Le blogueur argentin The Wanderer se livre moins au jeu des pronostics sur le nom du futur pape (encore vains à ce stade, aussi proche que semble être l’échéance) même si des noms commencent à émerger, en particulier celui du cardinal Ambongo – et pour moi, du cardinal Pizzaballa – qu’il n’en dresse un portrait robot. Parmi les hypothèses, celle de l’élection d’un pape insignifiant, qui ne ferait pas de vague, accompagnée d’une balkanisation de l’Eglise est loin d’être invraisemblable.

Hypothèses éphémères sur le prochain pape

The Wanderer
15 février 2024

Extra Omnes
Mgr Guido Marini, le 12 mars 2013

Les prévisions, prophéties ou prédictions concernant l’identité du prochain pape ne peuvent être que des hypothèses provisoires. Pour les confirmer, il faut d’abord que l’événement que nous attendons se produise, et tant qu’il ne se produira pas, nos hypothèses n’auront qu’une validité très limitée.

Il y a quelques mois, nous avons dit que l’un des candidats les plus probables était le cardinal Zuppi, qui semblait être le candidat de Bergoglio. Eh bien, il me semble que cette possibilité est désormais trop éloignée pour deux raisons imprévues : son échec retentissant dans la prétendue médiation dans le conflit Russie-Ukraine, et son positionnement dans une ligne continuiste avec le pontificat actuel.

À mon avis, ce dernier facteur est le premier qui s’est imposé depuis un mois parmi les participants au prochain conclave : la plupart d’entre eux éviteront à tout prix un nouveau Bergoglio. Et pour ce glissement, qui semblait impossible il y a peu, ce que je considère comme l’une des plus graves erreurs du pontificat de François a été définitif : la nomination du cardinal Víctor Fernández au dicastère de la Doctrine de la Foi.

Un imbécile commet inévitablement des imbécillités, mais certaines sont celles qu’un curé imbécile peut commettre et auxquelles son évêque peut facilement remédier, et d’autres sont les imbécillités commises par un imbécile qui s’est hissé à l’un des postes les plus importants de l’Église.

La promulgation de Fiducia supplicans et la découverte de son livre caché La Passion mystique sont deux événements qui l’ont marqué aux yeux du reste du Collège [cardinalice], qui le considèrera avec beaucoup de suspicion. Ils n’apprécieront pas de voir assis à côté d’eux un pornocardinal qui a manifestement une fixation sexuelle qui n’a pas été surmontée.

Et la faute, toujours, n’incombe pas au cochon mais à celui qui le nourrit.

La première faute est celle du bon évêque Adolfo Arana qui, il faut le dire, était l’un des meilleurs que l’épiscopat argentin ait eu, qui l’a ordonné prêtre.

La deuxième est celle de l’évêque Ramón Staffolani, qui ne l’a pas sanctionné après la publication de son livre pornographique qu’il a avec El arte de besar, présenté en grande pompe dans la ville de Río Cuarto en 1998, comme en témoigne l’édition correspondante d’El Puntal, le journal local.

Et la dernière et la plus grande faute revient à Jorge Mario Bergoglio, qui l’a fait évêque et l’a promu au poste qu’il occupe aujourd’hui.

C’est précisément pour cette raison que de nombreux cardinaux chercheront à éviter que l’Église ne tombe à nouveau entre des mains aussi irresponsables.

Un deuxième facteur qui jouera un rôle est le fait que les cardinaux ne se connaissent pas entre eux, car François a pris soin de peupler le Sacré Collège de personnalités inconnues qui paissent son troupeau dans des pays éloignés, et il a pris grand soin des réunions en consistoire. Rappelons que le dernier consistoire a eu lieu en février 2014 – il y a dix ans – et c’est là qu’ont été discutés les thèmes à aborder lors du prochain synode sur la famille. C’est là que le cardinal Kasper a avancé toutes ses thèses progressistes et c’est là que le cardinal Caffarra, d’heureuse mémoire, l’a réfuté avec force et justesse. Et c’est pourquoi François, le pape de la synodalité, du dialogue et de l’écoute, a décidé de ne pas reconvoquer un consistoire général parce qu’il s’est rendu compte que les troupes se rebellaient contre lui.

