Dans la traditionnelle conférence de presse en altitude de retour de Mongolie, le Pape, pour une fois, n’a semble-t-il pas proféré d’insa… euh, de propos polémiques. Un peu comme s’il s’était auto-censuré. Bref, on n’apprend pas grand chose de nouveau. Le nom « Jean XXIV », censé être celui de son successeur, jeté en pâture aux journalistes pour leur donner de quoi alimenter leurs papiers, a, comme prévu « fait le buzz », mais c’était juste une boutade sans signification. Plus intéressant, ce qu’il a dit sur les voix critiques du Synode (en particulier celles s’exprimant dans le livre « Processo sinodale: un Vaso di Pandora« , cf. La boîte de Pandore du Synode), et sa critique à peine voilée au cardinal Burke, accusé d’ « idéologie »; et surtout sur l’organisation du Synode, et l’information qui sera étroitement contrôlée.

Les positions exprimées dans le livre Processo sinodale: un Vaso di Pandora, et qui existent dans l’Église n’ont pas trouvé leur place dans l’Instrumentum Laboris et plus généralement dans le parcours préparatoire. Elles seront cependant représentées par quelques prélats appelés à participer et à voter au Synode. Mais il n’est pas certain que nous entendions parler de cette voix critique : le Pape, en effet, a expliqué qu’il y aura une commission spéciale dirigée par le Préfet du Dicastère pour la Communication, Paolo Ruffini, qui aura la tâche exclusive de donner des informations sur les travaux du Synode à travers des communiqués de presse avec la consigne  » de ne pas faire de bavardage, mais de dire juste les choses sur le progrès synodal qui sont constructives pour l’Église « .

Le pape en vol : la Russie, le Synode et un (hypothétique) successeur

Nico Spuntoni
lanuovabq.it/
5 septembre 2023

Lors de l’interview habituelle dans l’avion à son retour de Mongolie, parmi les sujets « à l’ordre du jour », il répète le nom de Jean XXIV : pas d’hypothèque sur l’avenir, bien sûr, mais le profil de celui qu’il voudrait à sa place est clair.

Hier, François est rentré à Rome et, sur le vol en provenance de Mongolie, il a répondu, comme d’habitude, aux questions des journalistes accrédités.

Immanquable, la question sur le voyage qui venait de se terminer. En réponse, Bergoglio a cité une homélie de 2007 de son prédécesseur Benoît XVI qui rappelait que « l’Église ne fait pas de prosélytisme. Elle se développe plutôt par « attraction » ». C’est dans cet esprit que le pape a choisi de se rendre en Mongolie pour faire connaissance avec la petite communauté catholique locale et témoigner de sa conception de l’évangélisation.

En parlant de la destination de ce 43e voyage apostolique, François a reconnu son importance stratégique en tant que terre frontalière avec la Russie et la Chine. Ses réponses sur ces deux puissances ont été les plus liées à l’actualité de la conférence de presse. Interrogé sur la mission d’apaisement des tensions russo-ukrainiennes, prudemment menée par le cardinal Matteo Maria Zuppi, le souverain pontife a tenu à rappeler que c’est lui qui avait choisi l’émissaire et que son expérience passée dans la résolution de la crise du Mozambique en 1992 avait pesé dans cette décision. Malgré les vives critiques qui se sont abattues sur le Saint-Siège pour l’application unilatérale de l’accord provisoire sur la nomination des évêques, François a de nouveau défendu la stratégie d’ouverture à l’égard de Pékin et, après avoir envoyé dimanche un signal de détente au régime en conseillant aux catholiques chinois d’être « de bons chrétiens et de bons citoyens », il a enfoncé le clou en affirmant qu’il fallait « aller de l’avant » pour que « les citoyens chinois ne pensent pas que l’Église n’accepte pas leur culture et leurs valeurs et que l’Églisedépend d’une autre puissance étrangère ». En réalité, il est notoire que cette préoccupation, plutôt que de concerner les citoyens chinois en général, trouve un terreau fertile surtout auprès des autorités chinoises.

