Les deux obssessions de "l'Église de François"
... écologie et immigration. Et l'Evangile, dans tout cela? (1er/8/2018)
En Italie, une grande partie du clergé, surtout "d'en haut", est vent debout contre le nouveau gouvernement et son ministre de l'intérieur liguiste, Salvini. Tandis que le cardinal Coccopalmerio réclame que le code de droit canonique inclue une condamnation des comportements anti-écologiques...
>>> Articles reliés:
¤ Les ennemis de la civilisation chrétienne (Salvini = Satan...)
¤ Vade retro Salvini
¤ L'Eglise immigrationiste qui oublie Dieu
Délire immigrationiste...
La "guerre" des prêtres à Salvini (mais le peuple ne les suit pas)
Rino Cammilleri
30 juillet 2017
www.lanuovabq.it
Ma traduction
* * *
De certains évêques aux journaux, cela fait des semaines que le ministre de l'Intérieur est la cible d'un feu nourri à la fois sur l'immigration et sur la question des crucifix dans les lieux publics. Une attaque que le peuple catholique ne comprend pas et, selon les résultats électoraux, ne partage pas.
---
La haine de l'intelligentzia catholique pour Salvini, hiérarchie comprise, est palpable et déclarée. La guerre, donc. Sant'Egidio le fustige à propos des Roms de Rome sur Avvenire. Le père Spadaro, directeur de la Civiltà Cattolica, s'oppose à sa revendication de mettre des crucifix dans les offices publics et les salles de classe. Famiglia Cristiana tente de l'exorciser et le balance en couverture comme s'il était possédé. On dira qu'il s'agit de figures de la gauche ecclésiale, mais la CEI a même intitulé son dernier numéro «Migrants, de la peur à l'accueil». La position du pape sur le principal cheval de bataille de Salvini est bien connue, et François ne manque jamais une occasion de la rappeler: un naufrage en Méditerranée et voilà reparti le slogan «des ponts, pas des murs».
La chose curieuse, et sur laquelle les susnommés ne réfléchissent absolument pas, c'est le décalage total entre eux et ce qu'on nomme le «peuple de Dieu» dont ils sont investis de la représentation. Salvini et sa Ligue ont eu une avalanche de suffrages, et ils en auraient eu plus en cas d'élections répétées. Les suffrages qu'ils n'ont pas eu sont allés aux Cinq Étoiles. Maintenant, de deux choses l'une: soit les catholiques italiens ont disparu, soit ce sont eux qui ont voté pour la Ligue et le mouvement Cinq Étoiles. En somme, il y a un sentiment populaire que la Ligue et M5S ont intercepté, et qui désormais ne se soucie même pas des appels du Pape.
C'est un beau problème, donc, pour une aristocratie catholique qui, électoralement parlant, est avec le Pd (i.e. la gauche!). Les gens vont à la messe (ce n'est pas vrai que les églises sont vides, au contraire, elles sont toujours débordantes: il faut essayer pour le croire), écoutent en silence et avec discipline ce que le prêtre dit, communient (à la messe, il y en a très peu qui ne le font pas) mais ensuite, dans le secret de l'urne, votent Salvini. C'est-à-dire qu'ils font le contraire de ce que l'aristocratie catholique, y compris le pape, dit.
Si j'étais à la place de la Conférence épiscopale italienne, je commanderais d'abord un beau sondage, juste pour tâter le pouls de mes sujets. Puis, ayant senti les humeurs du peuple catholique, je m'exprimerais, si possible en conséquence. On dira que le clergé, lorsqu'il prêche, ne peut pas dépendre des sondages. C'est vrai. Mais alors de quoi dépend-il ? Autrfois, on aurait dit «de la doctrine», mais aujourd'hui la doctrine a été mise de côté, parce que «elle n'est pas un bâton à utiliser contre les fidèles» (ipse dixit). «Entamer des processus est plus important pour l'Eglise que gérer des espaces», a rappelé Spadaro, répétant que «ceux qui, après cinq ans, espèrent encore que l'Eglise construise son hôpital, cessant d'être l'hôpital de campagne dont a parlé le Pape, n'ont rien compris de l'Eglise, qui soit est un hôpital de campagne, soit n'est plus l'Eglise». Ce sont les propos du directeur de la Civiltà Cattolica lors de la présentation du Cahier de Limes «François et l'Etat de l'Eglise» (cf. formiche.net).
