Est-ce le cardinal Sarah qui est visé? Et si oui, est-ce une vengeance du Pape, ou une façon de le mettre définitivement hors-jeu en vue du prochain conclave? (en tout cas, les bergogliens insinuent qu’il est bien la cible, et s’en réjouissent) Ou bien cela a-t-il un rapport avec les récentes dispositions relatives aux messes dans la basilique Saint-Pierre, qui pénalisent la forme extraordinaire du rite romain? Détails de Nico Spuntoni sur la NBQ.

Liturgie:

Démarrage d’une « enquête » sur la gestion du Cardinal Sarah

Nico Spuntoni
La NBQ
14 m ars 2021
Ma traduction

Décision sensationnelle au Vatican: lundi commencera une visite apostolique à la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, dirigée il y a encore trois semaines par le cardinal Robert Sarah. C’est la première fois qu’une congrégation fait l’objet d’une enquête. Cela explique pourquoi le pape François a accepté la démission de Sarah sans nommer de successeur. Le Visiteur Apostolique sera l’évêque de Castellaneta Claudio Maniago, vision libérale de la liturgie et accusations dans le passé de conduite morale déplacée. Cette décision, dont la motivation est inconnue, pourrait également être liée aux récentes dispositions relatives aux messes dans la basilique Saint-Pierre, qui pénalisent la forme extraordinaire du rite romain.

Le biographe et homme de confiance du Pape ne cache pas sa satisfaction,
évoquant même de façon sibylline le fait qu’il y aurait « beaucoup d’argent en jeu »

Trois semaines après l’acceptation par le Pape de la démission du Cardinal Robert Sarah, il pourrait y avoir un tournant dans le feuilleton du fauteuil de préfet, resté inexplicablement vide. En effet, selon des indiscrétions recueillies par la NBQ, une visite apostolique à la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements serait prévue: elle débutera le lundi 15 mars. Une mesure sensationnelle parce qu’elle ne concernerait pas un diocèse ou un institut religieux, mais un dicastère de la Curie romaine.

Une enquête de terrain dont on ignore pour l’instant le contenu et les motivations: concernera-t-elle la gestion passée de l’ex-préfet guinéen ou, plus généralement, se projettera-t-elle plutôt dans l’avenir de la liturgie? Ce que nous savons, pour l’instant, c’est que le Visiteur pourrait être un évêque italien. Pas, toutefois, ce Mgr Vittorio Francesco Viola que beaucoup avaient donné comme le favori pour succéder à Sarah dans le rôle de préfet. Selon les rumeurs recueillies Oltretevere, c’est en fait Mgr Claudio Maniago qui devrait diriger la visite du Palais des Congrégations.

Maniago, actuellement évêque de Castellaneta, est également président de la Commission pour la liturgie de la CEI. Un choix, donc, qui s’inscrirait dans la continuité de ce qui a été vu lors du dernier Consistoire, confirmant le moment positif dont l’épiscopat italien – ou du moins une partie de celui-ci – semble jouir à Santa Marta. La nomination de l’évêque d’Albano, Marcello Semeraro, comme préfet de la Congrégation pour les causes des saints va également dans ce sens. Un signe d’attention, peut-être, en vue de l’ouverture prochaine du Synode national de l’Église italienne tant désiré, qui s’était auparavant heurté à une certaine timidité de la part de la CEI, avant d’arriver à la présentation du projet cinq ans seulement après le discours par lequel le Pape l’avait demandé à la Convention [ecclésiale] de Florence.

Mgr Maniago est lié à la ville toscane, où il est né (en 1959, ndt) et où il a occupé à partir de 2003 le poste d’évêque auxiliaire, le plus jeune d’Italie au moment de sa consécration. Dès cette époque, on parlait de lui comme d’un enfant prodige de l’épiscopat italien et déjà en 2006, on le croyait sur la rampe de lancement pour la direction d’un diocèse. Sa carrière prédestinée a pris un brusque tournant en 2007 avec les accusations d’avoir couvert don Lelio Cantini, réduit à l’état laïc par Benoît XVI pour le « crime d’abus multiples et aggravés sur mineurs », et pour les témoignages sur sa présumée conduite morale déplacée, qui ont abouti à une enquête du procureur général de Florence sur l’ex-prêtre de Regina della Pace [donc Lelio Cantini].
Le nom de Maniaga s’était étalé dans les journaux à cause d’une fuite contre laquelle l’archevêque de Florence de l’époque, le cardinal Antonelli, avait pris fermement parti, envoyant un mail aux paroisses où il leur demandait de faire bloc autour de leur auxiliaire contre la « boue » qui se déversait sur lui.

