Un entretien téléphonique informel entre AM Valli, et Giuseppe Rusconi (accrédité à la Salle de presse et qui suit à la première personne les travaux du Synode): il y est question de son intervention qui a contraint les pères synodaux à se pencher sur le fait crû de l’infanticide pratiqué par des tribus amazoniennes; de la pensée unique (ou la dictature intellectuelle de la gauche) dans l’Eglise; des cérémonies sacrilèges en ouverture du synode et du conformisme-carriérisme dans l’Eglise et dans les médias…


Le prochain synode, faisons-le directement au siège de l’ONU

Aldo Maria Valli
11 octobre 2019
Ma traduction

Ciao, Giuseppe. Avec ta question sur les infanticides amazoniens, lors de la conférence de presse du 8 octobre au Vatican, tu as envoyé le cardinal jésuite Pedro Barreto dans les cordes. Bravo. Un coup digne du meilleur Cassius Clay. Quelle était ton impression à la fin du match… oups, désolé… je voulais dire de la conférence de presse ?

Il est au moins curieux que le cardinal Barreto, vice-président du réseau ecclésial panamazonien, dise qu’il n’a jamais entendu parler de l’infanticide persistant chez certaines tribus indiennes. C’est un problème qui n’existe pas seulement au Brésil amazonien, mais qui est aussi connu par exemple sur le plateau bolivien. En outre, au Brésil, le Parlement en discute depuis plusieurs années et un projet de loi visant à interdire l’infanticide autochtone a déjà été approuvé en 2015 par la Chambre des députés. Il est maintenant au Sénat. Le Cardinal Barreto m’a vigoureusement invité à apporter les preuves documentées de mes affirmations. Mais il me semble déjà clair que si un parlement discute d’un projet de loi visant à abolir l’infanticide autochtone, cela signifie que l’infanticide autochtone existe. Pas besoin d’aller à l’université pour le comprendre. En ce qui concerne la réponse que Barreto – qui est aussi co-président du Synode panamazonien – a donnée au sujet de la publication sur un site web lié à la Conférence épiscopale brésilienne (le Conseil missionnaire autochtone, CIMI) du texte d’une audition sur le thème de l’anthropologue Rita Laura Segato, je dois dire qu’il a raison: il ne peut y avoir dans l’Église de place pour de telles assertions. Mais bien que Barreto ait nié que cela ait pu arriver, je dois confirmer que, malheureusement pour lui (et pour l’Église brésilienne), le texte du Segato était sur le site du CIMI (hier il a disparu et aujourd’hui il réapparaît…).

En général, quelle idée t’es-tu faite de ce synode amazonien? Où veulent-ils en venir?

Pour dire la vérité (et je l’ai aussi dit hier au Cardinal Lorenzo Baldisseri, rencontré par hasard alors que j’allais prendre le tramway), je crains que le Synode ne soit en substance très similaire à une rencontre mondiale promue par une agence de l’ONU. A tel point que j’ai proposé que le cardinal l’organise la prochaine fois directement à New York ou à Genève, invitant aussi la nouvelle « sainte » Greta Thurnberg, avec tous les participants d’outre-océan se déplaçant en bateau à voile. Baldisseri – diplomate de carrière, même spirituel, pianiste de talent, aujourd’hui en qualité de pompier avec bouche d’incendie incorporée – sait écouter, mais il a naturellement insisté sur le fait que les synodes doivent se tenir à Rome, symbole d’unité ecclésiale. Cependant, on ne peut nier que le document de travail de base du Synode panamazonien est un texte qui semble avoir été accouché d’une part par la Section du réchauffement climatique de l’ONU, d’autre part par des cercles ecclésiaux qui postulent une Église archipel avec de nombreuses îles ayant leur propre visage. En ce qui concerne ce dernier point, on ne peut que constater que dans le Synode (déjà au niveau de l’inspiration) la présence allemande est significative: c’est l’Eglise d’Allemagne qui soutient financièrement le service missionnaire amazonien. Et parmi les Brésiliens, ceux d’origine allemande sont en première ligne dans la défense d’une « Eglise à visage amazonien ». Les Allemands préparent aussi leur Synode: le Synode amazonien est donc aussi un Synode test pour le succès de leurs idées fondamentalement anti-romaines.

Toi aussi, tu as dû suivre la cérémonie déconcertante du 4 octobre dans les jardins du Vatican. Puisque tu es un habitué des monsignori de la curie et des cardinaux, je te pose la question: se peut-il que personne ne s’y soit opposé? Ou qu’au moins, après la cérémonie, personne n’ait ressenti le besoin de prendre ses distances ?

Un peu partout, en politique, dans le domaine social, dans la culture et même dans l’Église, se répand la folie de la pensée unique qui fait de l’intolérance vers celui qui pense différemment son étendard. Cela en pousse beaucoup à se taire ou à feindre un alignement qu’ils n’ont pas vraiment… mais la paura fa novanta [voir note de bas de page ici: Benoît XVI redoute-t-il un schisme?]! Les instruments pour réprimer la dissidence sont nombreux et variés, tant pour l’ecclésiastique que pour le journaliste. Et ceux qui sont au milieu de leur carrière essaient de rester bien couverts afin de ne pas ruiner leurs chances de progression. Une grande hypocrisie règne, ainsi que le fanatisme de ceux qui poursuivent avec férocité leur programme pour une « Église nouvelle », alignée sur les souhaits du monde. Et la grande hypocrisie a émergé aussi autour des rites « amazoniens » douloureux et grotesques pratiqués lors de la cérémonie du 4 octobre dans les jardins du Vatican. Beaucoup, mais vraiment beaucoup, étaient outrés au fond d’eux-mêmes. Mais ils ne l’ont pas fait voir.

L’histoire de Scalfari. Une fois de plus, l’oracle a parlé et un démenti embarrassé est arrivé de la salle de presse. A quel jeu joue-t-on? Pourquoi cette ambiguïté?

Hier, il y a eu un communiqué du Bureau de presse du Vatican. Aujourd’hui, il y a (aura?) sans aucun doute une déclaration claire de Paolo Ruffini, Préfet du Département de la Communication du Vatican. Que dire? Il y a quelque temps, le 21 novembre 2013, Scalfari a répondu longuement, à la presse étrangère à Rome, à une question de notre part sur ses relations avec Jorge Mario Bergoglio. Scalfari n’a jamais utilisé l’enregistreur, mais il écoute et fait confiance à sa mémoire. Le Pape le sait, et pourtant il l’a reçu plusieurs fois. Le dernier article de Scalfari contient des déclarations très graves pour la foi, attribuées à François. Le Pape n’a pas prononcé avec une certitude quasi absolue les paroles rapportées dans l’article de Scalfari. Et pourtant, on se pose la question: mais si un journaliste aussi expérimenté que Scalfari les a présentés ainsi, n’est-ce pas en tout cas que François s’est exprimé d’une manière telle qu’il a rendu possibles des interprétations de ce fait? Si c’est oui, oui; si c’est non, dit l’Evangile. Mais si quelqu’un s’exprime par un Sì, però comunque ma tuttavia fate voi… [propos tenus par le Pape en novembre 2015 à une dame luthérienne qui s’étonnait de ne pas pouvoir recevoir la communion en même temps que son mari catholique cf. Un magistère confus ] on ne peut pas être complètement surpris si l’interlocuteur le reçoit à sa façon !

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