Interview de Mgr Paglia
Le très habile prélat "mondain" répond (par écrit!) aux questions "impertinentes" de Giuseppe Rusconi sur <Rosso Porpora> (24/7/2018)
Impossible de le piéger!
Dire q'il est "très habile" n'est pas une figure de style. Il appartient cette catégorie que certains auteurs nomment "vieux renards de curie" et il répond, sans jamais se compromettre, aux questions les plus glissantes. Ses propos, tout enveloppés de langue de buis et d'onction ecclésiastique ne s'écartent pas d'un iota du politiquement correct, sans pour autant encourir le soupçon d'hérésie: de sorte que les commentaires que Giuseppe Rusconi propose AVANT l'interview sont presque plus intéressants que l'interview elle-même (que le vieux renard a tenu à donner par écrit, pour éviter tout dérapage, on ne sait jamais...), qui doit être entièrement décryptée à la lumière de ce que nous savons de lui.
De nombreux articles de ce site évoquent Mgr Paglia (rappelons qu'il est le postulateur dans la cause de béatification de Mgr Romero), voir en particulier:
- Feu vert de Mgr Paglia à l'euthanasie ( à propos d'Alfie Evans)
- Le mystère de la nomination de Paglia à la PAV
- Mgr Paglia: la belle carrière d'un courtisan
- Un archevêque très "border line" (I) et (II) (à propos de la fresque de Terni)
- Une Académie Pontificale, mais plus "pour la Vie"
- Virage à l'Académie Pontificale pour la Vie
- Des ennuis judiciaires pour Mgr Paglia
- Mgr Paglia rectifie, la Bussola répond (la gestion du diocèse de Terni)
L'Académie empaillée/empagliée (*): le président de la PAV s'exprime à 360°
(*) Jeu de mots sur le nom Paglia, qui en italien signifie aussi "paille"
Giuseppe Rusconi
www.rossoporpora.org
19 juillet 2018
Ma traduction
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Ample interview tous azimuts du président de l'Académie pontificale pour la vie, Mgr Vincenzo Paglia. Le prélat de soixante-treize ans répond aux questions sur la récente Assemblée annuelle, le "renouveau" de l'Académie, l'attention à la vie naissante, à la vie de la création, au problème des migrants. Sur ce dernier point, également sur les catholiques pratiquants et les "vrais disciples de l'Évangile". Dans l'interview, l'affaire Alfie, les votes en Irlande et en Argentine, le mariage en tant qu'union entre un homme et une femme.
Quand vous le rencontrez (ou qu'il répond à des questions quelque peu gênantes dans la salle de presse), c'est un festival de sourires. Dans le sien, nous qui avons mauvais esprit, nous croyons aussi lire un "Mais quelles illusions te fais-tu? Ecoute, je ne suis pas assez idiot pour me faire avoir par toi....Je vais te faire voir....".
Né à Ciociaria il y a soixante-treize ans, il peut être défini comme l'incarnation authentique d'une catégorie très spécifique de prélats romains, caractérisée par une agréable bonhomie dans les relations humaines et en même temps par un sens du pouvoir bien développé et concret. Dès les premières années - en tant qu'assistant ecclésiastique, développant ses dons innés de Mazarin et tissant ainsi des réseaux au Quirinal (présidence de la République, ndt) et au palais Chigi (résidence du Premier ministre) depuis le cœur du Trastevere (siège de Sant'Egidio) - il a accompagné la vie active de la Communauté de Sant'Egidio, médiateur incisif dans le dialogue œcuménique avec les orthodoxes et dans les questions très délicates des Balkans; il a été évêque de Terni-Narni-Amelia, puis président du Conseil pontifical pour la Famille. Le jour de la fête de l'Assomption en 2016, il est devenu président de l'Académie Pontificale pour la Vie (Pontificia Academia per la Vita, PAV) et Grand Chancelier de l'"Institut Pontifical Jean Paul II pour les études sur le mariage et la famille", rebaptisé "Institut Théologique Pontifical pour les Sciences du Mariage et de la Famille". Les controverses, souvent très chaudes, l'accompagnent depuis l'époque de Terni; les plus récentes concernent le renouveau radical imposé tant au PAV qu'à l'Institut Jean-Paul II. Ces dernières années, certaines de ses déclarations très élogieuses sur Marco Pannella (un bel exemple de concrétisation de ses dons mazarins) ont fait grand bruit, comme d'autres considérés pour le moins audacieuses (ne serait-ce que pour le jeu du dire-non dire) en matière de vie et de famille, et on lui a reproché les timidités et justifications douteuses comme dans le cas d'Alfie Evans.
