Que reste-t-il de Soixante-huit?
Il y a un demi-siècle, Joseph Ratzinger avait déjà tout compris et tout prévu (26/12/2018)
>>> A propos des "prophéties de Ratzinger", voir aussi sur ce site:
¤ La prophétie oubliée de Ratzinger (2014)
¤ Les prophéties rationelles de J. Ratzinger (2014, Antonio Mastino)
¤ La prophétie de Joseph Ratzinger (2010, JL Rstan)
A Noël 1969, Ratzinger avait déjà tout compris
Italia Oggi
Gianfranco Morra
22 décembre 2018
Ma traduction
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C'était à Noël en 1969. Joseph Ratzinger, alors jeune professeur d'université, enseignait à Ratisbonne. A l'occasion de la fête, il fit cinq émissions sur Noël et l'Eglise à la radio bavaroise. Qui furent publiées en plusieurs langues, y compris en italien: Fede e futuro (1971), un livre depuis longtemps épuisé [en français: Foi et avenir).
Depuis peu, la contestation avait éclaté en Allemagne et lui en synthétisa et anticipa les conséquences néfastes. Enthousiasmé par Vatican II, il avait collaboré avec la revue Concilium des évêques progressistes (je me souviens d'une lettre de lui, me demandant de collaborer, ce qu'évidemment, je n'avais pas envie de faire).
Très vite, il comprit que l'église de Küng et Schillebeeckx courait de graves péils et, avec d'autres théologiens modérés, il lui opposa la revue Communio. Dans les cinq émissions de Noël diffusées sur la Radio Bavaroise, il donnait un jugement prophétique sur la nouvelle situation et les difficultés de l'Eglise.
Ratzinger comprend que le tournant du XXe siècle est différent et beaucoup plus radical que tous les autres tournants historiques auxquels l'Eglise a survécu et par réaction, a même changé en mieux: la Renaissance, le siècle des Lumières, la Révolution française.
La contestation, qui, dans les années soixante, a touché toutes les nations occidentales et chrétiennes, était différente car elle a effacé, malheureusement sans savoir les remplacer, les valeurs christiano-libérales de l'Europe. Le libéralisme, qui avait son fondement dans la tradition chrétienne (dignité de l'homme, droits naturels), était devenu relativisme et nihilisme.
Le mariage et la famille furent relativisés: «La sexualité et la procréation ont été séparées du mariage; toutes les formes de sexualité sont équivalentes et la sexualité a été banalisée; l'homosexualité est non seulement licite, mais elle devient un aspect de la libération de l'homme». La vraie définition de la culture actuelle, sortie de la contestation, est le nihilisme. Comme Jacques Prévert l'a compris avec la célèbre invocation: «Notre Père, qui êtes aux cieux, restez-y!».
Malheureusement, la culture catholique ne sut pas réagir de façon adéquate, elle pensait peut-être qu'il s'agissait d'épisodes prévisoires qui allaient bientôt être oubliés. Au contraire, Ratzinger prédit avec réalisme ce qui allait arriver: «Le futur l'Église ne résidera pas en ceux qui ne font que s'adapter au moment présent, en choisissant le chemin le plus simple, éludant la passion de la foi, la déclarant fausse et obsolète, tyrannique et légaliste».
La dernière transmission, le jour de Noël, relie une prévision de fort pessimisme à une espérance surnaturelle: «Nous sommes dans une crise profonde de l'Église. Qui va devenir de plus en plus petite, et devra tout recommencer depuis le début. Beaucoup des édifices érigés par la foi du passé lui seront inutiles et le nombre de ses fidèles diminuera. Elle deviendra un ensemble de petits groupes. Malheureusement, les hommes vivront dans un monde totalement programmé dans une solitude indicible».
Une foi perdu le sens de Dieu, ils ressentiront l'horreur de leur pauvreté. Des temps très difficiles se préparent pour l'Église, sa vraie crise ne fait que commencer. Elle perdra ses privilèges sociaux, ce qui n'est pas un mal, mais en même temps, elle n'apparaîtra plus à beaucoup comme la maison de l'homme où trouver une espérance pour la vie et après la mort. Cependant, l'Église aura encore son avenir qui, comme toujours, sera remodelé par les saints».
Dans notre pays aussi, le cinquantième anniversaire de la révolution de 1968 a été peu et superficiellement commémoré. Ceux qui la voient comme un bond en avant pour l'homme et ses droits la considèrent comme un événement graduel et bénéfique, qui n'a pas besoin d'être commémoré tant il a désormais pénétré tout: famille, école, culture, médias, conscience populaire. Ils savent qu'une grande partie de la société d'aujourd'hui est son enfant et que les nouveautés de notre temps sont nées de la destruction de la tradition humanisto-chrétienne par les contestataires.
On est toutefois surpris que la culture catholique, ou plutôt ces «restes» qui en subsistent encore, ait observé un silence presque total à l'égard du cinquantième anniversaire de la plus grande révolution jamais connue dans notre pays. Certainement favorisé par le climat de buonisme et d'ouverture inconditionnelle introduit et imposé par le Pape Bergoglio. Seuls quelques catholiques anticonformistes (comme Veneziani, De Mattei et Socci) ont souligné les désastres de ces années et de celles qui ont suivi. Que dans ses émissions de Noël de 1969, Ratzinger, pas encore Pape, avait parfaitement deviné: Soixante-huit avaitété une «césure historique» et avait produit «la crise de la culture de l'Occident».
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