Inutile de présenter HuffPost, un site dit d’agrégation de nouvelles né aux Etats-Unis en 2005, qui depuis lors a essaimé, au point qu’il est aujourd’hui présent sur internet dans toute les langues. Un must. La version française est propriété du groupe Le Monde, c’est dire si elle est fiable 🧐 . Le site se prétend évidemment apolitique, mais la notice wikipedia (on va les croire, cette fois) admet que la rédaction est classée à gauche et qu’HuffPost « suit avec assiduité l’actualité concernant les minorités homosexuelles, bisexuelles et transgenres ».
On est d’autant plus surpris (ou pas?) de trouver dans la version italienne un article de défense « a spada tratta » du Pape François (le Pape le plus attaqué de l’histoire récente de l’Eglise, peut-on lire. Attaqué par qui? En tous cas pas par les médias comme le HuffPost, c’est-à-dire presque tous), accompagné d’une condamnation des ses sulfureux ennemis, Mgr Vigano en tête.
Et on s’attendait encore moins à croiser dans l’équipe rédactionnelle d’éminentes théologiennes capables d’expliquer à leurs lecteurs une hérésie du IVe siècle de l’Eglise.
Je me suis amusée à traduire l’article, dont à la réflexion la lecture s’avère très enrichissante. Tout un symbole: François, le pape aimé par le HuffPost et attaqué par les catholiques.

La guerre hybride contre le pape François, imprégnée de l’hérésie donatiste (*)

(*) Hérésie doublée d’un schisme, qui affecta l’Église d’Afrique au IVesiècle et dont les adeptes, sous l’autorité de Donat, faisaient dépendre la validité des sacrements de la sainteté du ministre qui les confère et prétendaient que l’Église ne subsistait que dans leur société.

https://www.huffingtonpost.it
Maria Antonietta Calabrò
7 février 2023

Tous les derniers pontifes, à partir de Paul VI, ont subi des critiques, parfois très dures. Mais cela n’a jamais été comme dans le cas du pape François, dès le début de son ministère. Puis, après les premières années, la « réaction » catholique et non catholique contre lui s’est transformée en un vent impétueux. Nous en avons eu le dernier exemple avec les attaques déclenchées à l’occasion de la mort de Benoît XVI.

Des attaques violentes et concentriques qui ont exploité la fin de ce que les sédévacantistes (c’est-à-dire ceux qui, après la démission du pape allemand, ont toujours considéré Bergoglio comme un usurpateur, et le  » vrai  » pape comme le démissionnaire), considéraient comme une cohabitation. Des attaques si concentriques qu’il est difficile de ne pas penser qu’elles ont été organisées et orchestrées [mais n’est-ce pas du complotisme?], comme cela s’est produit de fait avec la « guerre des livres » (à partir des mémoires publiées par l’ancien secrétaire de Benoît XVI, Mgr Ganswein). A tel point que François a publiquement nié que Benoît XVI ait été contrarié par certaines de ses décisions.

La désinformation et la conspiration, ainsi que l’utilisation sans scrupules des médias sociaux par certains individus, ont fait le reste, dans ce qui apparaît comme une véritable guerre hybride contre François.

Massimo Borghesi [il a publié une « Biografia intellettuale » de Jorge Mario B., c’est dire!], professeur de philosophie morale à l’université de Pérouse, qui a publié « Il dissidio cattolico » (La dissidence catholique) analyse les racines culturelles, philosophiques de ces attaques, principalement nord-américaines et allemandes. Et les tonalités, en grande partie extrémistes et d’affrontement final, se mêlent à l’idéologie no vax (contre la fermeture des églises et l’impossibilité de tenir des messes au moment de l’apparition de la pandémie de covid19).

Des interventions toutes imprégnées de l’hérésie donatiste, la secte de l’évêque Donat, contre laquelle s’est élevé le Saint d’Hippone, c’est-à-dire précisément cet Augustin dont Benoît XVI a voulu avoir le symbole de la conque dans ses armoiries [que vient faire Benoît XVI dans cette galère?] . La secte des purs, des non contaminés, à l’attaque de ceux qui se tiennent aux côtés de François : les (prétendus) corrompus, les corrupteurs de la tradition et de la doctrine, et ceux compromis avec le pouvoir.

La figure-symbole de cette « réaction » à François est elle-même un évêque, l’ancien nonce aux États-Unis, Mgr Carlo Maria Viganò, qui a « combattu » âprement Benoît lui-même (lorsqu’il était pape) [première nouvelle!!!] et dont les liens avec Steve Bannon et l’ancien président américain Donald Trump lui-même ont été révélés au fil des ans.

Viganò a été défendu jusqu’au bout, alors qu’il attaquait François, par l’éditeur d’Ignatius Press, qui plus est un jésuite, le père Joseph Fessio, qui a publié un certain nombre de livres de cardinaux et autres, extrêmement critiques à l’égard de François, jusqu’au dernier (2020) signé par « Benoît XVI » et par le cardinal Robert Sarah, qui a coûté à Ganswein le poste de préfet de la maison papale.

Borghesi rapporte également la thèse promue par Fessio contre les interventions d’un rédacteur de la Civiltà Cattolica (et donc  » proche  » du pape François), également jésuite, très singulière pour un catholique et encore plus pour un prêtre : que l’avortement est meilleur que la contraception, parce que de toute façon, même s’il est avorté, un enfant a été conçu avec son âme immortelle (sic !) [???].

Pour les lecteurs qui ne sont pas croyants ou pratiquants [ah, parce qu’il y en aurait d’autres?], il faut rappeler qu’au cœur de la liturgie eucharistique de la messe, dans chaque messe qui est célébrée chaque jour, sous toutes les latitudes, le prêtre élève des prières  » pour notre pape François « , et pour les évêques et les prêtres en communion avec lui.

Ici, c’est cette prière que la « dissidence catholique » contre le Pape, contredit et outrage.

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Je conclus en citant le jeune cardinal Ratzinger, dans une homélie prononcée à Munich le 10 août 1978 en mémoire de Paul VI;

Mais un pape qui, aujourd’hui, ne subirait pas la critique manquerait à son devoir devant l’époque. Paul VI a résisté à la télécratie et à la démoscopie [/les sondages], les deux pouvoirs dictatoriaux d’aujourd’hui. Il a pu le faire parce qu’il ne prenait pas comme paramètre le succès et l’approbation, mais la conscience, qui se mesure sur la vérité, sur la foi.

Je ne sais pas s’il parlait des mêmes critiques que celles évoquées par le HuffPost.

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