(Giuseppe Nardi) Apparemment, c’est Giorgia Meloni (elle -même très « amie » avec Zelenski) qui serait intervenue personnellement pour que la rencontre du Pape avec le président ukrainien – non prévue – ait lieu. Bref, le pape s’est peut-être laissé manœuvrer. Le Vatican est apparu à la traîne, et s’est laissé « voler » le récit médiatique, au moins en Italie, où Zelenski s’est vu offrir une tribune en prime time sur la chaîne publique RAI 1, à « l’Autel de la Patrie » – rien de moins que l’équivalent italien de notre Arc de Triomphe. Un choix symbolique, pour préparer l’opinion publique à une escalade du conflit?


Zelenski samedi soir dans une émission spéciale de « Porta a Porta », qui – martialement – s’est déroulée dans une salle de « l’autel de la patrie » à Rome.

Zelenski, le pape François et la politique d’information

Giuseppe Nardi
katholisches.info
15 mai 2023

(Rome) Ce n’est qu’avec la publication du bulletin quotidien de samedi dernier que le Saint-Siège a confirmé la visite du président ukrainien Volodymyr Zelenski. Le pape François ne l’a pas reçu en audience privée, comme cela avait été spéculé auparavant, mais en tant que chef d’État officiel. Un aperçu de la situation.

Selon les informations disponibles jusqu’à présent, la visite du chef d’Etat ukrainien a été « imposée » au Vatican. Zelenski a rendu visite le 13 mai aux dirigeants italiens, qui sont à leur tour intervenus auprès du Saint-Siège pour qu’il soit également reçu au Vatican. Giorgia Meloni (Fratelli d’Italia) s’est rendue spécialement vendredi à Santa Marta pour s’entretenir en audience privée avec le pape François.

Dans le bulletin du jour, Zelenski figure en dernière position, car son audience était la seule à avoir lieu l’après-midi. Le président ukrainien s’est rendu à Rome avec un important cortège. Son cortège comprenait 30 véhicules. Le président américain Joe Biden s’était contenté de 18 véhicules lors de sa visite à Rome en octobre 2021.

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La croix pectorale cachée

Zelenski est également apparu en tenue militaire lors de la visite du pape François, accompagné d’hommes dans une tenue similaire, ce qui a suscité un certain mécontentement sur les réseaux sociaux en Italie. On parle d’un manque de respect et d’une mise en scène exagérée de soi-même.
Le pape François, quant à lui, avait placé sa croix pectorale derrière a ceinture pendant la rencontre. Parce que Zelenski est juif ? Une telle dissimulation de la croix pectorale a été utilisée par François dans le passé comme geste délibéré lors de rencontres avec des membres d’autres religions (juifs et musulmans).

À 15h54, le Bureau de presse du Saint-Siège a publié le communiqué suivant :

« La rencontre entre le pape et le président a duré environ 40 minutes.
Les sujets de l’entretien ont porté sur la situation humanitaire et politique en Ukraine, causée par la guerre qui se poursuit.
Le pape a assuré qu’il priait sans cesse pour la paix depuis février dernier, comme en témoignent ses nombreux appels publics et son invocation constante du Seigneur.
Tous deux se sont accordés sur la nécessité de poursuivre les efforts humanitaires pour venir en aide à la population. Le pape a notamment souligné l’urgente nécessité de ‘gestes d’humanité’ envers les personnes les plus vulnérables, les victimes innocentes du conflit ».

À 16h17, Zelenski Zelenski a écrit le message suivant sur son canal Telegram :

« Rencontre avec le pape François.
Je lui suis reconnaissant de l’attention personnelle qu’il a portée à la tragédie de millions d’Ukrainiens. Il a également souligné les dizaines de milliers d’enfants déportés. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour les ramener chez eux.
Il a en outre appelé à la condamnation des crimes russes en Ukraine. Car il ne peut y avoir d’égalité entre la victime et l’agresseur.
Il a également parlé de notre formule de paix comme du seul algorithme efficace pour parvenir à une paix juste. Il a proposé de participer à sa mise en œuvre ».