En conséquence, les électeurs du prochain pontife ne se connaissent pas. Et cela signifie naturellement que les candidats qui ont le plus de chances d’être élus sont ceux qui sont le plus universellement connus. D’où la thèse que nous avons soutenue selon laquelle l’un d’entre eux serait le cardinal Pietro Parolin, dont Tosatti a également parlé il y a quelques jours : le secrétaire d’État serait soutenu par les cardinaux de la Curie, par les progressistes, puisqu’il en est un, et par certains conservateurs qui le considéreraient comme un moindre mal face à l’éventualité d’un nouveau Bergoglio.

L’affaire Fiducia supplicans a mis en lumière un cardinal totalement inconnu : Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa, qui a eu l’énorme courage d’organiser tous les épiscopats d’Afrique subsaharienne et de s’opposer frontalement aux prétentions du pornocardinal Fernandez et de François lui-même. Peu, très peu, d’évêques sont assez virils pour une telle audace. Je ne dis pas qu’Ambongo est pour l’instant candidat à la papauté, je dis que tous les cardinaux le connaissent déjà – ce qui n’était pas le cas avant – et de même qu’il aura suscité le dédain des Allemands et des Belges, il aura aussi suscité beaucoup de sympathie. Reste à savoir dans quelle mesure et de quel calibre.

Enfin, il existe une autre possibilité dont la paternité revient à un bon ami. Les cardinaux, en général, sont des hommes sans foi. Ils sont arrivés là où ils sont parce qu’ils ont fait les bonnes alliances et les bons renoncements, et non en raison de leur piété et de leur sainteté de vie. Ce qu’ils veulent, c’est prendre du bon temps et profiter de leur pourpre ; ils ne craignent plus Dieu mais seulement les médias, ils choisiront donc un pape qui ne leur crée pas de problèmes. Et ces problèmes se poseraient avec un pape nettement progressiste, ou nettement conservateur, ou qui, même s’il est modéré, prend son ministère au sérieux. « La fête est fini », diront les cardinaux, « élisons un personnage fade et insignifiant ». Ils s’assureront ainsi la tranquillité d’esprit à laquelle ils aspirent, sachant comme eux que le christianisme et ses idéaux sont déjà morts, tués par les forces du monde qui, à la fin, ont triomphé. Il suffit de lire les déclarations glaçantes du cardinal Ouellet.

Si cela devait se produire, je crois que nous assisterions à une balkanisation rapide de l’Église qui, au niveau mondial, finirait par se diviser en épiscopats colorés de différentes nuances de catholicité. Ou, alternativement, à une profusion de diocèses plus ou moins catholiques, qui rendraient une obéissance symbolique au pontife romain. Dans certains d’entre eux, les couples irréguliers et même très irréguliers seraient bénis, et dans d’autres non. Dans certains, la liturgie traditionnelle serait autorisée et encouragée, et dans d’autres la Sainte Messe, même celle de Paul VI, aurait disparu, remplacée par des « célébrations de la Parole » présidées par des diaconesses et autres spécimens. Chez les uns, les enfants recevraient les vérités de la foi des apôtres au catéchisme, et chez les autres, les vérités de l’environnementalisme et de la démocratie. Bref, une sorte de Communion anglicane ou, si l’on ne veut pas penser à cet extrême, une « panorthodoxie » dans laquelle chaque patriarcat fait plus ou moins ce qu’il veut tout en conservant, au mieux, un modeste respect pour le patriarche de Constantinople.

Les hypothèses avancées ici sont par nature éphémères. Nous verrons comment les évêques et les prêtres se mobiliseront quand l’institution des diaconesses « non sacramentelles » sera annoncée – ce n’est qu’une question de semaines.

Et nous verrons qui sera à la loggia de Saint-Pierre quand le Seigneur daignera accorder à son Église la miséricorde que nous espérons tous.

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