Entamer des processus. Hôpital de campagne. Bof. Que les fidèles lambdas se sentent désorientés, c'est le moins qu'on puisse dire. Salvini est un suppôt de Satan parce qu'il ne veut pas ouvrir tout grand les ports à l'Afrique? Là, il n'y a pas besoin de sondages, il suffit d'aller voir combien d'exemplaires perd Famiglia Cristiana et combien de consensus gagne Salvini. Salvini veut remettre le crucifix à l'école, et le fidèle lambda, que fait-il? Il se réjouit. Au contraire, le Père Spadaro twitte: «Utiliser le crucifix comme n'importe quel Big Jim est blasphématoire. La croix est un signe de protestation contre le péché, la violence, l'injustice et la mort. Ce n'est jamais un signe d'identité. Il crie l'amour pour l'ennemi et l'acceptation inconditionnelle. C'est l'étreinte de Dieu sans défense. Bas les pattes».
Blasphème, même.
Moralité: Le pape, les évêques et les prêtres vont d'un côté, tandis que leur peuple va dans une toute autre direction. En fait, en ce qui concerne la croix, il y a toute une série de nations qui l'ont mise dans leur drapeau. Comme signe d'identité, justement. Je fais personnellement partie d'un groupe de convertis qui se sont convertis à l'Église, et non à une ONG d'entraide. Salvini n'a pas compris que l'Église entame des processus, que c'est un hôpital de campagne et qu'elle ne supporte pas le crucifix sur les murs publics? Il est en nombreuse compagnie, et tôt ou tard, si elle continue ainsi, on verra émerger quelque tête chaude qui proclamera la grève du 8 pour mille. Alors les sondages deviendront importants même pour leurs éminences.
... et délire écologiste
Une Église écologiste pour les écologistes
Stefano Fontana
30 juillet 2018
www.lanuovabq.it
Ma traduction
* * *
Délit de comportement anti-écologique dans le Code de Droit Canonique et service de notation environnemental pour les entreprises. Ce sont les récentes propositions du cardinal Coccopalmerio [ndt: il en est question, et pas en bien, ici Lobby gay: les contradictions du Vatican ]. Il faut espérer qu'elles seront ignorés, mais elles sont néanmoins le signe d'une dérive écologique très éloignée de la Doctrine sociale de l'Église.
---
Deux requêtes récentes du Cardinal Coccopalmerio, Préfet émérite du Conseil Pontifical pour les Textes Législatifs, méritent de ne pas être négligées parce qu'elles expriment bien le nouveau climat qu'on respire dans l'Église sur la question environnementale, ou écologique.
Le cardinal a souhaité deux choses: tout d'abord que dans le Code de Droit Canonique, le comportement anti-écologique soit rendu explicite et condamné et qu'en revanche une attitude de respect mais aussi de prévention pour protéger l'environnement soit établie comme une nouvelle obligation légale. La seconde est que puisse être établi un service de notation environnemental des entreprises qui tienne compte de la Doctrine sociale de l'Église.
Puisse Dieu ne pas vouloir que ces requêtes trouvent un quelconque accueil. Il serait ridicule de punir un curé en vertu du droit canon parce qu'il n'a pas collaboré à la conversion des énergies non renouvelables en énergies renouvelables en continuant à conduire une voiture diesel, ou parce que le presbytère n'a pas encore été équipé de panneaux solaires.
En plus d'être ridicules, les deux requêtes pourraient facilement être accusées de servir des intérêts partisans: ceux des entreprises impliquées dans le commerce des énergies renouvelables, et ceux des sociétés de "notation écologique catholique".
