Bouteille à la mer...

lancée le 28 décembre dernier. Un grand merci au lecteur qui a élucidé l'énigme de la citation de Joseph Ratzinger sur le sens du dialogue (9/1/2018)

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benoit-et-moi.fr/2017/benot-xvi/une-citation-de-benoit-xvi-ou-joseph-ratzinger

Cette citation est un extrait de la conférence prononcée par Joseph Ratzinger à Munich le 27 juillet 1982, pour les 25 ans de l’académie catholique de Bavière. Elle est intitulée : « Interprétation, contemplation, action ». Vous pouvez en trouver le texte complet dans : "Joseph RATZINGER, Discours fondateurs", Fayard, 2008, pages 191 à 215. L’extrait en question se trouve à la page 196 (dans une traduction légèrement différente).
L’ensemble de la conférence est d’un très grand intérêt, particulièrement les deux points qui suivent celui sur le dialogue, et qui concernent la liberté et la vérité dans leur lien indissoluble, un thème cher à Benoît XVI, et qui est traité d’une manière particulièrement brillante dans cette conférence.

(Fr. C.M)


Il y a une version en anglais de ce texte ici: https://goo.gl/RvquR9

Ce qui me permet de reproduire en entier la citation (qui était précédemment tronquée):

Qu'est‑ce exactement que le dialogue ? Il n'y a pas encore dialogue du seul fait que l'on parle. Le simple bavardage signifie le déclin et la faillite du dialogue. Un dialogue ne se produit que là où n'y a pas seulement parole, mais aussi écoute, et là où dans l'écoute s'accomplit la rencontre, dans la rencontre la relation et dans la relation la compréhension en tant qu'approfondissement et métamorphose de l'être.
Essayons de comprendre un à un les différents éléments du processus que nous avons énoncé.
Il y a d'abord l'écoute. C'est un processus d'ouverture vers autre chose et vers autrui. Essayons de nous représenter de quel art il s'agit quand quelqu'un sait écouter. Ce n'est pas de l'habileté comme le fait de se servir d'une machine; c'est un savoir-être, dans lequel la personne tout entière est impliquée.
Écouter signifie reconnaître et respecter autrui, le laisser entrer dans l'espace de son propre moi, être prêt à assimiler sa parole et par là son être à l'intérieur du sien propre et de même, inversement, s'assimiler à lui : après avoir écoute, je suis un autre, mon être propre s'est enrichi et approfondi parce qu'il fusionne avec l'être de l'autre et aussi avec l'être du monde.
Cela suppose que la parole de l'autre dans le dialogue ne concerne pas seulement un quelconque élément du domaine du connaissable et de l'habileté. Quand nous parlons du dialogue au sens propre, nous voulons parler d'un mot qui exprime une partie de l'être lui-même, la personne elle même, de sorte que non seulement la masse des connaissances et des capacités se multiplie, mais que le savoir-être de l'homme est purifié et approfondi.
Ainsi apparaît une nouvelle dimension du dialogue, de l'écoute et de la parole, à laquelle saint Augustin accordait dans ses premiers écrits une valeur particulière ; l'histoire de sa conversion nous est accessible par des documents contenant ses dialogues avec des amis qui racontent que la petite Académie de Cassiciacum s'est dirigée à tâtons jusqu'au moment où enfin un nouveau mot que Platon n'avait pas connu pouvait tomber parmi eux et constituer un tournant dans leur vie. En analysant rétrospectivement ces dialogues, saint Augustin arriva à ce résultat qu'une communauté d'amis pouvait mutuellement s'écouter et se comprendre parce qu'ils écoutaient tous ensemble le maître intérieur, la vérité. Les hommes peuvent se comprendre les uns les autres parce qu'ils ne sont pas comme des îlots de l'être complètement séparés mais qu'ils communient dans la même vérité. Ils se rencontrent d'autant plus qu'ils se rapprochent de ce qui les unit véritablement, la vérité. Un dialogue sans l'écoute intérieure de ce fondement commun resterait un dialogue de sourds.
Nous nous heurtons ici à un état de fait qui est extrêmement important pour le débat d'aujourd'hui et qui montre en même temps clairement quels dangers court le dialogue : les hommes sont capables d'un consensus parce que la vérité commune existe ; mais le consensus ne doit pas faire figure d'ersatz de vérité.

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