En ce qui concerne la Russie, en revanche, François a clarifié le discours controversé qu’il avait adressé aux jeunes catholiques russes le 25 août et qui lui avait valu d’être accusé de « propagande impérialiste » par certains responsables du gouvernement de Kiev. François a déclaré qu’il avait parlé de « Grande Russie » en faisant référence à la sphère culturelle et non à la sphère géographique. Même si, de l’aveu même du souverain pontife, il avait mentionné immédiatement après deux tsars, Pierre le Grand et Catherine, plutôt que deux artistes ou intellectuels. Dans l’avion, cependant, le pape a cité Fiodor Dostoïevski et a rappelé à juste titre que « la culture russe est d’une grande beauté, d’une très grande profondeur et ne doit pas être annulée à cause de problèmes politiques ».

Chapitre santé : il a été évoqué lors d’une question sur un éventuel voyage au Vietnam avec l’aveu que partir n’est plus aussi facile qu’au début du pontificat. François, qui ne manque pas d’ironie, a déclaré que s’il n’y allait pas, « Jean XXIV y irait certainement ». Ce n’est pas la première fois que le pape, ironisant sur celui qui viendra après lui, évoque ce nom pontifical pour son successeur. Il semble bien que Bergoglio, même sur le ton de la plaisanterie, ait des idées bien arrêtées sur l’homme qu’il souhaiterait voir prendre sa place – au moins sur le plan programmatique – au point de se convaincre lui-même du nom que devrait porter le nouveau pape. Il est clair que la référence à Jean XXIV doit être classée dans la catégorie des boutades et ne doit pas être considérée comme une indication au Sacré Collège, laquelle, venant de la bouche du Pontife régnant, pourrait même être qualifiée de forme de pression.

À l’approche de l’ouverture de la première session du Synode sur la synodalité, Bergoglio a tenu à faire part de ses enjeux avant le début de cette assemblée controversée.

Interrogé par le journaliste Antonio Pelayo sur la préface du cardinal Raymond Leo Burke à un livre qui le qualifie de boîte de Pandore pour l’Église, le pape n’a pas caché son impatience face à cette critique, affirmant que « si l’on va à la racine de ces idées, on y trouve des idéologies ». Les positions exprimées dans le livre Processo sinodale: un Vaso di Pandora, et qui existent dans l’Église n’ont pas trouvé leur place dans l’Instrumentum Laboris et plus généralement dans le parcours préparatoire. Elles seront cependant représentées par quelques prélats appelés à participer et à voter au Synode. Mais il n’est pas certain que nous entendions parler de cette voix critique : le Pape, en effet, a expliqué qu’il y aura une commission spéciale dirigée par le Préfet du Dicastère pour la Communication, Paolo Ruffini, qui aura la tâche exclusive de donner des informations sur les travaux du Synode à travers des communiqués de presse avec la consigne  » de ne pas faire de bavardage, mais de dire juste les choses sur le progrès synodal qui sont constructives pour l’Église « . Il semble entendu que la commission présidée par Ruffini sera appelée à décider quelles nouvelles sont constructives pour l’Église et méritent donc d’être communiquées à l’extérieur, et lesquelles ne le sont pas.

À l’objection de la correspondante du Catholic News Service, Cindy Wooden, qui demandait un Synode plus ouvert pour les journalistes, se plaignant que leur exclusion des sessions les obligerait à ne s’appuyer que sur les informations transmises par la communication officielle sans aucune certitude quant à leur véracité ou leur exhaustivité, François a répondu assez sèchement :  » Si vous voulez… si quelqu’un veut que les nouvelles soient : « celui-ci est fâché avec celui-là à cause de ceci ou de cela », c’est du bavardage politique… « .

En conclusion, rien à faire : la reconstruction des travaux et des discussions du Synode devra partir des communiqués de presse « pondus » par la commission Ruffini.

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