Courageuse réflexion du journaliste italien Paolo Deotto (né en 1949, ex-directeur du site tradi aujourd’hui disparu Riscossa Cristiana ). Je n’irai peut-être pas aussi loin que lui, sa profession de foi pro-russe le regarde, mais ce que nous avons sous les yeux aujourd’hui illustre suffisamment la légitimité de son analyse du système médiatique (qui ne s’applique du reste pas uniquement aux situations qu’il cite: voir par ex. le « racisme », qui est un autre exemple criant).

L’information unique et le refuge réconfortant du conformisme

Le régime dicte les lignes directrices, le Bon Journaliste, obéissant, les suit, faisant même ici et là une de ces petites polémiques qui pourtant ne remettent pas en cause la Pensée Unique, mais font tellement « démocratie »….

L’idée de cette brève réflexion m’est venue en lisant un article dans l’édition en ligne d’aujourd’hui de Il Tempo.

Tout est résumé dans le titre : « Parler de Poutine ne signifie pas être pro-russe« .

Revenons en arrière.

Un article sur le fascisme ? Il faut indiquer très clairement dès le départ que l’on est « antifasciste ». Un film YouTube sur le même sujet ? Bien sûr, il faut préciser que « … le film n’est pas inséré à des fins de propagande, mais seulement pour faire connaître des faits qui ne doivent pas se reproduire ».

Un article sur les invertis, les homosexuels et cie. Prémisse indispensable : « Nous ne sommes pas homophobes ».

Et ces deux dernières années, nous avons tous été victimes de la farce de la « pandémie ». Si l’on publiait un article qui ne fût pas le simple communiqué officiel du Minculpop [« Ministère de la culture populaire » en Italie fasciste de 1937 à 1944] , il était obligatoire de préciser que « …nous ne nions pas la gravité, etc ».

Si l’on publie ensuite un article sur les vaccins, qui ne soit pas une pure apologie de la concoction magique, il faut bien sûr préciser que « … les vaccins font cependant ceci et cela de façon stupéfiante » et que surtout « … nous ne sommes pas NoVax ».

Mais maintenant, tous (plus ou moins bovins) sont appelés à la lutte acharnée contre Poutine, et dans cette lutte, dans laquelle la catégorie bien-aimée des journalistes s’est jetée avec une audace de béni-oui-oui, nous lisons les choses les plus ridicules. De Poutine malade d’un cancer, qui devrait mourir d’un jour à l’autre, à Poutine complètement fou, à Poutine qui doit maintenant faire face à la révolte de ses soldats et de ses citoyens. Et ainsi de suite. Avant tout, il doit être clair que l’on est tenacement, indiscutablement, totalement, contre la Russie et son président, qui représentent le Mal absolu, contre la douce Ukraine, où la population ne demande rien d’autre que de vivre joyeusement, en dansant des danses champêtres et en chantant des chants religieux, sous la direction éclairée de son président (ex?) comédien Zelensky.

Et c’est ainsi que nous en arrivons à des titres minables comme celui de Il Tempo, que nous avons cité au début.

Un journaliste, à la radio et à la télévision, ou sur papier, doit avoir pour seul souci d’informer. Et pour vraiment informer, surtout dans une situation aussi embrouillée que la guerre en Ukraine, il devrait se sentir le devoir évident de publier les opinions et les interventions de toutes les parties en conflit. Pour aider le lecteur à comprendre, pas pour catéchiser.

Le pitoyable Adolphe Draghi a déjà montré comment il comprend la liberté d’information en critiquant une émission de télévision dans laquelle le ministre russe des affaires étrangères, Lavrov, était interviewé.

Si les journalistes avaient un minimum de respect de soi et de colonne vertébrale, Draghi aurait dû être emporté par la clameur. Les Italiens ont, ou plutôt auraient, le droit d’être informés. Entièrement et impartialement.

Au lieu de cela, ils sont actuellement submergés par une information qui a sombré dans le ridicule par son caractère partisan, de surcroît stupide, en diffusant des « nouvelles » souvent si peu crédibles qu’elles en deviennent comiques, s’il y avait de quoi rire dans toute cette affaire.

D’ailleurs, le journaliste qui veut vraiment faire son travail sait qu’il risque d’être marginalisé à son tour. Et, à quelques exceptions près et louables, le Cœur de Lion n’est pas vraiment une caractéristique de la catégorie.

Et donc, il doit préciser: « Ok, je parle de Poutine, mais je ne suis pas pro-russe. Lisez la suite et vous verrez que je dirai toutes les mauvaises choses que je peux sur Poutine et la Russie ».

Ordre, discipline. Circulaire dans la salle de presse et tous ensemble passionnément.

Qui suis-je dans le monde de l’information ? Un inconnu, avec un lectorat qui se compte sur les doigts de la main. La main du capitaine Crochet.

Je ne suis personne.
Mais en tout cas :

  • Je me déclare absolument pro-russe
  • Ces vaccins me font horreur et je n’ai pas été vacciné.
  • L’homosexualité me révulse.
  • Je considère les 20 ans de la période fasciste comme une période historique à connaître, au cours de laquelle beaucoup de bien a été fait à l’Italie et je considère Mussolini comme un grand homme d’État [précision: Paolo Deotto ne fait pas mystère de ses ascendances juives].

Vous voyez comme l’air change dans la pièce ? Là, on se comprend.

Paolo Gulisano

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