Un fait divers sordide mais malheureusement classique, survenu ces jours-ci en Italie (une fille de 22 ans a été sauvagement assassiné par son ex- « petit ami », même Le Figaro en parle), que les médias se sont empressés de ranger à la rubrique « féminicide », pour des raisons qui ont peu à voir avec la défense des femmes, mais beaucoup avec l’idéologie, et même l’idéologie « gender », a suscité de grandes manifestations chez nos voisins et forcé le gouvernement dit d’extrême droite à annoncer en catastrophe une série de mesures qui bien entendu ne résoudront aucun problème mais contribueront à alimenter la nouvelle lutte des classes dans laquelle les femmes ont remplacé les prolétaires… avant un prochain épisode. La ministre à l’égalité des chances (!!!), dans un discours au Sénat, a cité, sans le nommer, les propos d’un « grand Pontife » (Benoît XVI, évidemment, qui d’autre?) qui selon elle ne dépareraient pas dans la bouche d’une féministe d’aujourd’hui. Sauf que, selon l’habitude, elle a « plié » le discours du futur Benoît XVI pour le faire coïncider avec ses objectifs immédiats.
Riccardo Cascioli lui rafraîchit la mémoire, et nous fait (re)découvrir la leçon de sagesse du grand Joseph Ratzinger.

Amour et violence, pour comprendre la masculinité et la féminité, reprenons Ratzinger

Riccardo Cascioli
La NBQ
24 novembre 2023

Une citation inopportune du ministre Roccella [Eugenia Roccella, ministre de « l’égalité des chances » du gouvernement Meloni, ndt] au Sénat nous fait toutefois redécouvrir la lettre de 2004 du cardinal Ratzinger sur la complémentarité entre l’homme et la femme, qui constitue un jugement opportun sur les réactions à l’assassinat de Giulia Cecchettin. Et il écrase le plan Valditara [ministre de l’éducation du gouvernement Meloni, ndt] pour les écoles secondaires.

Qui est ce « grand pontife », cité par la ministre Eugenia Roccella, qui parle comme une féministe ? C’est la curiosité qui nous est venue à la lecture du discours de la ministre au Sénat, le 22 novembre, à l’occasion de l’approbation à l’unanimité du projet de loi du gouvernement contre la violence à l’égard des femmes. Le projet de loi, déjà approuvé par la Chambre en octobre, concerne le renforcement de la prévention afin d’éviter des violences plus importantes et plus graves lorsqu’une femme a déjà dénoncé un homme violent. Mais le fait que l’approbation finale ait eu lieu en ces jours marqués par les réactions à l’assassinat de Giulia Cecchettin par son ex-petit ami Filippo Turetta, a donné au débat au Sénat une importance particulière, tout en s’inscrivant dans la veine de « comment neutraliser les hommes méchants ».

C’est dans ce contexte que la ministre Roccella, qui a donné son nom au projet de loi, a fait cette référence qui nous a tant intrigués. Tout d’abord, elle a rappelé à juste titre que les lois seules ne résolvent pas tout, puis elle a promis que le gouvernement s’engageait à promouvoir beaucoup « d’éducation et de formation ». Puis elle a déclaré : « Nous voulons provoquer un changement culturel si nous voulons briser ce que, non pas une féministe, mais un grand pontife a appelé le joug de la domination d’un sexe sur l’autre« .

Qui est donc le « grand pontife » ? Et comment se fait-il qu’il fasse des déclarations qui, selon Roccella, pourraient même être dans la bouche d’une féministe ? Il suffit d’une recherche rapide pour comprendre : cette phrase est tirée de la « Lettre aux évêques de l’Église catholique sur la collaboration de l’homme et de la femme dans l’Église et dans le monde », datée du 31 mai 2004 et signée par le cardinal Joseph Ratzinger, alors préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, et publiée sur ordre du pape Jean-Paul II.

