Un prêtre espagnol, intervenant régulier sur le portail Religion en Libertad, a posé une question curieuse (en fait, pas tant que cela…) à Chat GPT. Et il a reçu une réponse qui illustre à quel point l’intelligence artificielle a tout compris (n’oublions pas que l’IA est « alimentée » par les data, donc par les humains, mais elle apprend très vite et ici, elle a fait instantanément une analyse impeccable). Le site catholique italien Il Timone a reproduit, et commenté, la réponse du chatbot.
C’est la version 4.0 (au moins!!) des « lettres de Screwstape » de CS Lewis, ce maître ès diableries dont l’avatar italien se nomme Berlicche et dont nous avons souvent parlé dans ces pages. Par exemple ici:
ChapGpt : « Si j’étais Satan, voilà comment je vous ferais perdre la foi… »
(Les commentaires de l’auteur de l’article du Timone, Paola Belletti sont en gros caractères)
Paola Belletti
10 septembre 2024
On dirait un des échanges épistolaires entre Berlicche et Malacoda, le vieux démon expérimenté et la jeune recrue, son neveu, encore trop peu habile à agir sur l’âme qui lui a été confiée pour l’amener au désespoir et à la perte de la foi.
Il s’agit au contraire d’un écran de Chat GPT qui répond à une question précise : « Si vous étiez Satan, comment feriez-vous pour que les gens perdent la foi ? »
C’est un prêtre, le père Francisco Javier ‘Patxi’ Bronchalo, curé de Notre-Dame de l’Assomption, à Valdemoro, dans la province de Madrid, qui a posé la question et publié la réponse de l’IA.
Le prêtre – qui écrit souvent pour le site catholique espagnol Religion en libertad – savait que d’autres utilisateurs avaient déjà soumis la question au chatbot d’OpenAI, mais il a voulu l’essayer lui-même et la réponse de l’outil d’intelligence artificielle est assez surprenante : il semble vraiment avoir compris les façons dont l’esprit du Mal agit au détriment des âmes qu’il cherche désespérément à perdre.
Il n’est donc pas inutile de profiter de l’occasion pour rappeler aux croyants, mais aussi à ceux qui comprennent qu’il existe un être intelligent travaillant à notre détriment, comment agit le mal.
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(Père Francisco Javier Bronchalo, Religion en Libertad,
6 septembre 2024)
J’ai vu que certaines personnes avaient demandé à Chat GPT : « Si vous étiez Satan, comment feriez-vous pour que les gens perdent la foi?« .
J’ai voulu voir par moi-même si les réponses étaient vraies et je lui ai posé la question. Le résultat parle de lui-même. Il est clair. Je le copie et le colle tel quel :
« Si j’étais Satan et que j’avais pour but de faire perdre la foi aux gens, j’utiliserais très probablement des tactiques subtiles et stratégiques, visant à semer le doute, le désespoir et la désillusion, plutôt que d’agir de manière évidente ».
Dès les prémisses de la méthode, le chatbot confirme ce contre quoi la sagesse séculaire de l’Église nous met en garde : les ruses du malin, sa subtilité, le travail inlassable avec lequel il érode et corrode le bien de la foi.
Les stratégies énumérées immédiatement après sont étonnantes par leur précision et leur parfaite adéquation à ce qui se passe objectivement à notre époque. Satan ne change pas d’objectif au cours de l’histoire, ni de stratégie sous-jacente, qui est de séparer l’homme de son Créateur, mais il s’adapte aux circonstances actuelles et aux moyens que la vie contemporaine lui offre – et que le diable lui-même oriente le plus possible en sa faveur.
Voici ce qu’il propose à son Berlicche :
« 1. promouvoir l’individualisme extrême: promouvoir une vision du monde centrée exclusivement sur le « moi », dans laquelle les gens se déconnectent de leurs communautés, de leurs proches et de l’idée de quelque chose de plus grand qu’eux. L’égoïsme et l’autosuffisance pourraient conduire à l’abandon de la foi, car le besoin de se fier à quelque chose de plus élevé disparaîtrait.
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2. Souffrance et désespoir: les difficultés, les tragédies et les injustices du monde sont souvent utilisées pour remettre en question l’existence d’un Dieu bienveillant. Placer les gens dans des situations où ils sont confrontés à des souffrances apparemment injustifiées peut les amener à douter de la bonté ou de l’existence du divin ».
Ces deux premières stratégies sont opposées dans leur approche et convergentes dans leur résultat : si je suis autosuffisant, comme dans le premier scénario, quel besoin aurais-je jamais de Dieu ? Mais si le mal, la souffrance et l’injustice sont si grands que je me sens accablé, à quoi sert un Dieu qui permet tant de douleur ?
