En principe, la norme de la langue vernaculaire prévaudrait, mais dans ce cas, il semble plus commode, puisqu’on parle des « peuples amazoniens » comme s’il s’agissait d’une unité plus ou moins monolithique, de renforcer cette idée d’union en utilisant une même langue pour tous. Mais laquelle? Il y a approximativement un million d’indigènes, regroupés en 400 ethnies qui parlent 300 langues différentes. Il n’y en a aucune qui se place significativement aux dessus des autres, et choisir le portugais comme « lingua franca » en plus d’être néocolonialiste, serait discriminatoire vis-à-vis de l’Amazonie hispanophone. Opter pour l’anglais ou une autre langue très parlée de par le monde serait de l’impérialisme à la puissance  4, de sorte que je propose de choisir une langue qui n’appartienne à personne, qu’aucune puissance ne puisse revendiquer comme la sienne et qui a une relation sans équivoque avec notre Église. Que diriez-vous du latin ?

Une autre innovation que je considère comme intéressante est celle de la position du prêtre pendant le rite. L’acceptation de la Pachamama au cours du synode comme symbole de ces terres, bien qu’elle soit à proprement dit une divinité quetchua  (ndt et non pas amazonienne stricto sensu) nous renvoie au culte andin bâti sur le culte du soleil. C’est pourquoi j’ai l’audace de proposer que le prêtre reste tourné pendant la célébration comme un « cacique » à la tête de ses guerriers durant la bataille ou au cours de la chasse, vers la direction où se lève le soleil, c’est-à-dire ad Orientem. En outre, cela aiderait à affaiblir le parti pris clérical qui découle du fait que le prêtre se tourne dans une direction opposée aux fidèles. De cette façon, ils ne feraient plus qu’un.

D’autre part, les rites des puissances colonialistes, depuis la réforme de Saint Paul VI, mettent en avant l’aspect convivial, de banquet, de la Sainte Messe, atténuant son aspect de Sacrifice. Cela doit être changé, dans un rite qui cherche à se distancer de la vision eurocentrique de notre liturgie. En revenant aux racines incas, il ne faut pas oublier l’aspect central que le Sacrifice avait dans leur culte. Ceci étant, nous comprenons que les indigènes recevront comme quelque chose de plus naturel, plus proche de leur expérience religieuse, de faire du Sacrifice le centre de la célébration.

Enfin, le synode lui-même nous a rappelé combien l’expérience indigène suppose, en autres choses, un rejet de ce progrès sans âme qui détruit leurs forêts et menace leur lien avec leurs racines, et leur vie simple. C’est pour cette raison que nous nous proposons d’écarter, pour inspirer le nouveau rite, les formulations modernes qui rappellent l’époque de la machine et de l’industrialisation prédatrice, pour revenir à une époque préindustrielle et plus simple. En ce sens, il me semble que l’inspiration des rubriques amazoniennes, en lien avec la richesse de la vie de l’Église, pourrait se trouver dans la Messe de Saint Pie V.

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