Mg Aguer, archevêque émérite de La Plata, où il a précédé Tucho Fernandez, est l’un de ces rares hauts prélats qui osent s’opposer à François et qui auraient mérité de figurer dans la première liste, établie par AM Valli, des pasteurs qui défendent le dépôt de la foi (*).
S’appuyant sur l’exemple argentin, Mgr Aguer s’insurge contre les insultes proférées régulièrement par le Pape à l’adresse des prêtres, et du nombre de ceux qu’il appelle « les prêtres effacés », en contrediction flagrante avec le décret de Vatican II Presbyterorum Ordinis, et aux antipodes de l’attitude paternelle de Jean Paul II et surtout de Benoît XVI.

(*) La liste s’est ensuite allongée, sur les suggestions des lecteurs, suscitant le mécontentement de certains prélats, pas aussi fermes, ou moins courageux qu’on l’espérait, ce qui a conduit AMV à effacer la liste initiale et ses mises à jour ultérieures. Je n’ai pas jugé nécessaire d’effacer ma traduction de la première liste, car elle me paraît incontestable: Les pasteurs qui défendent le dépôt de la foi: Une toute petite armée

François, les insultes aux prêtres et le phénomène des prêtres « effacés »

Mgr Héctor Aguer,
Archevêque émérite de La Plata
(www.aldomariavalli.it)

Plusieurs prêtres fidèles à l’enseignement du pape François m’ont fait part de leur consternation et de leur mécontentement parce qu’ils ont vu combien Sa Sainteté dénigre souvent les prêtres. Il les a traités d’ « amers, de faces de bœufs, de vieux garçons, de préposés aux sacrements, d’ambitieux, de commères, d’arrivistes », plus d’autres qualificatifs désobligeants. Un manque de justice et de charité.

Il y a des millions de prêtres dans le monde et, parmi eux, il y en a certainement à qui s’appliquent certains des épithètes de François. Mais ses généralisations dans les sermons, les catéchèses et les messages contredisent la vérité, et ce qui est scandaleux, c’est que ces insultes s’écartent radicalement des déclarations du Concile Vatican II, qui a consacré le décret Presbyterorum Ordinis au ministère et à la vie des prêtres.

Je cite quelques passages de ce texte conciliaire :

§12. Les prêtres sont ministres du Christ Tête pour construire et édifier son Corps tout entier, l’Église, comme coopérateurs de l’ordre épiscopal : c’est à ce titre que le sacrement de l’ordre les configure au Christ Prêtre. Certes, par la consécration baptismale, ils ont déjà reçu, comme tous les chrétiens, le signe et le don d’une vocation et d’une grâce qui comportent pour eux la possibilité et l’exigence de tendre, malgré la faiblesse humaine à la perfection dont parle le Seigneur : « Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait » (Mt 5, 48).

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Mais cette perfection, les prêtres sont tenus de l’acquérir à un titre particulier : en recevant l’Ordre, ils ont été consacrés à Dieu d’une manière nouvelle pour être les instruments vivants du Christ Prêtre éternel, habilités à poursuivre au long du temps l’action admirable par laquelle, dans sa puissance souveraine, il a restauré la communauté chrétienne tout entière.

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Dès lors qu’il tient à sa manière la place du Christ lui-même, tout prêtre est, de ce fait, doté d’une grâce particulière ; cette grâce le rend plus capable de tendre, par le service des hommes qui lui sont confiés et du Peuple de Dieu tout entier, vers la perfection de Celui qu’il représente ; c’est encore au moyen de cette grâce que sa faiblesse d’homme charnel se trouve guérie par la sainteté de Celui qui s’est fait pour nous le Grand Prêtre « saint, innocent, immaculé, séparé des pécheurs» (He 7, 26).

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https://www.vatican.va/archive/hist_councils/ii_vatican_council/documents/vat-ii_decree_19651207_presbyterorum-ordinis_fr.html

Dans le passage suivant, le Concile « exhorte vivement tous les prêtres à tendre toujours vers une plus grande sainteté, qui les rendra plus aptes au service du Peuple de Dieu » (§13). L’idéal que le Concile rappelle est l’unité et l’harmonie de vie, qui dérivent de l’imitation du Christ dans l’exercice du ministère ; c’est la charité pastorale, trait qui distingue le prêtre diocésain des religieux, auxquels le Concile dédie le décret Perfectae caritatis.

Presbyterorum Ordinis affirme également que l’unité de vie apporte « consolation et joie immense » (§ 14).

Il est surprenant de constater à quel point cette perspective théologique et spirituelle est différente de la perspective sociologique mesquine de François dans son dénigrement des prêtres. On ne voit pas cela dans les enseignements de Jean-Paul II et de Benoît XVI, qui ont honoré les prêtres.

Un autre aspect à noter est que les calomnies du pape visent souvent les prêtres qui adhèrent le plus à la Tradition ; il les a qualifiés d’ « indietristes » parce qu’ils « regardent en arrière [indietro] », autrement dit parce qu’ils ne suivent pas les « nouveaux paradigmes » proposés par le successeur de Pierre.

C’est ainsi qu’abondent les « prêtres effacés », qui sont balayés comme des malpropres de l’exercice du ministère. Le progressisme autoritaire de Rome est imité dans le monde entier. Comme ici, en Argentine, où, dans plusieurs diocèses, l’effacement des prêtres fidèles à la Tradition, dogmatique et pratique, est constant.

Le pape ne cesse de faire des dégâts. Sa duplicité, jésuitique et argentine, lui inspire les pires décisions. Comme dans le cas de Joseph Strickland, évêque de Tyler au Texas, François tente de neutraliser les meilleurs parmi les successeurs des Apôtres en imposant un coadjuteur ou en envoyant une visite apostolique. Ici, en 2020, il a liquidé l’excellent évêque de San Luis pour le remplacer par un progressiste qui bénit « au nom du Père et du Saint-Esprit », en éliminant le Fils éternel, notre Seigneur Jésus-Christ, afin que les non-chrétiens qui assistent à ses actes « œcuméniques » ne se sentent pas dérangés.

En Argentine, le nombre de « prêtres annulés » est en augmentation, en raison de l’obéissance au pape d’un épiscopat insignifiant, qui assiste impassiblement à la déchristianisation de la société. Cet éloignement des origines chrétiennes, hérité de l’Espagne, a commencé chez nous à la fin du XIXe siècle. Et ces derniers temps, il a montré toute son importance sociale et culturelle, face à l’impuissance du catholicisme, qui a reçu le coup de grâce par l’expansion du progressisme.

En même temps, il y a un fait paradoxal de nature mystérieuse : la croissance de certaines paroisses fidèles à la Tradition, où les catholiques, surtout les jeunes, jouissent d’une liturgie normale, ouverte à la participation pieuse au Sacrifice eucharistique. J’ai dit « normale », c’est-à-dire sans bizarreries, comme la liturgie devrait l’être mais ne l’est pas habituellement dans la médiocrité opaque du progressisme imposé par la fantaisie post-conciliaire.

L’existence de cette réalité renforce notre espoir d’un rétablissement ecclésial. L’intercession de la Mère de l’Église, que nous invoquons avec confiance, la protégera.

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