Par « notre formule de paix », on entend un plan en dix points que les dirigeants ukrainiens ont déclaré être la condition sine qua non des discussions avec la Russie, laissant ainsi entendre qu’ils ne souhaitaient pas de pourparlers de paix.

Quelques minutes plus tard, à 16h35, un deuxième communiqué du bureau de presse du Vatican a suivi. Il se réfèrait principalement à la rencontre qui a suivi entre le président ukrainien et l’archevêque Paul Richard Gallagher, secrétaire pour les relations avec les États à la Secrétairerie d’État du Vatican, raison pour laquelle Mgr Gallagher est plus connu sous le nom de « ministre des Affaires étrangères » du Saint-Siège. En fait, une rencontre aurait dû avoir lieu entre Zelenski et le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État. Cependant, ce dernier se trouvait samedi à Fatima, ce qui rendait impossible un changement de dernière minute Cette deuxième déclaration du Vatican disait :

« Aujourd’hui, samedi 13 mai 2023, le Saint-Père François a reçu en audience S.E. Monsieur Volodymyr Zelenskyy [sic], président de l’Ukraine, qui a ensuite rencontré Son Excellence Monseigneur Paul Richard Gallagher, secrétaire du Secrétariat d’État pour les relations avec les États et les organisations internationales.

Les entretiens cordiaux avec S.E. Mgr Gallagher ont principalement porté sur la guerre actuelle en Ukraine et les urgences, notamment humanitaires, qui y sont liées, ainsi que sur la nécessité de poursuivre les efforts en faveur de la paix.

A cette occasion, certains sujets bilatéraux ont également été abordés, notamment ceux liés à la vie de l’Eglise catholique en Ukraine ».

À 19h15, Zelenski a participé à une édition spéciale de l’émission télévisée « Porta a Porta » sur la chaîne publique italienne RAI 1. Cette émission s’est déroulée, de manière tout à fait exceptionnelle, à l’Autel de la Patrie, le lieu de culte central de l’État italien sur la Piazza Venezia, près du Capitole.

L’Autel de la Patrie a été érigé entre 1878 et 1927 pour commémorer l’unification italienne réalisée en 1870, et c’est le mémorial des morts italiens avec une « flamme éternelle » et une garde d’honneur des militaires [donc, symboliquement, l’équivalent de notre Arc de Triomphe, ndt].

Les médias mettent en scène la perception pour les masses, et cette émission a été le principal relais de la visite de Zelenski en Italie. Une nouvelle étape pour préparer l’UE à la guerre ? Il s’agit de livraisons d’armes, de formation militaire et de versements d’argent. Des mesures qui suscitent un rejet considérable au sein de la population italienne en raison de la crise de la vie chère et par crainte d’être entraîné dans la guerre. Interrogé dans cette émission sur l’audience avec François, Zelenski a déclaré :

« Avec tout le respect que je dois à Sa Sainteté, nous n’avons pas besoin de médiateurs, nous avons besoin d’une paix juste. Nous invitons le pape, comme d’autres dirigeants, à s’engager pour une paix juste, mais nous devons d’abord faire tout le reste. On ne peut pas faire de médiation avec Poutine, aucun pays au monde ne peut le faire. J’ai invité le pape François à se rendre en Ukraine pour soutenir dans la prière tous les Ukrainiens qui souffrent de la terreur russe et qui luttent contre le mal qui est arrivé sur le sol ukrainien ».

Cette deuxième présentation laisse transparaître le compte rendu unilatéral de la rencontre dans la déclaration de Zelenski sur Telegram. Dans cette dernière, le président ukrainien reproduisait unilatéralement la position de Kiev, sans tenir compte de son interlocuteur, bref, une tentative évidente d’appropriation. Le Saint-Siège a manifestement voulu empêcher cela de manière préventive en faisant ses propres déclarations. En d’autres occasions, le Vatican y avait renoncé [comme par exemple lors de ] la rencontre avec le président américain Joe Biden le 29 octobre 2021.

Le fait que le Saint-Siège renonce à faire ses propres déclarations a laissé dans le passé un monopole d’information et d’interprétation aux visiteurs du pape. L’enchaînement des prises de position montre ce que cela aurait signifié samedi.

La Russie ne s’est pas encore exprimée sur la rencontre.

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