Nous présumons qu'avec autant d'indices, l'identité du prélat est maintenant connue de ceux qui nous lisent: c'est lui, Mgr Vincenzo Paglia, une vie entre sourires, service et pouvoir. Dont nous ne pensons pas que notre homme soit désolé. Il est juste de souligner que "pouvoir" n'est pas un gros mot en soi: l'important est qu'il soit exercé au service de l'humanité et (dans ce cas) de l'Église, afin que celle-ci soit stimulée dans la concrétisation de son service d'empreinte évangélique (qui, entre autres choses, inclut le "Si c'est oui, oui; si c'est non, non" que beaucoup de prélats et de laïcs "engagés" prétendent aujourd'hui ignorer, immergés jusqu'au cou dans leurs médiocres compromis quotidiens, souvent pour des raisons très mondaines, comme le montre désormais chaque jour la chronique à juste titre impitoyable).
Il y a quelque temps, nous avons demandé au président de l'Académie Pontificale pour la Vie - pour <www.rossoporpora.org> et pour <Inside the Vatican> - un entretien tous azimuts, en partant du 'renouveau' qui a eu lieu dans l'organisme. Puis, le 19 juin, il y a eu un déjeuner de travail, riche en stimulation pour une réflexion plus approfondie, auprès de la Presse étrangère. Finalement, après une énième tergiversation, l'interview, Mgr Paglia nous l'a accordée par écrit. Après avoir reçu les questions, il devait encore avoir quelques doutes résiduels, car il nous a dit que l'interviewe était parfois très impertinente (et nous : "Peut-être impertinente, mais en même temps très pertinente pour le sujet"). Cependant, l'impertinence présumée l'a poussé à des réponses plus passionnées que d'habitude. Ce qui, du point de vue journalistique, mais aussi pour la clarté des positions, est toujours un avantage pour les lecteurs.
Parmi les thèmes de l'entretien figurent ceux liés à la dernière assemblée et au "renouveau" du PAV. Comme on le sait, certains membres épurés, d'une stature culturelle non négligeable - emmenés par le professeur Josef Seifert - ont donné naissance l'automne dernier à une Académie parallèle, appelée Académie Jean-Paul II pour la vie humaine. Une authentique entreprise téméraire de notre époque, qui se fonde aussi sur la conviction - comme l'a dit le professeur Seifert lui-même - que "pour atteindre ceux qui vivent dans l'erreur, nous savons avec encore plus de certitude que nous ne devons jamais transiger avec la vérité en adaptant notre jugement moral aux opinions éthiques qui prévalent aujourd'hui, si elles sont fausses".
L'interview, cependant, comporte d'autres moments qui peuvent intéresser le lecteur. On y traite des priorités actuelles de la PAV entre la défense de la vie naissante, le soin de la création et le problème des migrants. Et à ce dernier propos, également la fracture entre les choix d'une partie importante du peuple catholique et les appels de la troupe des prélats et des laïcs catho-fluides qui ont pris le parti du business de l'accueil. Business, business - même si notre homme dans sa réponse semble ignorer cette vérité désormais pratiquement une lapalissade - qui n'a rien à voir avec un véritable accueil humain et chrétien. Puis on a parlé de la fin de la vie, avec une réponse de Mgr Paglia (qui justifie les évêques anglais) sur le cas d'Alfie Evans. Inévitables, les réflexions sur le vote irlandais pro-avortement légalisé et sur le vote argentin (idem, mais approuvé pour l'instant dans une seule Chambre). Enfin, la question du mariage catholique, avec une réponse initiale très claire et définitive, puis très nuancée, ponce-pilatesque, dirions-nous.
