Un an après le motu proprio ‘Traditionis Custodes‘, les opérations de démantèlement de la messe selon l’ancien rite commencent dans trois diocèses américains (NBQ). Explication de Giuseppe Nardi

L’héritage empoisonné de McCarrick continue d’opérer. Ses protégés sont parvenus aux plus hautes dignités grâce à François. Ils remercient le pape régnant en appliquant fidèlement Traditionis custodes

La politisation n’a jamais été aussi dominante que sous François. La bataille pour l’Amérique bat son plein et Traditionis custodes fait partie de ce combat.

La lutte contre la « droite religieuse » – car c’est bien d’une lutte politique pour le pouvoir qu’il s’agit pour François, « l’homme politique sur le trône pontifical » – prend un nouvel élan.

Les McCarrick Boys mettent en pièces le rite traditionnel

Giuseppe Nardi
katholisches.info/2022/07/23/mccarrick-boys-zertruemmern-den-ueberlieferten-ritus/
23 juillet 2022

Alors que l’archevêque de Chicago, le cardinal Blase Cupich, mène une campagne contre les communautés « ancien rite », l’archevêque de Washington, le cardinal Wilton Gregory, interdit aux paroisses de son archidiocèse de célébrer selon le rite traditionnel. Les deux cardinaux se réfèrent au Motu proprio du pape François Traditionis custodes. Tous deux ont été élevés à la fonction et à la dignité par le pape actuel. Tous deux font partie des McCarrick Boys

Hier, 22 juillet, le cardinal Gregory – archevêque depuis 2019 du prestigieux diocèse de Washington, dont fait partie la capitale fédérale américaine – a édicté des dispositions mettant en œuvre le Motu proprio Traditionis custodes. Les nouvelles directives interdisent la célébration du rite traditionnel dans les églises paroissiales de l’archevêché.

Les dispositions entreront en vigueur à l’équinoxe d’automne. À partir de cette date, il ne sera plus permis de célébrer la messe selon le rite traditionnel dans une église paroissiale de l’archidiocèse. Le cardinal Gregory met ainsi en œuvre ce qui a été décidé par François dans Traditionis custodes pour l’Église universelle.

À partir du 21 septembre, la messe tridentine, qui avait été qualifiée de « forme extraordinaire du rite romain » de 2007 à 2016 conformément au Motu proprio Summorum Pontificum du pape Benoît XVI, ne pourra plus être célébrée que dans trois églises de l’archevêché, désignées par le cardinal Gregory. Aucun de ces lieux de culte n’est une église paroissiale. Deux se trouvent dans l’État du Maryland, une dans la capitale fédérale Washington.

Tout prêtre souhaitant célébrer selon le rite traditionnel doit demander une autorisation écrite et confirmer la validité « des modifications introduites lors du Concile Vatican II, qui s’est terminé en 1965 », comme l’écrit le Washington Post. Il s’agit ici de la reconnaissance de la réforme liturgique de Bugnini, promulguée par le pape Paul VI en 1969 et qui, contrairement à ce qu’affirme le Washington Post, n’avait aucun lien direct avec Vatican II, mais était un produit post-conciliaire de « l’esprit du Concile ».

Sur ce point également, le cardinal Gregory peut se référer au pape François, qui , dans Traditionis custodes a déclaré que le Novus Ordo de Bugnini (article 1) était « l’unique expression de la lex orandi du rite romain ». La célébration du rite traditionnel, autorisée par le pape Benoît XVI à tout prêtre, a été annulée par le pape François en juillet 2021. Selon l’article 1 de Traditionis custodes, le rite traditionnel est en dehors de la lex orandi du rite romain. Il a été déclaré par François comme une relique morte d’une époque révolue, qui est tolérée dans de rares cas et à des conditions étroitement définies – tout comme un train nostalgique fait occasionnellement un voyage.

« Nous renonçons à l’establishment moderniste ».

L’archevêque Héctor Aguer, l’adversaire de Bergoglio au sein de la Conférence épiscopale argentine lorsqu’il était archevêque de Buenos Aires, a qualifié il y a quelques jours Traditionis custodes de « véritable malheur ». Selon lui, le motu proprio du pape François oblige les prêtres et les fidèles à désobéir. « Les bons évêques », selon Aguer, réagissent à cette désobéissance avec compréhension et indulgence. L’archevêque émérite de La Plata appelle cette attitude recommandée aux évêques, un « indult » tacite et de fait.