« 3. la distraction et la superficialité: les gens sont tellement occupés par le bruit de la vie moderne, par des distractions telles que la technologie, le divertissement et les préoccupations matérielles, qu’ils n’ont ni le temps ni l’intérêt d’explorer des sujets profonds tels que la spiritualité ou l’objectif transcendantal.
.4. Relativisme moral: promouvoir l’idée qu’il n’existe pas de vérités absolues, que tout est relatif et subjectif, pourrait éroder la base morale de nombreuses croyances religieuses. Si tout est également valable, alors le sens de la foi peut être dilué, rendant tout vague et confus ».
Ces deux points ne semblent-ils pas être le rapport détaillé de l’état de santé de notre société ? Absorbés par des myriades d’informations et de stimuli vaguement divertissants, submergés par les tâches pratiques, nous ne remarquons plus ce que nous devrions chercher, ce qui nous rend mal à l’aise par son absence, et nous restons distraits de nous-mêmes et de la recherche du sens ultime de la vie.
En ce qui concerne le relativisme, il n’y a pas grand-chose à ajouter : c’est la dictature dont parlait Benoît XVI, un pouvoir qui, dans de nombreux cas, est encore doux dans son exercice, mais coercitif dans ses effets parce qu’il nous amène à douter de la vérité et à céder, de manière ludique, aux vérités « gentiment » imposées par l’idéologie actuelle.
Mais ce n’est pas tout, il y a trois autres stratégies proposées par Chat GPT qui complètent la fresque assez sombre du monde actuel : nous en voyons les effets extérieurs mais, si nous croyons que c’est un principe intelligent qui veut notre destruction, nous comprenons comment ces effets ne sont autres que nos âmes « extraverties ».
« 5. le scientisme extrême: il exalte la science comme seule source de connaissance valable et dénigre le spirituel ou le religieux comme superstition ou archaïsme, éliminant l’idée de transcendance au profit du purement matériel.
.6. Hypocrisie au sein des institutions religieuses: la dénonciation, voire la promotion de la corruption, de l’immoralité et des scandales au sein des institutions religieuses pourrait amener les gens à perdre confiance en leur foi. Si les dirigeants ou les institutions représentant la foi échouent, beaucoup risquent de l’abandonner complètement.
.7. Division et conflit: encourager la haine et la division, même entre croyants, pourrait amener les gens à se détourner de la foi. Une religion présentée comme une source de paix est minée par des conflits internes ou des guerres menées en son nom ».
La science est un don précieux de Dieu, le résultat du bon usage de notre raison que le Créateur veut et encourage à utiliser pour le bien. Mais la détacher de l’ordre des choses, c’est-à-dire l’utiliser pour nier l’autre forme de connaissance de la réalité qu’est la foi, la rend mauvaise.
Chat GPT semble le savoir mieux que la plupart des êtres humains. Le chapitre sur les scandales dans l’Église et les institutions religieuses en général est une autre blessure qui est malheureusement réelle, tant en raison des faits très graves qui se sont réellement produits, qu’en raison des accusations qui ont été lancées même contre des pasteurs ou des religieux innocents, dans le but précis de couvrir de boue toute l’Église.
La dernière proposition est celle qui met le plus en évidence la nature du mal, car elle favorise directement ce qu’il désire : la haine et la division.
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La conclusion de Chat GPT est aussi surprenante que les points qu’il suggère : même le choix d’abandonner la foi, que le démon imaginé par AI semble avoir en tête comme but suprême de son action destructrice, doit paraître délibéré, libre, voire « naturel » :
” Ces méthodes seraient indirectes et subtiles, faisant apparaître l’abandon de la foi comme une conséquence “ naturelle ” des circonstances, plutôt que comme une manipulation évidente.
Que pensez-vous de cette idée ?
Et nous, qu’en pensons-nous ? Que le mal est réel et puissant, qu’il ne se repose jamais :
« Votre ennemi, le diable, comme un lion rugissant, va et vient, cherchant qui il dévorera. Résistez-lui fermement dans la foi, sachant que les mêmes souffrances sont imposées à vos frères dispersés dans le monde ».
C’est Pierre qui le dit dans sa première épître, dans laquelle il nous rappelle également pourquoi le Christ a accepté de souffrir pour nous sauver. Nous sommes sauvés d’une très grande puissance, qui devient presque rien face à la toute-puissance de la miséricorde de Dieu.
« Le Dieu de toute grâce, qui vous a appelés à sa gloire éternelle dans le Christ Jésus, lui-même, après que vous aurez souffert un peu, vous rétablira, vous affermira, vous fortifiera, vous donnera un fondement solide.
À lui la puissance pour l’éternité.
Amen » . (1 P 5, 5-14)