J’ai traduit il y a quelques jours, non sans quelque perplexité, l’article de The Wanderer qui voyait dans François la mise à nue « providentielle » des erreurs de Vatican II (François est un Pape providentiel). Erreurs qui impliquent selon lui TOUS les papes post-conciliaires, donc aussi évidemment Benoît XVI. Je ne veux pas entrer dans le fond d’une querelle théologique qui me dépasse (mais qui doit évidemment aller au-delà du fait humain, c’est–à-dire de l’affection ou de l’antipathie qu’on peut ressentir pour un homme, fût-il Pape). L’auteur du blog The Wanderer rejoint, au moins ici, les rangs de ces « catholiques traditionalistes contre Benoît XVI » dont j’ai déjà parlé dans ces pages (*). Je pense personnellement qu’ils se trompent de cible, car il n’y a aucune comparaison possible entre Benoît XVI et François, et je regrette qu’ils aillent jusqu’à se diviser au nom du premier (dans son dernier article, Andrea Cionci met en cause des figures aussi respectables que Mgr Vigano, Riccardo Cascioli, Mgr Schneider… et même AM Valli, allant jusqu’à parler de « non-assistance à pape », au motif qu’ils refusent d’endosser sa thèse du « pape empêché », ce qu’on peut comprendre), lui qui a essayé d’être toute sa vie, et surtout durant son pontificat, un facteur d’unité « afin que la tunique sans couture du Christ ne se déchire pas davantage » (discours aux évêques français à Lourdes, septembre 2008). C’est au Seigneur, et pas à nous, de juger si ses actes étaient bons, ou pas. Mais les traditionalistes ne devraient pas oublier tout ce qu’ils lui doivent: sinon, c’est plus que de l’ingratitude, c’est de l’abandon.

(*) On trouvera ci-dessous l’introduction d’AM Valli (que pour une fois je ne partage VRAIMENT pas) à un article du site The Remnant, d’une teneur identique à celui du Wanderer (ce qui conforte mes propos sur les tradis anti-Benoît), et SURTOUT une réponse argumentée sous la forme d’un commentaire que j’avais publié en 2016, puis repris en 2019 à un article du blog Campari&DeMaistre, qui dit bien mieux que moi ce que je pense profondément.

Analyse / Voici pourquoi François est ce que nous méritons pour avoir toléré les erreurs de Vatican II

Aldo Maria Valli
25 novembre 2022
www.aldomariavalli.it/2022/11/25/analisi-ecco-perche-francesco-e-cio-che-ci-meritiamo-per-aver-tollerato-gli-errori-del-vaticano-ii/

Je constate que, face à la formidable crise que traverse l’Eglise catholique, de nombreux fidèles, y compris ceux qui sont sincèrement attachés à la Tradition et désireux de la sauvegarder, se réfugient dans Benoît XVI et son enseignement comme s’il pouvait être une bouée de sauvetage à laquelle s’accrocher. D’où aussi les nombreux messages que je reçois pour reconnaître que François n’est pas pape et pour déclarer que le pape régnant est toujours Benoît XVI. Mais ceci – permettez-moi de le dire en toute franchise – est une erreur qui ne fait qu’aggraver la crise et approfondir l’hérésie. En fait, les déviations si clairement présentes chez François étaient déjà contenues, bien que de manière plus voilée et par l’utilisation d’expressions apparemment conformes à la doctrine catholique correcte, chez Benoît XVI. Et tout cela parce que Benoît XVI est aussi un fils du Concile Vatican II. Ceci est bien expliqué par l’article de The Remnant que je propose ici en traduction italienne. Le titre original de l’article est « Le ‘Pape François’ est ce que nous méritons pour avoir toléré les erreurs de Vatican II ».

D’une manière paradoxale, nous devrions donc être reconnaissants à Bergoglio d’avoir porté à l’extrême et montré sans voile les erreurs présentes aussi chez Benoît XVI, mais sous une forme plus cachée. Ce n’est pas un hasard, d’ailleurs, si de nombreux fidèles ont ouvert les yeux sur les déviations, les abus et les hérésies de la matrice conciliaire précisément pendant le pontificat de Bergoglio.