Ce sont là quelques-unes de nos considérations sur les réponses à l'interview, qu'on n'est pas obligés de partager. Laissons maintenant - sans autre commentaire - la parole à Mgr Paglia, afin que chacun puisse se faire une idée des contenus qu'il a exprimés, de toute façon dignes de réflexion: on ne peut pas dire que notre interlocuteur ne sait pas illustrer et défendre ses raisons .....
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L'interview tous azimuts
Mgr Paglia, comme s'est concrétisé dans les travaux de l'Assemblée annuelle (qui s'est tnue entre le 15 et le 27 juin 2018) sur le thème "Nous naissons égaux. Et après? Une responsabilité globale" ? Quels sont les aspects les plus discutés et les plus sensibles ? Y a-t-il eu un débat interne? Y a-t-il eu des questions controversées?
Le thème de la Global Bioethics (en anglais dans le texte) a avant tout offert une perspective que nous avons voulu préciser plus en détail pour la phase très délicate materno-infantile: la vie humaine et les questions éthiques connexes ne peuvent être comprises et abordées qu'en examinant attentivement le contexte dans lequel elles se posent, avec toutes ses articulations. On naît dans un monde, dans une culture, dans un réseau de relations qui marquent de manière essentielle la réalité et la dignité de chaque individu. Avec un slogan, nous pourrions dire que l'Assemblée de cette année a repositionné le thème de la vie humaine dans le cadre dessiné par l'encyclique Laudato Si du Pape François.
La PAV a été "renouvelée" : en quoi consiste ce renouvellement? Comment se reflète-t-il sur votre activité? S'est-il également concrétisé durant cette Assemblée?
La perspective à laquelle je viens de faire référence est une bonne illustration du renouveau que le Pape François a demandé à l'Académie de réaliser. Et les différents projets ouverts sur lesquels l'Académie travaille se placent dans la même logique: la robo-éthique, le gene-editing, les neurosciences, l'intelligence artificielle, les soins palliatifs. La "vie" n'est pas une réalité abstraite: la vie est l'ensemble du genre humain composé de tous les hommes et de toutes les femmes dans leur concrétisation historique.
CATHOLIQUES ET NON-CATHOLIQUES : L'ACADÉMIE EST PONTIFICALE ET DONC APPELÉE À CONSTRUIRE DES PONTS.
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La PAV compte également des non-catholiques parmi ses membres. Pourquoi? Peut-on encore l'appeler à juste titre Académie PONTIFICALE?
Etre catholique signifie avoir à cœur le destin de tous, sans exclure personne. Cela requiert d'affronter, en étant enracinés dans l'Évangile et dans la tradition ecclésiale, les grandes questions de la vie humaine avec tous les hommes de bonne volonté. A sa manière, l'Eglise catholique est responsable de tous les hommes et, précisément parce que son horizon est universel, notre Académie accueille parmi ses membres des personnes qui représentent d'une certaine manière les différents "mondes" de la famille humaine. Evidemment, le pilier de l'identité catholique reste ferme. Et elle est pontificale, aussi parce que par vocation l'Église - et en particulier le Pontife - est appelée à "construire des ponts" avec tous. Ce n'est pas un hasard si, dans un monde globalisé, le Pape est le leader vers lequel tous regardent. Et lui, aussi à travers l'action de l'Académie, entend mener à bien cette mission qui est la sienne.
Les thèmes 'nouveaux' de la PAV : Est-elle juste, l'impression que la défense de la vie naissante et celle de la vie à son déclin ne sont plus LE mais L'UN DES thème(s) - même pas le plus important - des activités de l'Académie?
