Attention, humour, décalé et même humour un peu grinçant (mais c’est très drôle). L’auteur, qui est un collaborateur du blog de Sabino Piaciolla est un pince-sans-rire, qui ne les envoie pas dire et, mine de rien, il assène quelques vérités bien senties sur le pape, auquel il se permet même de donner des conseils. C’est très efficace.

Impressions affectueuses mais rudes sur le Pape François

Au sujet du pape François, jusqu’à l’année dernière, j’avais une certaine considération. Je le considérais, peut-être pas comme le meilleur, mais certainement comme l’un des meilleurs papes que nous ayons eu à cette époque. Cette année, je me suis efforcé de l’apprécier et de mieux le suivre dans ses exhortations, avec un respect filial. Et j’ai dû revoir ma position: c’est le meilleur des papes que nous ayons en circulation!

En effet, plein de discernement, j’ai essayé d’analyser sa pensée et, en me remettant en question, j’ai compris beaucoup de choses plus profondément.

Tout d’abord, je me suis rendu compte que sa miséricorde s’adresse à tous, à tous, mais que si l’on n’est pas d’accord avec lui et avec les ouvertures qu’il propose, on ne peut pas être « tous ». Tous ne peuvent pas être tous !

C’est ainsi que je me suis interrogé sur les multiples purges qu’il a voulues pour les pasteurs considérés comme hérétiques parce que trop respectueux de la doctrine et de la tradition, et sur la promotion dans tous les dicastères et structures du Vatican de personnages « politiquement corrects », dans le projet de rendre l’Église « cléricalement correcte » elle aussi.

Il est heureux que le pape Bergoglio nous donne tant d’aperçus sur des points fondamentaux de la foi chrétienne qui avaient étrangement échappé à tous les saints des époques passées ; qui, s’ils les avaient compris, auraient eu honte de beaucoup de leurs attitudes (comme prier trop, peut-être même en latin, susciter trop de vocations dans les séminaires ou insister sur des œuvres innommables de prosélytisme, catéchiser les non-croyants).

Jorge Bergoglio est un pape qui a le mérite d’indiquer à ses ouailles le bon chemin (mais il dit que beaucoup d’autres chemins contiennent aussi des semences de justice et peuvent donc être empruntés en toute sécurité) ; il avertit fermement de ce qui doit être condamné (sauf dans les cas où, etc., etc., qui conduisent à renverser l’avertissement) ; son enseignement sur le péché est basé sur un oui mais peut-être ou un non mais qui sait (et toutes les autres certitudes, pour lui, viennent du diable). Voilà un discours clair et décisif !

En ce qui concerne les invitations au discernement, j’aurais autre chose à dire : heureusement que le Pape et les pasteurs qui le prônent ont des idées claires à ce sujet ! Pour moi, il s’agit plutôt d’un processus plein d’ambiguïté. Si je discerne et que j’arrive à une conclusion et que le lendemain je discerne à nouveau et que j’arrive à une autre conclusion, comment puis-je comprendre si ma dernière conclusion est un discernement correct ? Pour comprendre les fruits du discernement, il faut beaucoup de discernement !

C’est donc une grande bénédiction pour nous, fidèles, d’avoir un pape qui passe beaucoup de temps à discerner, dissolvant ses doutes dans de nombreux autres doutes sur la foi. Selon lui, le peuple chrétien, pour être soutenu sur le chemin du salut, doit se nourrir sans cesse de doutes qui font s’évaporer les certitudes. Il doute des certitudes et est certain du doute.

Il est étrange qu’un pape qui aime tant les doutes entre en crise quand les doutes ne sont pas les siens. Lorsqu’on lui offre les ‘Dubia‘ sur un plateau d’argent, au lieu de jubiler, il mâche amèrement et s’offusque ou se dérobe.

Mais pas toujours : son ami Eugenio Scalfari avait l’habitude d’introduire des doutes perfides partout, même dans ses chaussures, et pourtant Bergoglio a trouvé le moyen de les dissoudre tous, instantanément. Je ne sais pas quel produit il a utilisé, je ne pense pas que le Magistère….

L’un des plus grands doutes qui taraude le pape François est de savoir s’il faut maintenir les pierres angulaires de la foi ou les adapter à la mentalité d’aujourd’hui. Les adapter signifie les plier pour qu’elles correspondent à ce qui est accepté par la plupart. Mais ce faisant, à mon avis, on finit par suivre un critère démocratique qui rend le Magistère instable et révisable à chaque époque. Mais aussi dans toutes les régions de la terre, car les coutumes changent dans l’espace, comme dans le temps. Avec le risque d’une fragmentation doctrinale et l’émergence d’Églises nationales confédérées au Pape, qui finit par être considéré comme unus inter pares (un parmi plusieurs égaux). Des Églises nationales qui deviennent alors inévitablement inféodées au régime étatique dans lequel elles évoluent. Après tout, c’est ainsi que fonctionne la démocratie : si la majorité décide quelque chose, on peut aussi la critiquer, mais on doit l’accepter et la respecter. C’est encore mieux si l’on se range du côté de la majorité.

Mon humble conseil est le suivant : soyez prudent, cher Pape François ! Le fait est que la vérité n’est pas démocratique, elle ne suit pas le courant dominant. Jésus n’était pas du tout démocratique. S’il l’avait été, il aurait tranquillement laissé lapider la femme adultère de l’Évangile. En fait, il aurait été le promoteur et le garant de la lapidation : en cas de consultation, l’écrasante majorité de la foule était en faveur du lynchage.

Et, puisque je suis d’humeur à donner des conseils, même s’ils sont peut-être inappropriés, permettez-moi de suggérer au pape François une autre supplique, voire un changement de paradigme.

Pourquoi ne pas regarder avec des yeux de miséricorde, par exemple, les marginaux, les exclus, les parias de notre temps ? En d’autres termes, la catégorie des « pas tout le monde » qui comprend, par exemple, ceux dont la foi est enracinée dans la prière, la contemplation, le respect de la liturgie (même ancienne) ou ceux qui considèrent les actes impurs (les mêmes qui sont une partie essentielle des rites satanistes) comme quelque chose qui les éloigne de Dieu.

Pourquoi punir, traquer, discréditer, humilier tellement de chrétiens en les taxant d’indiétrisme s’ils s’obstinent à suivre la voie des saints de tous les temps au lieu de celle tracée par notre société athée ? Pourquoi chercher le mal précisément en eux et oublier ce slogan moderne, si cher aux théologiens d’aujourd’hui, selon lequel « le mal est dans les yeux de ceux qui veulent le voir » ?

C’est donc une modeste invitation à regarder notre prochain, tous nos prochains (même ceux qui ne font pas partie des « tous ») avec les yeux de la bonté.

Je suis sincèrement convaincu que le Pape, dans son cœur, veut embrasser et aimer à la fois tout le monde et « pas tout le monde ». À commencer par ceux qui le critiquent.

En effet, Bergoglio est un Pape qui, en offrant généreusement autant d’incompréhensions et de contradictions, réussit à valoriser de nombreux fidèles en les faisant se sentir « plus papistes que le Pape ».

Pour ma part, je ne veux pas faire partie de ce groupe de critiques et de polémistes et je réitère mon profond respect.

Après tout, si quelqu’un est pape et cherche Dieu à sa manière, qui suis-je pour juger ?

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