Les ("extrêmes") droites européenne à Milan
Stefano Fontana a assisté au meeting d'hier. Il en émerge un récit en décalage avec celui que nous ont infligé nos médias - aveuglés par leur hostilité -, et un fait majeur mais ignoré: Matteo Salvini cite Benoît XVI et Jean-Paul II, il est en train de s'imposer comme un leader catholique. En ce sens, prendra-t-il en Italie la place laissée vide par la Démocratie Chrétienne? (19/5/2019)
>>> Ci-contre: photo de Stefano Fontana
Salvini se présente comme le nouveau leader catholique
Stefano Fontana
www.lanuovabq.it
19 mai 2019
Ma traduction
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Un discours qui commence avec Chesterton et se termine en se plaçant sous la protection du Cœur Immaculé de Marie, confiant entretemps l'Europe à ses six saints patrons, et citant Jean Paul II, Benoît XVI, De Gasperi et Sarah. A Milan, Salvini s'adresse aux catholiques, même si la hiérarchie de l'Eglise le voit d'un mauvais oeil.
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Un discours qui commence par Chesterton et se termine par l'appel à la protection du Cœur Immaculé de Marie, confiant entretemps l'Europe à ses six saints patrons, et deux citations de saint Jean Paul II, une de Benoît XVI, une de De Gasperi (1881-1954, fondateur de la Démocratie Chrétienne et considéré comme l'un des Pères de l'Europe ave Konrad Adenauer et Robert Schuman) et une du cardinal Robert Sarah. On ne peut manquer de remarquer que le meeting de Matteo Salvini à Milan, le dernier de sa campagne électorale, s'adresse avant tout à un public d'électeurs catholiques. C'est peut-être aussi l'influence du ministre de la Famille, Lorenzo Fontana, qui était sur scène juste à côté du "capitaine" Salvini, mais cette fois aussi, la rencontre s'est terminé avec le chapelet à la main.
Plus d'un prêtre ou d'un évêque, pour ce chapelet montré en public, fera la moue et ceux qui parlent de l'instrumentalisation de la religion s'échauffent déjà. Parce qu'un phénomène étrange se produit: plus la hiérarchie de l'Église italienne prend ses distances de Salvini et de sa nouvelle Ligue (*), plus le "capitaine" parle en catholique aux catholiques. Jamais il n'y avait eu autant de présence de la tradition chrétienne dans les meetings précédents, pas même ceux de 2018. Chesterton a tout de suite été mis à contribution (et a gagné les premiers applaudissements) comme indication d'une méthode: «Un vrai soldat ne se bat pas parce qu'il a devant lui quelque chose qu'il déteste. Il se bat parce qu'il a derrière lui quelque chose qu'il aime».
La première tâche de Salvini est de désamorcer la peur d'un mouvement extrémiste. «Nous ne sommes pas des extrémistes, il n'y a pas de fascistes sur cette place», dit-il tout de suite, notant que la police et les forces de l'ordre sont présentes mais désarmées car la place est composée de braves gens. «Les extrémistes sont ceux qui occupent Bruxelles», commence-t-il, d'emblée polémique.
Jean-Paul II est désigné comme inspirateur d'une Europe des peuples, frères différents, unis dans la diversité. Benoît XVI comme défenseur des racines chrétiennes de l'Europe, inécouté des élites laïques de Bruxelles (et parce qu'il s'opposait à la Turquie en Europe). Le cardinal Sarah, «qui connaît bien le sujet de l'immigration», est également cité parce qu'il défend l'idée que chacun a le droit de se développer dans son propre pays et dans sa propre culture. De Gasperi, avec De Gaulle et Margaret Thatcher (trois traditions très différentes, mais il est significatif que pour l'Italie le père de la Démocratie Chrétienne apparaisse) sont pris comme modèle pour leurs idées de l'Europe des patries. Il cite le pape François... et de la place montent aussitôt des sifflets. Mais Salvini est trop habile (et n'a pas le même esprit rebelle que son prédécesseur Bossi) pour glisser dans la provocation: il le cite pour donner raison au Pape, quand il a sonné l'alarme sur les morts en Méditerranée, mais aussi pour le rassurer que la politique des ports fermés les avait considérablement réduites (chiffres en main, on peut le prouver).
Que signifie cet appel constant au catholicisme? Juste au moment où la hiérarchie de l'Église italienne est de plus en plus explicitement hostile à la Ligue de Salvini? A l'évidence, certains ont estimé que la base catholique est plus proche des idées de la nouvelle Ligue souverainiste que des indications des prêtres dans les paroisses. «Dites à votre prêtre demain à la messe qu'il y a moins de morts en Méditerranée et que nous sauvons des vies», tel est le message de Salvini adressé aux fidèles qui aujourd'hui seront à la messe pour entendre des homélies sur le drame de l'immigration et contre l'égoïsme de la Ligue. C'est un défi audacieux, objectivement. Ce n'est qu'après le vote qu'il sera possible de comprendre si ce pari a été un succès.
Il est à noter, pour ceux qui suivent la Ligue depuis trente ans maintenant, que le vieux leghisme nordiste et bossien [la Ligue du Nord a été fondée par Umberto Bossi] a presque complètement disparu. Pas un mot sur l'autonomie régionale. Pas un seul slogan sur la sécession. Il y avait, sur la place, un seul drapeau de la Padanie, un seul drapeau catalan (et les alliés espagnols de Vox n'auront pas aimé), un seul drapeau écossais. Tout aussi peu nombreux, les drapeaux régionaux italiens. En revanche, les drapeaux français, danois et slovaque étaient nombreux, représentés sur le podium par les dirigeants souverainistes de ces pays. (...) Il y avait Marine Le Pen, qui a harangué la foule d'abord en français puis en italien, avec un discours tout anticapitaliste et très identitaire. Elle a été la plus applaudie dans l'absolu, démontrant que l'esprit de Bossi (qui ne citait Le Pen que pour condamner le nationalisme) a vraiment disparu. Il y avait aussi Geert Wilders, un autre des plus appréciés, le politicien néerlandais «maudit» par les médias du monde entier pour sa campagne anti-islamiste. Et il n'a cessé de répéter ses concepts: non à l'islamisation, «stop islam».
Même ces campagnes identitaires, que Salvini promeut au niveau européen avec ses alliés souverainistes, sont de toute façon déjà secondaires par rapport au message central: la Ligue essaie de s'accréditer comme une force majoritaire catholique. Voudra-t-elle devenir la nouvelle Démocratie Chrétienne? En ces temps étranges, en l'absence d'un parti démocrate-chrétien, populaire, conservateur, qui couvre l'espace de la droite modérée, c'est possible.
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NDT:
(*) Selon Wikipedia:
La Ligue du Nord (nom complet en italien: Lega Nord per l'indipendenza della Padania, le plus souvent abrégé en Lega Nord, LN;), ou désormais simplement Ligue (Lega) à partir de 2018, est un parti politique italien initialement régionaliste et fédéraliste, souvent décrit comme populiste, d'extrême droite, eurosceptique, voire xénophobe. Fondée par Umberto Bossi, la Ligue est dirigée depuis 2013 par Matteo Salvini.
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