Des deux propositions du cardinal, la plus intéressante du point de vue de la Doctrine sociale de l'Église est la seconde. Pour évaluer une entreprise du point de vue du néo-environnementalisme catholique, il faut des critères et le cardinal ne doute pas que ces critères doivent être ceux de la Doctrine sociale de l'Église. Mais sommes-nous sûrs que les critères de la Doctrine sociale de l'Église - du moins tels que nous les avons connus jusqu'à présent - approuveraient l'évaluation du néo-environnementalisme catholique ?
Depuis que les "bilans sociaux" sont en vogue et que l'on parle beaucoup de "responsabilité sociale des entreprises", on assiste à une forte augmentation de l'attention portée par les entreprises à la protection de l'environnement, dont les éléments sont montrés en tête de leurs bilans sociaux comme preuve de la responsabilité sociale de l'entreprise. En revanche, jamais les bilans sociaux des entreprises n'accordent une place aux aides à la famille, aux investissements pour une culture de la vie, aux initiatives pour encourager la maternité des femmes salariées de l'entreprise elle-même, ou à des formes de collaboration avec ceux qui, dans la région, travaillent en première ligne sut ces frontières. Ceci pour une simple raison: l'environnementalisme est à la mode, la défense de la vie humaine dès le moment de la conception ne l'est pas. Par conséquent, la responsabilité sociale des entreprises est fortement conditionnée par ce que le climat culturel et social environnant considère comme digne de cette responsabilité: utiliser du papier recyclé oui, faire une contribution au centre local d'aide à la vie, non.
La notation proposée par le cardinal Coccopalmerio présente tous les indices pour la faire rentrer dans ce cadre. Si la notation incluait également l'écologie humaine, comme l'appelait Jean-Paul II, la notation de la quasi-totalité des entreprises serait très faible. Si, par contre, elle se concentre uniquement sur le papier recyclé ou sur des attitudes similaires, elle pourrait être très flatteuse. Le néo-écologisme catholique semble vouloir séparer les deux dimensions de l'écologie et la notation de Coccopalmerio veut sevir les intérêts néo-environnementalistes.
L'appel à la Doctrine sociale de l'Église est donc inadmissible, en ces termes, étant donné que, selon son enseignement, il ne peut jamais être licite de séparer la défense de l'environnement de la défense de la personne humaine. Il existe également une relation hiérarchique entre les deux dimensions: la protection de l'environnement est fonction de la personne humaine, la protection de la personne humaine est fonction d'elle-même. Cette dernière prévaut donc, et donne aussi un sens à la première en ce qu'elle est sa fin (même si ce n'est pas la fin ultime, qui reste toujours la gloire de Dieu).
Le néo-environnementalisme catholique, en revanche, semble annuler cette relation hiérarchique et même le concept d'"écologie intégrale" n'est pas toujours clair sur ce point. La nouveauté de ce dernier concept voudrait être d'élargir l'idée d'écologie à tous les domaines de la vie. Parallèlement, le concept de bioéthique suit lui aussi le même processus d'élargissement. Ainsi, l'avortement et la déforestation risquent d'être mis sur le même plan, tout comme, que sais-je, la fécondation artificielle et la robotique.
L'Académie pontificale pour la vie et l'Institut pontifical Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille ont été, comme nous le savons, transformés en ce sens. Pour le même motif, nous attendons un document de la COMECE (Commission des Episcopats de la Communauté Européenne, ndt) sur la robotique et pas sur l'avortement et l'euthanasie. L'écologie intégrale risque d'étendre le concept d'écologie mais aussi de l'aplatir, perdant sa structure hiérarchique naturelle. Un ordre, en effet, n'est pas seulement constitué d'éléments mis côte à côte, mais d'éléments qui valent plus ou moins que les autres.
La reproduction, uniquement partielle, des articles de ce site doit mentionner le nom "Benoît et moi" et renvoyer à l'article d'origine par un lien.