Non. Souvent, les préjugés créent de mauvaises blagues. Pour l'Académie, tous les moments de la vie - sans exception - sont importants. Et si on doit vraiment faire une préférence, l'attention doit être plus forte là où la vie est la plus faible ou la plus blessée. Et prenez bien garde: si vous voulez vraiment aider la vie, qu'elle soit naissante ou déclinante - pas l'idée de la vie, mais la vraie vie - il est beaucoup plus efficace de la défendre toujours, de l'accompagner toujours, de la promouvoir toujours. Je le répète, en ayant une plus grande attention quand elle est plus faible. Nous ne pouvons pas diviser la vie que Dieu veut une et belle pour tous.
NON-ÉQUIVALENCE, MAIS RELATION INSÉPARABLE ENTRE LA DÉFENSE DE LA VIE HUMAINE ET LE SOIN DE LA VIE DE LA CRÉATION.
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Défense et promotion de la vie humaine: pour la PAV, quelle est la relation entre la défense de la nature et le soin de la vie? Sont-ils équivalents?
Évidemment, il ne peut y avoir d'équivalence. Et pourtant, il existe une relation inséparable. C'est pourquoi nous ne pouvons pas nous attaquer à une question sans nous attaquer à l'autre. Ce n'est pas par hasard - si on lit la Genèse - que nous découvrons que le Créateur a confié à l'alliance de l'homme et de la femme le soin de la création et la responsabilité de la génération et des générations. C'est un message qui doit être redécouvert dans son intégralité.
Avortement, euthanasie: dans ces cas, on tue consciemment. Quel est le rapport avec le soin de la vie des migrants? Quel est le lien (le cas échéant) entre le meurtre d'un enfant dans le sein maternel et le naufrage d'un bateau de migrants?
L'Église n'est pas une "académie de théories abstraites". L'Église (et donc aussi l'Académie pontificale pour la Vie, avec une majuscule) a pour lex suprema - comme on le lit dans le dernier canon du Code de droit canonique - la salus animarum. Et, comme une mère, l'Église ne peut tolérer le fait qu'on fasse mourir un enfant alors qu'il est encore dans le ventre de sa mère, ni qu'on le laisse mourir noyé dans la mer parce que personne ne l'accueille ou parce qu'on ne lui permet pas d'être avec sa mère; et elle ne peut pas non plus tolérer qu'il meure dans les guerres, ni que la vie soit supprimée par la peine de mort (personne, jamais, n'a de pouvoir sur la vie des autres!). La question que Dieu a posée à Caïn : "Où est ton frère?" résonne fort à notre époque. La réponse décide de l'humanité ou non de nos sociétés (?).
CRITIQUES À L'ACCUEIL DES MIGRANTS: LES CHRÉTIENS PRATIQUANTS NE SONT PAS NÉCESSAIREMENT DES DISCIPLES DE L'ÉVANGILE.
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L'opinion publique italienne (et pas seulement) - et parmi elle, également beaucoup de catholiques - semble ne pas suivre, sur le thème de l'immigration, les appels à l'accueil qui viennent d'une partie de la hiérarchie ecclésiastique. Pourtant, ceux les détracteurs, non seulement se disent chrétiens, mais aussi souvent catholiques pratiquants, qui fondent leurs actions, par exemple, sur le catéchisme de l'Église catholique (voir le n.2241, accueillir dans la limite du possible : "Les nations les plus riches sont tenues d'accueillir, dans la mesure du possible, l'étranger en quête de sécurité et de ressources nécessaires à la vie, qu'il ne lui est pas possible de trouver dans son pays d'origine...."). La constatation que de nombreux catholiques critiquent l'accueil tel qu'il est compris par une certaine hiérarchie ecclésiastique, est-ce quelque chose qui, si nous nous en réjouissons tout comme de nombreux lecteurs fidèles de <www.rossoporpora.org>, vous inquiète? Ou pas? Monseigneur Paglia, quelles conséquences en tirez-vous?