Je suis bien conscient qu’en disant ce que je dis, je vais m’attirer encore des reproches et des insultes. Patience. « Le Seigneur est ma lumière et mon salut. De qui aurais-je peur ? Le Seigneur est la défense de ma vie : que pourrais-je redouter? » (Psaume 27).


GNOCCHI: QUE D’AMERTUME CONTRE BENOÎT XVI

Francesco Filipazzi
Campari&DeMaistre
16 mars 2016

Récemment , je suis tombé sur une interview d’Alessandro Gnocchi intitulée «Alessandro Gnocchi en roue libre contre François et Benoît XVI».
.

Dans l’interview, à côté de critiques contre Bergoglio, je suis resté sidéré en lisant une réponse venimeuse à propos du pape émérite. Selon Gnocchi «En réalité, Ratzinger et Bergoglio sont complémentaires, les deux faces d’une même médaille, la même soupe dans des plats différents. Ratzinger a été lui aussi assez incertain et peut-être fumeux, il n’a pas eu le courage d’accomplir le pas décisif, le tournant. Bref, lui aussi est un malentendu vivant, et il a sa responsabilité. Je ne vois pas une rupture nette entre les deux, Ratzinger n’a pas inversé le cap, et il a été une sorte de poisson dans un tonneau» (fare il pesce in barile: faire comme si de rien n’était).

Cette phrase, prononcée par Gnocchi, me paraît stupéfiante et me conduit à une question: pourquoi quelqu’un qui doit beaucoup de sa notoriété éditoriale au public ratzingérien, décide-t-il aujourd’hui de se détacher définitivement de ce public?
Quand il s’agissait de vendre des livres intitulés « Viva il Papa, perché lo attaccano, perché difenderlo » (Vive le pape, pourquoi ils l’attaquent et pourquoi le défendre – 2010), avec plein de photos de l’Allemand, de faire des conférences et d’acquérir une visibilité personnelle, Benoît XVI était bien bon, mais maintenant, il est un poisson dans un tonneau.
.

Il est absurde à mon avis, d’oublier – de bonne ou de mauvaise foi, je ne sais pas encore – ce que Ratzinger a fait pendant son pontificat, durant lequel il a été en effet insulté, attaqué et vilipendé de toutes les façons possibles, justement à cause de ce qu’il faisait.
Qui peut ignorer le fait que toute une génération de personnes nées entre les années 80 et 90 a trouvé une puissante force théologique pour jeter les bases de leur foi grâce à lui?
Pourquoi oublier qu’avec Summorum Pontificum, il a recréé un monde qui avait été perdu et qui à ce jour mène le bon combat depuis les autels du monde entier?
Pourquoi avancer la critique stérile qu’il «n’a rien fait pour inverser le cap»? Ce n’est évidemment que dans le monde des contes de fées qu’on peut penser que l’effondrement de l’Eglise en cours depuis le début du XXe siècle (eh oui messieurs! quelle surprise, le concile, ce sont les pré-conciliaires qui l’ont fait), pourrait être résolu simplement en claquant des doigts. En réalité, ils l’ont fait démissionner pour avoir tenté d’inverser le cap.

Heureusement j’ai trouvé un grand réconfort à la lecture d’un article de la Nouva Bussola (Benoît XVI, docteur de l’Eglise pour notre temps), sur la reprise de la théologie de Joseph Ratzinger, sur lequel je vous invite tous à méditer.
.

Je dis ceci à Alessandro Gnocchi: ce n’est peut-être pas le moment, sous le coup de la colère, à cause d’une situation difficile que nous vivons, de jeter le bébé avec l’eau du bain.
Reste l’amertume de lire certaines prises de position de la part d’une personne à laquelle j’ai toujours fait référence, et qui aujourd’hui, pour des motifs que je voudrais comprendre, a décidé de rendre vain le travail de plusieurs années.

Share This