Maniago n’a pas l’objet d’une enquête, et l’enquête du procureur a également fini par être classée, mais avant d’arriver à la tête d’un diocèse, il a dû attendre 2014 avec sa nomination comme évêque de Castellaneta. En 2015, il a été élu président de la Commission épiscopale pour la liturgie et a ensuite été choisi par le pape François comme membre de la Congrégation pour le culte divin.

Sa Visite Apostolique s’ouvrira à un moment où le terrain de la Liturgie est plutôt agité au sein de l’Eglise. Agité non pas tant à cause de la récente démission du cardinal Robert Sarah, dont Benoît XVI avait dit qu’avec lui la liturgie serait entre de bonnes mains, mais à cause de la publication d’un document daté du 12 mars par lequel la section des affaires générales de la Secrétairerie d’État a ordonné la suppression des célébrations individuelles dans la basilique Saint-Pierre, imposant des concélébrations qui doivent être « animées liturgiquement, avec l’aide de lecteurs et de chantres ».

Les évêques ou les prêtres accompagnés de groupes de pèlerins pourront célébrer la messe dans les grottes du Vatican, tandis qu’une note à part est réservée à ce qui est appelé le « rite extraordinaire » – et non une forme extraordinaire du seul rite romain – dans laquelle il est précisé que « les prêtres autorisés peuvent célébrer » à quatre horaires déterminés dans la chapelle Clémentine des grottes du Vatican.

Les dispositions entreront en vigueur à partir du 22 mars 2021, aucune date d’expiration n’étant indiquée. Un aspect qui pourrait conduire à exclure leur durée temporaire, tout comme il ne semble pas y avoir de lien direct avec l’urgence sanitaire en cours puisqu’il est dit dans le préambule que le but de la mesure est d’assurer « un climat de recueillement et de décorum liturgique ».

Il est anormal que dans ce document, qui concerne spécifiquement la basilique Saint-Pierre, la figure de l’archiprêtre de la basilique vaticane, le cardinal Mauro Gambetti, récemment nommé à la place du cardinal Angelo Comastri, soit totalement absente.
Le document, publié en exclusivité il y a deux jours par le blog Messainlatino.it, n’a pas du tout plu au cardinal Raymond Leo Burke, qui a publié sur son site web une déclaration critiquant tant la forme que le contenu [traduite en français sur le blog de Jeanne Smits].

Le préfet émérite de la signature apostolique a écrit que les dispositions soulèvent des préoccupations concernant « non seulement la basilique papale Saint-Pierre, mais aussi l’Église universelle, puisque la basilique papale Saint-Pierre est, d’une manière particulière, la maison spirituelle de tous les catholiques et, en tant que telle, devrait être un modèle de discipline liturgique pour les Églises particulières. »
Le cardinal américain, expert canoniste, a noté qu' »il s’agit d’un document non signé de la première section de la Secrétairerie d’État, sans numéro de protocole, qui légifère sur l’aspect le plus sacré de la vie de l’Église, l’offrande de la Sainte Messe » et que, bien qu’ « il semble authentique, c’est-à-dire non falsifié, il ne peut être considéré comme un document contenant une législation valide pour la Sainte Liturgie. »

En ce qui concerne la différenciation des célébrants de la forme extraordinaire, le cardinal Burke a contesté l’utilisation de l’expression « prêtres autorisés » en faisant appel à Summorum Pontificum, qui stipule qu’ « aucun prêtre n’a besoin d’autorisation pour offrir la Sainte Messe selon la forme extraordinaire du rite romain. » Dans sa déclaration, le cardinal patron de l’Ordre Souverain Militaire de Malte a demandé la révocation du document avant son entrée en vigueur « pour le bien de la foi catholique et pour le bon ordre de la Sainte Liturgie ».

Les nouvelles normes sur les célébrations dans la basilique sont-elles liées de quelque manière que ce soit à la probable visite apostolique de la Congrégation pour le culte divin ? Il est encore trop tôt pour avoir une réponse à cette question.

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