Le Catéchisme dit quelque chose de profondément juste et sage. La limite possible est déterminée d'une part par une connaissance précise de la situation (il existe de nombreuses enquêtes qui montrent un grave décalage entre la perception et la réalité du phénomène migratoire en Italie et dans le monde) et d'autre part par une vision globale du monde et des relations qui le structurent. Les racines chrétiennes de l'Europe, qui doivent être préservées à juste titre, offrent exactement cette vision, fondée sur la centralité de la vie humaine et sur la proximité entre les personnes, avec une attention particulière pour les plus pauvres. En tout cas, il ne suffit pas d'être ou de se déclarer chrétien pratiquant pour être vraiment disciples de l'Évangile. Et, en ces temps difficiles, les chrétiens doivent offrir un témoignage de grandeur dans l'amour. Mgr Romero disait que Vatican II demande à tous les chrétiens d'aujourd'hui d'être martyrs, c'est-à-dire de "donner leur vie pour les autres", à certains jusqu'au sang, à tous de toutes façons. Aujourd'hui, plus que d'être "pratiquants" on demande aux chrétiens d'être martyrs, précisément de "donner leur propre vie pour sauver celle des autres". C'est pourquoi Jésus n'a pas dit : "Entre parce que tu étais pratiquant", mais "Entre parce que j'étais un étranger et que tu m'as accueilli". Le reste est rhétorique, c'est de la petite politique, c'est de l'intérêt particulier. Nous, dans le monde, nous sommes tous frères. C'est la base. C'est de là qu'on part pour discuter.
Vous avez souligné à plusieurs reprises que "quand une personne n'est pas guérissable, elle n'est de toute façon jamais incurable. Pouvez-vous nous dire ce que cela signifie concrètement, avec quelques exemples?
C'est la suite de la réponse précédente. Personne ne devrait jamais être abandonné, même lorsque la médecine ne peut plus guérir. Toujours, il faut prendre soin, c'est-à-dire donner notre vie, notre temps, nos ressources pour être proches de ceux qui vivent des moments difficiles. De ce point de vue, les soins palliatifs sont aujourd'hui la plus scientifique et en même temps la plus humaine attention à la vie de ceux qui terminent leur saison terrestre.
CAS ALFIE EVANS: NON À LA DÉRIVE IDÉOLOGIQUE, GRANDE SAGESSE DES ÉVÊQUES ANGLAIS.
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Le cas emblématique d'Alfie Evans. Pour vous, c'était un meurtre?
Je vous retourne la question. Et vous, qu'en pensez-vous? Avez-vous vu tous les documents pour porter un jugement aussi grave? Pour ma part, je ne peux pas porter ce jugement parce que je n'ai pas pu voir tous les documents nécessaires. Sans la vision des documents, on discute sur les idées et non sur les personnes, avec un risque sérieux de dérive idéologique. Pour ma part, j'ai insisté pour que le cercle d'amour entre médecins, parents, infirmières et amis ne soit pas rompu. Le recours aux tribunaux n'est jamais un progrès. Tout comme ce n'est pas un progrès de couper la relation avec les parents. Dans de tels cas, il est crucial d'éviter par tous les moyens de rompre le cycle thérapeutique. J'ai jugé important de me référer aussi aux déclarations des évêques anglais, qui étaient d'une grande sagesse.
LE VOTE IRLANDAIS SUR L'AVORTEMENT N'ÉTAIT PAS UNE SURPRISE.
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L'Irlande et le vote sur l'avortement: un résultat attendu? Pourquoi? l'Église irlandaise pouvait-elle faire plus dans la campagne référendaire?