Mais le contexte dans lequel elle est écrite est exactement à l’opposé de ce que l’intervention de Roccella – certainement contre ses intentions – suggère. Il s’agit pourtant d’une lettre précieuse, d’une grande actualité, qui éclaire le débat actuel en le sortant du bourbier idéologique dans lequel il est plongé.

En effet, la lettre commence par critiquer un certain féminisme qui réduit la question des femmes à une idéologie et dont les tendances sont les mêmes que celles que l’on retrouve aujourd’hui dans les différentes tirades sur le féminicide. D’une part,

« on souligne avec force la condition subalterne de la femme, dans le but de provoquer une attitude de contestation. La femme, pour être elle-même, se constitue en antagoniste de l’homme ».

Il en résulte

« une rivalité entre les sexes, où le rôle et l’identité de l’un sont assumés au détriment de l’autre ».

A cela s’ajoute une seconde tendance :

« Pour éviter toute suprématie de l’un ou l’autre sexe, on tend à gommer les différences (…). Dans ce nivellement, la différence corporelle, appelée sexe, est minimisée tandis que la dimension proprement culturelle, appelée genre, est soulignée à l’extrême et considérée comme première ».

Il n’est même pas nécessaire de rappeler ici les conséquences de cette approche, tant elles sont évidentes dans la société d’aujourd’hui.

Ratzinger nous conduit ensuite à la racine du problème, c’est-à-dire à la Création, à cet homme, mâle et femelle, que Dieu a créé à son image et à sa ressemblance :

« L’humanité est décrite ici comme articulée, dès sa première origine, dans la relation de l’homme et de la femme ».

Et il s’agit d’une relation harmonieuse :

« La différence vitale est orientée vers la communion et est vécue de manière pacifique »

Si là est le « cœur du projet originel de Dieu et de la vérité la plus profonde sur l’homme et la femme (…) le péché originel altère la manière dont l’homme et la femme acceptent et vivent la Parole de Dieu et leur relation avec le Créateur ».

Et c’est là que réside le problème :

« Lorsque l’humanité considère Dieu comme son ennemi, la relation même de l’homme et de la femme est pervertie ».

Nous en arrivons donc à la phrase citée par le ministre Roccella, replacée dans son contexte :

« Il s’agira d’une relation dans laquelle l’amour sera souvent déformé en pure recherche de soi, d’une relation qui ignore et tue l’amour, en le remplaçant par le joug de la domination d’un sexe sur l’autre ».

Il est clair que le discours du cardinal Ratzinger, futur Benoît XVI, n’a rien à voir avec le chauvinisme masculin ou le patriarcat fantôme évoqué à tort et à travers ces derniers temps, la perversion de l’amour touche indifféremment les hommes et les femmes. Et elle ne se manifeste pas par de nouvelles matières à introduire à l’école. Au contraire :

« Il faut donc briser cette logique du péché et chercher une issue qui permette de l’éliminer du cœur de l’homme pécheur ».

C’est la conversion au Christ, venu pour nous sauver et nous libérer du péché, qui brise la chaîne du péché :

« Dans la grâce du Christ qui renouvelle leur cœur, l’homme et la femme deviennent capables de se libérer du péché et de connaître la joie du don réciproque ».

La lettre est bien sûr très longue et très structurée, et sa lecture et sa réflexion sont d’une grande aide pour juger même de la fureur idéologique de ces jours-ci. Nous devons donc remercier le ministre Roccella de l’avoir portée à notre attention, même si c’est d’une manière quelque peu étrange. Étant donné que le ministre de l’éducation Giuseppe Valditara vient d’annoncer son plan d' »éducation relationnelle » qui sera opérationnel dans les écoles secondaires dès cette année scolaire, afin de « contrecarrer le machisme et le machisme », le ministre Roccella pourrait l’inviter à lire la lettre signée par le cardinal Ratzinger. Cette invitation pourrait ensuite être étendue aux autres membres du gouvernement, afin que nous puissions espérer qu’au moins les ministres ne disent plus de bêtises et ne fassent plus de dégâts.

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