La boîte de Pandore, c’est l’image qui sert de fil conducteur à l’ouvrage (Processo sinodale: un Vaso di Pandora) préfacé par le cardinal Burke, que le Pape a rejeté avec mépris lors de sa conférence de presse en vol de retour de Mongolie. Paolo Gulisano rappelle opportunément la légende mythologique, et valide l’image , au moins en partie. Mais il note que les maux contenus dans le « nouveau » vase avaient déjà été abondamment répandus avant ce Synode. Et il lui oppose (et lui préfère) le concept sociologique inventé par un certain Joseph P. Overton (1960-2003), lequel a formulé un modèle permettant de modifier la façon dont l’opinion publique perçoit un problème donné – la fameuse « fenêtre d’Overton », baptisée ainsi après sa mort.

Le Synode déterminera le modus vivendi et operandi de l’Église de demain. Il scellera le pontificat de Jorge Mario Bergoglio, qui aura ainsi rempli sa tâche: celle, comme il l’a toujours énoncé, d’ « initier des processus ».

je ne crois pas que le Synode sera une boîte de Pandore, parce qu’en réalité, les maux et les erreurs qu’il pourrait contenir ont déjà été abondamment répandus et existent depuis longtemps.
À mon avis, le Synode sera plutôt une étape fondamentale et cruciale de la fenêtre d’Overton qui, après s’être ouverte toute grande pour la société civile, s’est également ouverte pour l’Église.

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Le prochain synode et la fenêtre d’Overton dans l’Église.

Comment rendre catholique ce qui ne peut l’être ?

Paolo Gulisano
www.aldomariavalli.it
5 septembre 2023

Cela fait un certain temps que l’on parle de la crise de l’Église, avec un malaise croissant chez ceux qui sont les plus sensibles au problème, parce qu’ils le ressentent dans toute sa dramaturgie. En outre, puisque l’on parle désormais avec de plus en plus d’insistance de schisme, les catholiques fidèles à la Tradition éprouvent non seulement de l’amertume face au spectacle offert par une grande partie de la hiérarchie, des théologiens et de ceux qui « forment l’opinion » dans le monde ecclésial, mais aussi une grande inquiétude pour ceux qui pourraient vouloir s’éloigner de l’Église Une, Sainte, Catholique et Apostolique.

De ce point de vue, le prochain Synode sur la synodalité, qui impliquera l’Église de l’automne 2023 à celui 2024, suscite une inquiétude particulière. Une année de travail qui produira des documents, et bien sûr un grand battage médiatique, et qui pourrait représenter une véritable révolution au sein de l’Église catholique. Le Synode déterminera le modus vivendi et operandi de l’Église de demain. Il scellera le pontificat de Jorge Mario Bergoglio, qui aura ainsi rempli sa tâche: celle, comme il l’a toujours énoncé, d’ « initier des processus ».

Le concept de processus est le même que celui qui a inspiré le titre d’un livre extrêmement précieux : Processus synodal : une boîte de Pandore, de José Antonio Ureta et Julio Loredo, auteurs de plusieurs études et publications sur l’Église contemporaine.

L’ouvrage propose une analyse approfondie du processus préparatoire du Synode, notamment à travers l’examen des documents de ce qui fut sa répétition générale : le processus synodal de l’Église d’Allemagne. Les thèmes déjà débattus au niveau teuton pourraient être les thèmes dominants du synode de toute l’Église : le rôle des soi-disant « minorités marginalisées », l’ « inclusivité », la « démocratisation » de l’Église, la distorsion du concept de famille, l’abrogation de facto du sixième commandement, et ainsi de suite. À la fin du Synode, nous pourrions être confrontés à une Église radicalement transformée.

En conclusion du livre, les auteurs se demandent si nous assisterons à un Synode truqué, et ils invitent les catholiques, avec l’aide de Dieu et de la Sainte Vierge, et comme nous le rappelle le cardinal Burke dans la belle préface, à l’engagement pour empêcher un plan destiné à défigurer la constitution divine de la Sainte Mère l’Église.

