Ecole Ratzinger: Extrait du « discours de La Sapienza » (/La Sagesse) – qui aurait pu être bien nommé, et pas seulement en référence au nom de la principale université romaine. Le 17 janvier 2008, le saint-Père n’a pas pu le prononcer (*), « grâce » au zèle imbécile de professeurs et d’ étudiants « éclairés » – en réalité sectaires et incultes – qui ont parfaitement compris la leçon de Voltaire et la phrase qu’on lui a faussement attribuée « je déteste vos idées, etc.. » .
(*) Sur cette polémique lamentable, qui marque un acmé dans la persécution pas seulement intellectuelle qui a marqué le pontificat de Benoît XVI (il y a eu bien pire par la suite!), voir sur mon site: La visite manquée de Benoît XVI à la Sapienza
Extrait du Discours [non prononcé] à l’Université de la Sapienza, 17 janvier 2008
A l’époque moderne, se sont ouvertes de nouvelles dimensions du savoir, qui sont mises en valeur dans l’Université, surtout dans deux grands domaines: tout d’abord dans les sciences naturelles, qui se sont développées à partir de la connexion entre l’expérimentation et une rationalité présupposée de la matière; en second lieu, dans les sciences historiques et humanistes, où l’homme, en scrutant le miroir de son histoire et en éclairant les dimensions de sa nature, cherche à mieux se comprendre lui-même.
Dans ce développement s’est ouverte à l’humanité non seulement une mesure immense de savoir et de pouvoir; mais la connaissance et la reconnaissance des droits et de la dignité de l’homme ont également grandi, et nous ne pouvons que nous en réjouir.
Toutefois le chemin de l’homme ne peut jamais se dire achevé et le danger de la chute dans le manque d’humanité n’est jamais tout simplement conjuré: nous le voyons bien dans le panorama de l’histoire actuelle!
Le danger pour le monde occidental – pour ne parler que de lui – est aujourd’hui que l’homme, eu égard à la grandeur de son savoir et de son pouvoir, ne baisse les bras face à la question de la vérité. Et cela signifierait en même temps que la raison, en définitive, se plierait face à la pression des intérêts et à l’attraction de l’utilité, contrainte à la reconnaître comme critère ultime.
Du point de vue de la structure de l’Université, il existe un danger que la philosophie, ne se sentant plus en mesure de remplir son véritable devoir, ne se dégrade en positivisme; que la théologie avec son message adressé à la raison soit confinée dans la sphère privée d’un groupe plus ou moins grand.
Toutefois, si la raison – inquiète de sa pureté présumée – devient sourde au grand message qui lui vient de la foi chrétienne et de sa sagesse, elle se dessèche comme un arbre dont les racines n’atteignent plus les eaux qui lui donnent la vie. Elle perd le courage pour la vérité et n’en sort pas grandie, mais devient plus petite. Appliqué à notre culture européenne, cela signifie que si elle veut seulement se construire elle-même en fonction de sa propre argumentation et de ce qui sur le moment la convainc et – préoccupée de sa laïcité – se détache des racines qui la font vivre, elle n’en devient pas alors plus raisonnable ni plus pure, mais elle se décompose et se brise.
Je retourne ainsi à mon point de départ. Qu’est-ce que le Pape a à faire ou à dire à l’Université? Il ne doit certainement pas chercher à imposer aux autres, de manière autoritaire, la foi, qui ne peut être donnée que dans la liberté.
Au-delà de son ministère de Pasteur dans l’Eglise et en raison de la nature intrinsèque de ce ministère pastoral, il est de son devoir de maintenir vive la sensibilité pour la vérité; d’inviter toujours à nouveau la raison à se mettre à la recherche du vrai, du bien, de Dieu et, sur ce chemin, de la pousser à découvrir les lumières utiles apparues au fil de l’histoire de la foi chrétienne et à percevoir ainsi Jésus Christ comme la lumière qui éclaire l’histoire et aide à trouver le chemin vers l’avenir.