Le résultat du vote irlandais s'inscrit dans un mouvement culturel occidental plus large et désormais bien établi. Malheureusement, l'histoire dramatique de la pédophilie, qui a déchiré l'Église et créé des abîmes avec la société, a également pesé lourd. Permettez-moi de vous dire que c'est moi - j'étais alors Président du Conseil Pontifical pour la Famille - qui ai proposé au Pape que la Rencontre Mondiale des Familles se tienne à Dublin, précisément parce que je voulais que la présence du Pape aide l'Église de cette terre à redécouvrir le pouvoir du témoignage évangélique. Il manquait un pape à l'Irlande depuis 1979 [visite de Jean-Paul II, ndt]. Et je suis sûr que le Pape François saura réconforter et exhorter.
ARGENTINE ET VOTE SUR L'AVORTEMENT: PRESSIONS INTERNATIONALES? SI TEL EST LE CAS, "VIOLENCE INSUPPORTABLE".
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Argentine et premier vote sur l'introduction de l'avortement légal. Vote très serré de la Chambre. Selon vous, y a-t-il eu des pressions de la part des institutions financières internationales ?
Je n'ai pas d'informations spécifiques pour répondre de manière pertinente à votre question. Cependant, j'ai pris la parole publiquement avant et après le vote. J'ai dit : "Comment peut-on se réjouir d'une loi qui accompagne le sale travail de la mort?" Et si ce que vous dites est vrai, il s'agit d'une violence insupportable. Et malheureusement, il y a des visions socio-économiques qui avilissent la dignité des personnes, au point de considérer la vie de certains inutile, improductive. C'est la culture du déchet dont parle souvent le Pape, à laquelle nous devons nous opposer fermement. En tout cas, nous, chrétiens, nous sommes appelés à toujours travailler pour la vie. Chaque avortement est aussi une tragédie pour les mères. C'est pourquoi nous devons être proches de ces femmes, essayer de les aider, sans jamais les abandonner, en les soutenant de toutes les façons.
IL Y A UNE SEULE FAMILLE, ENTRE L'HOMME ET LA FEMME. CEPENDANT, D'AUTRES FORMES D'IMPORTANCE SOCIALE DOIVENT ÊTRE ACCOMPAGNÉES...
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Famille : une seule, entre l'homme et la femme. Le Pape l'a répété et, par conséquent, la discussion devrait être close. Dans l'Église, cependant, des voix différentes se font de plus en plus entendre, y compris à un niveau élevé, ce qui entraîne une confusion considérable parmi de nombreux fidèles.... En tant que Président émérite du Conseil Pontifical pour la Famille - qui a également indiqué Dublin comme siège de la prochaine Rencontre Mondiale des Familles - comment voyez-vous cette situation ?
Que la famille soit une seule, celle d'un homme et d'une femme qui s'unissent pour former une famille était et a toujours été l'enseignement de l'Église. L'Exhortation Amoris Laetitia - fruit de deux assemblées synodales - veut promouvoir cet idéal qui n'a pas été remis en question. Le point central autour duquel tourne l'Exhortation apostolique est comment aider les familles - même celles qui sont blessées, même celles qui sont seulement ébauchées - à entreprendre un chemin afin qu'elles puissent atteindre l'idéal proposé. Le Pape François est tellement convaincu de l'importance cruciale des familles pour la vie de l'Église et pour la vie du monde qu'il exhorte tout le monde à aider toutes les familles, même les plus problématiques, à grandir. Et il est évident que le mariage et la famille qui en découle sont ceux décrits depuis la Genèse. D'autre part, la question demeure de savoir comment accompagner et prendre aussi soin des personnes pour lesquelles il n'est pas possible d'établir les liens propres à une famille ainsi comprise, mais pas pour autant privées d'importance sociale. Il y a beaucoup à faire dans ce domaine, parce que les réflexions sages, et respectueuses de la réalité, exigent intelligence, discipline et passion. Il me semble que la nouvelle Chaire Gaudium et Spes, établie à l'Institut Jean-Paul II, peut être un bon exemple de ce service charitable à la vérité, offert au peuple de Dieu.
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