Les McCarrick Boys aux Etats-Unis voient les choses différemment. Theodore McCarrick, cardinal jusqu’en 2018 et prêtre jusqu’en 2019, était devenu sous François l’homme d’Eglise le plus puissant des Etats-Unis, jusqu’à ce qu’il tombe en disgrâce auprès du New York Times et disparaisse dans la nature. Son héritage empoisonné continue cependant d’opérer. Ses protégés sont parvenus aux plus hautes dignités grâce à François. Ils remercient le pape régnant en appliquant fidèlement Traditionis custodes et d’autres documents pontificaux. Ils partagent les prémisses de l’action papale, y compris en ce qui concerne ses préférences politiques, et sont des représentants convaincus d’une alliance avec le Parti démocrate de Joe Biden, Barack Obama et Nancy Pelosi – y compris de son programme sociopolitique. La politisation n’a jamais été aussi dominante que sous François. La bataille pour l’Amérique bat son plein et Traditionis custodes fait partie de ce combat.

Le site Internet DC Latin Mass, à Washington, qui faisait jusqu’à présent partie des lieux de messe du rite traditionnel, a de fait cessé ses activités. En réaction aux nouvelles directives du cardinal Gregory, la rédaction a publié une déclaration brève mais dramatique :

« Nous renonçons à l’establishment moderniste de Vatican II et à toutes ses œuvres et promesses creuses, et nous demandons à nos lecteurs d’en faire autant.
Priez, vous aussi. Accomplissez les œuvres de miséricorde. Faites pénitence, comme la Vierge Marie l’a demandé à plusieurs reprises à un monde sourd. Cultivez l’humilité (sans elle, vous n’irez pas au ciel).
Nous vous remercions de votre soutien à DC Latin Mass ».

Les McCarrick Boys passent à l’action après un signe de François

Le Motu proprio destructeur a été promulgué par François le 16 juillet 2021. Il a été appliqué de manière répressive par certains évêques, ignoré par d’autres. En mai dernier, François a envoyé un signal en mentionnant, lors d’un entretien avec les rédacteurs des revues jésuites européennes, qu’il y avait, surtout aux Etats-Unis, « beaucoup » de groupes de « restaurateurs rétrogrades », comme le pape argentin l’a suggéré de manière péjorative. C’était un clin d’œil aux bergogliens de l’épiscopat américain, comme Cupich et Gregory, pour qu’ils imposent plus durement Traditionis custodes.

L’Institut du Christ Roi et Souverain Prêtre (ICRSS), dont le siège américain se trouve depuis près de 20 ans à Chicago, a été durement touché. L’institut y a investi de très grosses sommes d’argent pour faire revivre le sanctuaire du Christ-Roi qui lui avait été confié, puis pour le reconstruire après un incendie dévastateur. A partir du 1er août, les prêtres de l’institut devront quitter l’archidiocèse de Chicago, car ils ne pourront pas remplir les conditions répressives que leur impose le cardinal Cupich. Ils devront se construire un nouveau centre sous l’égide d’un évêque plus bienveillant (où ils pourront rester tant qu’un évêque bienveillant y règne). Les fidèles, eux, resteront orphelins et les sommes investies, les dons des fidèles, seront perdus, car qui leur rachètera le sanctuaire. Le cardinal Cupich passe d’un trait de plume sur les prêtres et les fidèles.

Le cardinal Gregory fait de même à Washington. L’action synchronisée des McCarrick Boys montre que le message de Sainte Marthe a été compris et que des accords ont été conclus. La lutte contre la « droite religieuse » – car c’est bien d’une lutte politique pour le pouvoir qu’il s’agit pour François, « l’homme politique sur le trône pontifical » – prend un nouvel élan.

Début novembre auront lieu les élections de mi-mandat aux Etats-Unis, et la situation est plutôt mauvaise pour les démocrates de gauche.