Le sous-titre est évocateur : « La boîte de Pandore ». Cette référence à la mythologie classique est juste. L’histoire de la boîte de Pandore nous ramène au mythe de Prométhée, l’une des figures les plus aimées des scientifiques et de l’idéologie des Lumières, le titan qui donne le feu aux hommes en le dérobant à Zeus. Le roi des dieux décide de se venger en donnant aux hommes la première femme mortelle, Pandore. Vengeance subtile, car Pandore, qu’Aphrodite a rendue très belle, est destinée à conduire l’humanité à la perdition.

Selon l’histoire transmise par le poète Hésiode, le fameux vase est un cadeau offert à Pandore par Zeus, qui lui conseille de ne pas l’ouvrir. Ce vase, censé contenir du grain, était au contraire rempli des maux qui affligent l’humanité.

Mais Pandore, qui avait reçu du dieu Hermès le don de la curiosité, ne tarda pas à le découvrir, libérant ainsi tous les maux du monde : les mauvais esprits de la maladie, de la folie et de divers vices. Au fond du vase ne restait que l’espoir (Elpis), qui ne partit pas à temps avant que le vase ne soit refermé. En ouvrant la boîte, Pandore a ainsi réalisé le châtiment de Zeus : condamner l’humanité à une vie de souffrance.

Auparavant, l’humanité vivait à l’abri du mal, du labeur et des soucis de toute nature et les hommes étaient, comme les dieux, immortels. Après l’ouverture de la boîte, le monde est devenu un lieu désertique et inhospitalier. Le vieux mythe nous rappelle l’idée de la chute, qui trouve son origine dans un péché de désobéissance, exactement comme le raconte la Genèse.

À mon avis, cependant, et avec toute l’estime et la reconnaissance que je dois aux auteurs de ce livre, je ne crois pas que le Synode sera une boîte de Pandore, parce qu’en réalité, les maux et les erreurs qu’il pourrait contenir ont déjà été abondamment répandus et existent depuis longtemps.

À mon avis, le Synode sera plutôt une étape fondamentale et cruciale de la fenêtre d’Overton qui, après s’être grande ouverte pour la société civile, s’est également ouverte pour l’Église.

La fenêtre d’Overton, comme nous le savons, est une approche qui permet d’identifier les idées qui définissent le spectre d’acceptabilité des politiques gouvernementales. Les hommes politiques ne peuvent agir que dans les limites de l’acceptable. Déplacer la fenêtre implique que les défenseurs des politiques situées en dehors de la fenêtre persuadent le public de les considérer comme acceptables et même souhaitables.

Cela a été le cas pour de nombreux principes moraux et civils, et le pseudo-état d’urgence pandémique a consacré un nouveau paradigme pour les libertés individuelles.

De même, un processus de métamorphose de l’Église catholique, visant à modifier son credo, sa doctrine, sa liturgie et sa structure même, est en cours depuis un certain temps. Le Synode, géré par une élite restreinte présélectionnée, dans l’indifférence quasi générale du peuple catholique, habitué à accepter tout changement comme bon par définition, convaincra alors tout le monde de considérer comme normaux et acceptables (comme ils le sont déjà pour l’opinion publique) des choix et des politiques ecclésiaux qui devraient normalement être considérés comme hétérodoxes et inacceptables. Ce sera l’effondrement mental dont parlait Chesterton il y a près d’un siècle. Face à ce scénario, la question désespérée qui se pose, et qui apparaît également dans ce livre, est la suivante : que faire ?

Les nouveaux maîtres de l’Église catholique seraient très heureux que les « indietristes », nom que l’on donne habituellement à ceux qui s’opposent au processus révolutionnaire, partent et réalisent le schisme. Il est probable que le sens des responsabilités des fidèles les plus attachés à la Tradition les conduira à une attitude d’obéissance respectueuse et de tolérance, jusqu’à une sorte de martyre non sanglant, mais très douloureux, en restant dans la néo-Église.

Mais les choses peuvent aussi se passer différemment : tout dépendra de l’ouverture de la fenêtre d’Overton.

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