Le nouveau préfet aurait-il falsifié la signature du Pape? Les révélations d’un journaliste croate, reprises par Luisella Scrosatti font planer plus qu’une ombre sur la régularité du document, dont la signature papale en bas de page n’est qu’un copié-collé maladroit. Ce qui devrait de facto entraîner sa nullité (dans le droit civil, la contrefaçon d’un document officiel est un délit). Sans parler des changements au dicastère qu’a dirigé le grand Ratzinger. A l’évidence, les documents émanés sont des « torchons » dans lesquels on a renoncé à toute forme, les fonctionnaires des amateurs, pour ne pas dire des plaisantins… à moins que Fernandez ne soit seul et fasse tout lui-même?

Signature copiée-collée : la dernière embrouille du cardinal Tucho

Luisella Scrosatti
La NBQ
15 novembre 2023

Les signatures du Pape et du Préfet pour la Doctrine de la Foi sur les réponses concernant l’admission des gays et des trans aux sacrements ne sont pas authentiques, mais tirées d’un autre document mal scanné. Avec la nouvelle direction du Dicastère, un oubli en entraîne un autre.

Les lecteurs se souviennent de la vilaine figure qu’avait faite don Dario Edoardo Viganò au printemps 2018, en ne publiant que partiellement la fameuse lettre que Benoît XVI avait écrite à l’occasion de la série de onze petits volumes sur la théologie du pape François [cf. benoit-et-moi.fr/2019/dossier-lettergate]. Comme par hasard, c’est précisément le paragraphe dans lequel le pape émérite rejetait toute collaboration qui a été omis, affirmant, dans son style, qu’il n’avait pas assez de temps pour lire ces publications.

L’omission concernait toute la deuxième page de la lettre, tandis que les deux dernières lignes de la première – un nouveau paragraphe que Ratzinger commençait par un « cependant je n’ai pas envie d’écrire à leur sujet » -, apparaissaient délibérément floues et illisibles. Ce fut donc un scandale, et à juste titre : Viganò dut présenter sa démission et le pape François lui trouva une place, créant pour lui le poste de conseiller pour le dicastère de la communication.

Mais ce n’est rien en comparaison de la manipulation concoctée par quelqu’un du Dicastère pour la Doctrine de la Foi.

Le site catholique croate Vjera i djela [Foi et Œuvres], dans un article de Snježana Majdansžić-Gladić, révèle un détail troublant, que les lecteurs peuvent vérifier par eux-mêmes. Dans les Réponses à certaines questions de Monseigneur José Negri le 3 novembre, la signature du pape et celle du cardinal Fernández lui-même ne sont pas authentiques. « Il suffit de télécharger le PDF sur votre ordinateur et de cliquer sur la signature à la fin, et vous verrez qu’il s’agit d’une image mal scannée et coupée, simplement collée sur le texte écrit dans Word, et non d’un document scanné que le pape a réellement signé », explique Majdansžić-Gladić.

Faites l’essai par vous-même. Pour vérifier qu’il s’agit bien d’un copier-coller d’un document scanné, il suffit d’agrandir la signature : on remarque facilement l’image granuleuse qui y est collée.

Un « oubli » criant de Fernández qui, semble-t-il, non seulement écrit ce qu’il veut en toute autonomie, mais inaugure aussi le bricolage des signatures du pape. La raison pour laquelle il a fait cela n’est pas claire et, poursuit le journaliste croate, « on ne sait pas encore si la signature du pape a été insérée sur quelque chose d’autre qu’il a approuvé ce jour-là, ou si la réponse a été complètement falsifiée, peut-être à l’insu du pape ».

Il ne fait aucun doute que le pape était sur le fond d’accord avec ce qu’a écrit Fernández, mais il s’agit, à tout le moins, d’une question de décence, dont les implications juridiques sont indéniables. La falsification d’une signature sur un document public est-elle également un délit au Vatican ? Ce document, soit dit en passant, perd également sa valeur officielle, outre le fait que, comme nous l’avons écrit, son contenu est plus que douteux.

Fernández serait-il un apprenti faussaire ? Non content de trafiquer les textes cités dans les documents qu’il a rédigés, d’en altérer le sens et d’en couper des paragraphes, falsifierait-il aussi les signatures ? Quoi qu’il en soit, il reste un apprenti, car les manipulations ne sont pas si subtiles qu’elles passent inaperçues.

Est-ce trop demander que d’avoir une clarification officielle sur le sujet ? Plusieurs questions attendent une réponse adéquate et publique : de quel autre document daté du 31 octobre 2023 la signature du pape et de Fernández a-t-elle été scannée ? S’agit-il d’une autre version des réponses à Mgr Negri ou d’un document complètement différent ? Quelle était la raison de cette opération ? Qui l’a commandée et qui était au courant ?

Étant donné la tendance à la falsification dans les cercles du Dicastère depuis le 1er juillet, pourquoi ne pas lever le secret [pontifical] sur la Note du 21 décembre 2018, à laquelle le Préfet s’est référé dans l’ouverture du document en question comme preuve de la continuité de cette déclaration avec ce que la CDF aurait dit dans le passé ? Et pourquoi ne pas publier également l’original des questions de l’évêque de Santo Amaro, comme cela a été fait pour les dubia des cinq cardinaux ?

Mais les points à éclaircir ne s’arrêtent pas là. Depuis que « Tucho » a été nommé à la tête du DDF, le site web du Dicastère n’affiche plus les documents transcrits et traduits en différentes langues, comme d’habitude, mais seulement les versions pdf des fichiers Word. Pour quelle raison ? Des réductions de personnel ?

Majdansžić-Gladić souligne également que « depuis le 1er juillet 2023, les documents du Dicastère n’ont plus d’armoiries officielles dans l’en-tête, ils n’ont pas non plus d’en-tête, ni de numéro de série, ni d’autres références officielles habituelles, mais sont systématiquement des textes qui ne diffèrent pas de n’importe quelle autre lettre privée, à l’exception de la signature finale du Pape et du Préfet ». Et depuis le début de l’administration de Fernández, comme nous l’avons déjà souligné, d’autres éléments significatifs ont disparu : la référence à une éventuelle session ordinaire ou plénière du dicastère avec la date correspondante, ainsi que la signature conjointe du préfet et du secrétaire, éléments qui laissent supposer que Tucho agit pratiquement seul, ont disparu ; aucune mention indiquant que le pape a approuvé le document et ordonné sa publication, aucune mention finale habituelle « Donné à Rome, du siège du dicastère pour la doctrine de la foi, le jj/mm/aa, mémoire/fête/solennité de NN ». Pourrions-nous connaître les raisons de ces omissions désormais répétées ?

Pour comprendre combien l’ex-dicastère de Ratzinger est tombé bas, il suffit de regarder les erreurs dans la réponse au cardinal Duka : « Giovani [au lieu de Giovanni} Paolo II » dans la note de bas de page 4 et « Benetdetto [au lieu de Benedetto] XVI » dans la suivante ; Amoris laetitia en italique, alors que Mitis iudex ne l’est pas; critères de notes de bas de page non uniformes ; guillemets qui s’ouvrent mais ne se ferment pas.

Certes, nous pouvons tous faire des erreurs, mais lorsqu’il s’agit de documents officiels, plusieurs révisions du texte sont nécessaires. Autre indice que cette révision n’a manifestement pas eu lieu et que Fernández a été placé dans l’équipe pour s’occuper seul du dicastère.

Le problème est qu’il n’est pas Maradona.

Share This