Une lutte politique unilatérale

De nombreux catholiques fidèles aux Etats-Unis souffrent du contexte politique sur lequel François fonde son action – et du combat politique qui en découle, qu’il leur impose en le menant contre eux. Ils ne le comprennent pas, parce qu’ils n’accordent pas eux-mêmes à la pensée politique la priorité que François lui accorde. Mais cela ne leur sert à rien, car François pense tout de même ainsi et sa vision du monde se fait en catégories politiques et est déterminée par des maximes de gauche comme le pouvoir (lutte pour le pouvoir/conservation du pouvoir) et la domination (discours de domination).

Cette dichotomie de la pensée fait que les deux parties sont étrangères l’une à l’autre, sans que le lien soit toujours bien compris. Les catholiques croyants, dénigrés par François comme « indécrottables » et « restaurateurs », ne comprennent pas pourquoi le pape les combat alors qu’ils vivent et défendent l’ordre naturel et divin dans un océan de désordre. François, quant à lui, voit en eux un ennemi dangereux – et celui-ci se trouve toujours à droite – qu’il faut combattre par tous les moyens appropriés, par des coups directs et par la ruse.

Les fidèles et les prêtres de la tradition se sentent harcelés et persécutés. Toutefois, la nervosité règne aussi dans le camp adverse.

Les McCarrick Boys, qui aimeraient bien faire oublier McCarrick et pourraient aussi être appelés les Bergoglio Boys, mettent en pièces la Tradition sur ordre du pape. Comme le cardinal Cupich, ils attaquent ses représentants dans leurs structures dans le but de les affaiblir. François désavoue tout aussi impassiblement des évêques de premier plan qui n’appartiennent pas à cette clique, comme l’archevêque Salvatore Cordileone de San Francisco.

Après que François ait par des interventions massives sauvé ses amis politiques, les politiciens du parti démocrate, en matière d’avortement, d’une condamnation par la conférence épiscopale des États-Unis en novembre 2021, l’archevêque Cordileone a fait un choix autonome en excluant Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, représentante de premier plan des démocrates et politicienne en matière d’avortement, de la réception de la communion. Pelosi s’est rendue à Rome, a assisté à une messe papale dans la basilique Saint-Pierre et y a communié. C’était un coup de poignard contre l’archevêque Cordileone, un coup de poignard typiquement bergoglien, car formellement, François n’a en effet rien fait, mais était « seulement » présent à ladite messe dans la basilique Saint-Pierre. En principe, il ne donne jamais la communion aux fidèles.

L’archevêque Cordileone a réagi à sa manière. L’interdiction pour Pelosi de communier dans l’archidiocèse de San Francisco est toujours en vigueur et le 1er juillet, deux jours après le coup de poignard romain, Cordileone a célébré une messe pontificale selon le rite traditionnel dans la station missionnaire de San Francisco de Asis, fondée par saint Juniperio Serra. Les cardinaux George Pell et Robert Sarah, tous deux disgraciés par François, y ont également participé.

L’archevêque Cordileone a ainsi posé toute une série d’actes qui vont à l’encontre de ceux de François. Le 29 juin à Rome et le 1er juillet à San Francisco, deux mondes qui ne semblent plus avoir grand-chose en commun se sont affrontés.

L’archevêque Cordileone a célébré en tant qu’évêque selon le rite traditionnel, ce que François ne veut même plus accorder aux prêtres, et encore moins souhaiter par l’intermédiaire des évêques. La célébration a eu lieu dans une église paroissiale, d’où François a exclu le rite traditionnel avec Traditionis custodes. L’occasion de la célébration était la commémoration de saint Junipero Serra, l’apôtre de la Californie, contre lequel des forces antichrétiennes, proches des démocrates de gauche, les amis politiques de François, mènent depuis quelques années un combat parfois violent. Ce combat veut – paradoxe irrationnellement fou – revenir sur la découverte de l’Amérique, la colonisation européenne et la christianisation du continent.

Contrairement à l’Europe de l’Ouest, les forces saines aux États-Unis sont fortes et sûres d’elles, c’est pourquoi le Kulturkampf s’y concentre avec une force particulière afin d’anéantir ces forces, comme cela s’est déjà largement produit auparavant en Europe de l’Ouest. Plus les forces saines et chrétiennes se révèlent vitales, plus le camp adverse se montre furieux et radical – et trouve également un soutien dans certaines parties de l’Eglise, jusqu’à Rome.

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