L'appel de deux cardinaux courageux
Les cardinaux Brandmüller et Burke adressent une lettre ouverte aux évêques convoqués au Sommet vatican sur les abus sexuels. Un appel "nécessaire et impératif". Commentaire de Riccardo Cascioli (20/02/2019)
Les cardinaux Burke et Brandmüller ont adressé une lettre ouverte aux Présidents des conférences épiscopales (lettre que, dans le contexte actuel, il n'est pas excessif de qualifier d'héroïque), dont c'est un devoir d'amplifier l'audience:
Nous nous adressons à vous avec une grande tristesse.
Le monde catholique est désorienté et se demande avec angoisse : où va l'Église ?
Face à la dérive en cours, il semble que le problème se réduise à celui des abus sur les mineurs – un crime horrible, tout particulièrement quand il est commis par un prêtre, mais qui n'est qu'un élément d'une crise bien plus vaste. Telle une plaie, la cause homosexuelle se répand dans l'Église, promue par des réseaux organisés et protégée par un climat de complicité et d'omertà. Les racines de ce phénomène se trouvent évidemment dans ce mélange de matérialisme, de relativisme et d'hédonisme qui refuse absolument l'existence d'une loi morale absolue, c'est-à-dire qui ne souffre pas d’exceptions.
On accuse le cléricalisme est d’être responsable des abus sexuels, mais la première et principale responsabilité du clergé n'est pas dans l'abus de pouvoir, mais dans le fait de s'être éloigné de la vérité de l'Évangile. La négation, y compris publique, dans les paroles comme dans les actes, de la loi divine et naturelle, est à la racine du mal qui corrompt certains secteurs de l'Église.
Face à cette situation, cardinaux et évêques se taisent. Vous tairez-vous également lors de la réunion convoquée ce 21 février au Vatican ?
Nous sommes de ceux qui ont interpellé le Saint-Père en 2016 sur les dubia qui divisaient l'Église à l'issue des conclusions du Synode sur la famille. Aujourd'hui, ces dubia non seulement n'ont pas reçu de réponse mais s'inscrivent dans une crise de la foi bien plus générale. Nous voulons par conséquent vous encourager à faire entendre votre voix et à proclamer l'intégrité de la doctrine de l'Église.
Nous invoquons le Saint-Esprit pour qu'il assiste l'Église et éclaire les pasteurs qui la guident. Un acte décisif est aujourd'hui urgent et nécessaire. Nous mettons notre confiance dans le Seigneur qui a promis : « Voici que je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde » (Mt 28, 20).
Walter Card. Brandmüller
Raymond Leo Card. Burke
De B&B, un appel nécessaire et impératif
Riccardo Cascioli
http://www.lanuovabq.it/it/da-bb-un-appello-necessario-e-doveroso
20 février 2019
Ma traduction
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Il ne fait aucun doute que l'"opération Vérité" invoquée par les cardinaux Burke et Brandmuller serait la seule chose nécessaire aujourd'hui; mais ce qui s'est passé en 2002 devrait servir d'avertissement.
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«Candide, compatissant et engagé pour une réforme radicale»; porte-drapeau de la «politique de "tolérance zéro" envers les prêtres qui abusent des mineurs»; enfin «une figure publique attrayante» pour l'Église américaine; «pas même égratigné par les scandales sexuels». Il est difficile de ne pas se poser quelques questions quand on découvre que cette description concerne le cardinal Theodore E. McCarrick: c'est dans le Washington Post du 28 avril 2002, un long article qui lui est entièrement consacré, «L'homme du moment au Vatican», comme l'énonce son titre.
La rencontre entre le pape Jean-Paul II et les cardinaux américains, convoqués à Rome justement pour discuter du scandale des abus sexuels qui touchait l'Église américaine, venait de se conclure. McCarrick, nommé cardinal l'année précédente, est le véritable leader du groupe. On est frappé par l'exaltation du personnage de la part d'un journal certes peu suspect de sympathies catholiques, et par la renommée qui entoure McCarrick lui-même, autrement dit l'intransigeance contre le péché faite homme. Et cela frappe encore plus si l'on considère que deux ans plus tôt le signalement du comportement déplacé avec ses séminaristes de celui qui était cardinal était déjà parvenu au Vatican.
Cette affaire est également un avertissement pour le sommet sur les abus sexuels qui s'ouvre demain, 21 février, au Vatican. Les discussions, les directives et les proclamations sur la «tolérance zéro» ne suffisent pas. Il faut une «opération vérité» radicale, qui consiste non seulement à mettre en lumière tous les faits et les responsabilités, mais aussi à aller à la racine de ce terrible scandale et à en saisir le vrai sens.
La lettre des cardinaux Raymond L. Burke et Walter Brandmüller est donc providentielle. Les deux survivants des quatre signataires des Dubia en 2016, s'inscrivent précisément dans la continuité de cette initiative, à laquelle le Pape n'a jamais donné de réponse. Et ils vont droit au cœur de la question: «On accuse le cléricalisme pour les abus sexuel - écrivent-ils -, mais la première et principale responsabilité du clergé ne réside pas dans l'abus de pouvoir, mais dans son éloignement de la vérité de l'Evangile. Le déni, y compris public, en paroles et en actes, de la loi divine et naturelle, est à l'origine du mal qui corrompt certains milieux de l'Église».
C'est précisément de cet éloignement de «la vérité de l'Évangile» que dérivent les comportements scandaleux, avec «le fléau de l'agenda homosexuel», promu «par des réseaux organisés et protégés par un climat de complicité et de silence».
C'est une approche bien éloignée de celle du pape François et du comité organisateur du Sommet. Nous avons entendu lundi, en conférence de presse, ce qu'a dit le cardinal Blase Cupich: on ne parle pas d'homosexualité, ce n'est pas une cause des abus; après, tout le discours restera confiné aux violences contre les mineurs, ce que McCarrick a fait restera en grande partie en dehors de cette rencontre.
Au contraire, ce qui s'est passé en 2002 devrait nous apprendre quelque chose: l'Éminence d'alors pouvait se sentir tranquille parce qu'on se concentrait sur la pédophilie (qui concerne les enfants prépubères), alors qu'il avait une passion pour les séminaristes.
Quoi qu'il en soit, la mauvaise tournure que prend ce sommet rend d'autant plus nécessaire l'appel des cardinaux Burke et Brandmüller, qui s'adressent directement aux évêques qui seront présents afin qu'ils ne restent pas une fois de plus silencieux et élèvent la voix «pour sauvegarder et proclamer l'intégrité de la doctrine de l'Église».
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