AM Valli a interrogé l’archevêque rebelle à propos des récentes nominations faites par François, en particulier celle de Fernandez à la Doctrine (lequel est à François ce que Zelensky est à Biden, dit-il) – et donc, inévitablement, sur les perspectives du Conclave à venir. Selon lui, le but de François est tout simplement de créer les conditions d’un schisme.

Mgr Vigano est le seul, à un niveau élevé de la hiérarchie de l’Eglise, à oser tenir des propos aussi définitifs (et personnellement, je les crois justifiés): il est dramatique qu’il soit totalement marginalisé, ignoré par les médias et par l’Eglise, relégué, pour reprendre ses propres termes, dans une « réserve de chasse » – c’est d’ailleurs pour cela que François ne cherche même pas à lui apporter la contradiction, car il le considère comme insignifiant.

Si l’on soumettait un questionnaire anonyme aux éminents membres du Collège des cardinaux, dans lequel ils devraient répondre par « vrai » ou « faux » à une série de propositions sur lesquelles le Magistère s’est déjà infailliblement exprimé, on découvrirait avec horreur que la majorité absolue, voire la quasi-totalité des cardinaux ne sont pas « catholiques », tout court.

Entretien avec Carlo Maria Viganò

« Le prochain conclave ? Une provocation. Bergoglio veut créer les conditions d’un schisme ».

« Fernández est à Bergoglio ce que Zelensky est à Biden ».

Votre Excellence, quelqu’un dit que parmi ces derniers cardinaux pourrait se trouver le successeur de François. Êtes-vous d’accord ?

Je doute que le Collège des cardinaux – autrefois le Sacré Collège – veuille élire un pape conservateur ou même modérément progressiste ; en effet, il est clair que le prochain Conclave sera une provocation. Presque tous les cardinaux ont été créés « à l’image et à la ressemblance » de Bergoglio et ce sont eux qui choisiront son successeur – peut-être de son vivant, étant donné la nouvelle mode du renoncement. Si les électeurs avaient un minimum d’amour pour l’Église, ils devraient se rendre dociles à l’action de l’Esprit Saint ; mais nous savons que ce conglomérat d’hérétiques et d’immoraux – à de rares exceptions près – n’a pas l’intention de laisser faire le Seigneur, car s’ils le faisaient, ils signeraient leur propre condamnation. Mais le bon Dieu réserve parfois des surprises inattendues.

Quelle est la logique suivie par Bergoglio dans ses nominations ?

La logique de Bergoglio est très évidente : il veut créer les prémisses d’un schisme, qu’il nie et déplore en paroles, mais qu’il prépare depuis longtemps. Bergoglio veut séparer, d’une manière ou d’une autre, la partie bonne des fidèles et des clercs de l’Église officielle ; et pour y parvenir, pour qu’ils se détournent du Sanhédrin moderniste, il a placé à des postes clés de la Curie romaine les personnes qui garantissent la pire gestion des dicastères qui leur sont confiés, avec le pire résultat possible et le plus grand dommage pour le corps ecclésial.

Les restrictions progressives à la célébration de l’ancienne Liturgie servent à enfermer les conservateurs dans des réserves de chasse, pour les canaliser ensuite vers la Fraternité Saint-Pie X, dès que le Synode aura porté à leurs tragiques conséquences les changements doctrinaux, moraux et disciplinaires qui se préparent et auront provoqué un exode des catholiques vers ce qui, après la suppression ou la normalisation des Instituts Ecclesia Dei, deviendra le « monopole » de la Tradition.
Mais à ce moment-là – c’est-à-dire quand les catholiques traditionnels auront migré dans la Fraternité et que ses dirigeants croiront avoir remporté une victoire sur la concurrence de Summorum Pontificum (supprimé) – une nouvelle provocation intolérable obligera au moins une partie de la Fraternité Saint-Pie X à prendre ses distances avec la Rome bergoglienne, validant ainsi l’ « excommunication » du traditionalisme, qui n’est plus représenté au sein de l’Église officielle, si tant est qu’il l’ait jamais été. C’est pourquoi, à mon avis, il est important de maintenir une certaine parcellisation, afin de rendre plus complexe la manœuvre malveillante d’éviction des catholiques traditionnels du corps ecclésial.

Diaconesses, abolition du célibat ecclésiastique, bénédiction des couples homosexuels, tolérance de la polygamie, théorie du gender, idéologie LGBTQ, panthéisme écologique à la Teilhard de Chardin : tels sont les points de discorde que Begoglio ouvre délibérément entre l’aile conservatrice (mais pas traditionnelle, déjà distante ou dépassée) et l’aile ultra-progressiste. Son but est de créer l’affrontement, de le laisser grandir, d’encourager par des nominations et des promotions les partisans des cas les plus extrêmes, puis d’assister à la réaction prévisible de condamnation des quelques bons évêques, prêtres et religieux restants, qui, face à l’écueil-Bergoglio, auront deux choix : retourner souffrir en silence ou se lever, dénoncer la trahison de la Vérité catholique et être contraints de quitter leur poste et d’exercer leur ministère dans la clandestinité ou au moins dans une apparente irrégularité canonique.

Une fois les pasteurs gênants ostracisés et les fidèles conservateurs écartés, la hiérarchie bergoglienne pourra exercer un contrôle total sur le clergé et le peuple, certaine de l’obéissance des laissés-pour-compte. Et cette secte, qui de catholique n’aura plus que le nom (et peut-être même plus), éclipsera totalement l’Épouse de l’Agneau, dans le paradoxe d’une Hiérarchie traîtresse et corrompue qui abuse de l’autorité du Christ pour détruire son Église.

C’est ce que souhaitent les commanditaires de Bergoglio et de ses minion [sic!] mais le sensus fidei du peuple saint de Dieu pourrait conduire beaucoup à rejeter cette fraude et à participer à une action de résistance ferme et de dénonciation résolue. Le Seigneur permettra que l’Église paraisse morte, que les forces de l’enfer croient l’avoir vaincue, parce qu’il veut que le Corps mystique suive le chemin de la Croix et de l’Enterrement, comme son divin Chef, s’il veut le rejoindre dans la gloire de la Résurrection.

On dit que le Collège des cardinaux, tel que voulu par François, représente l’Église universelle : vraiment ?

Si l’on soumettait un questionnaire anonyme aux éminents membres du Collège des cardinaux, dans lequel ils devraient répondre par « vrai » ou « faux » à une série de propositions sur lesquelles le Magistère s’est déjà infailliblement exprimé, on découvrirait avec horreur que la majorité absolue, voire la quasi-totalité des cardinaux ne sont pas « catholiques », tout court. Et dans le nombre de ceux-ci, je crois que nous trouverions aussi quelques conservateurs. L’hérésie notoire de nombreux prélats est confirmée par leurs propres déclarations, devant lesquelles Bergoglio s’est bien gardé d’ouvrir la bouche, comme il sait le faire sans trop de scrupules à l’égard des quelques prélats restés fidèles.

L’actuel Collège des cardinaux est la quintessence de l’Église bergoglienne : ses membres représentent la large diffusion du modernisme et du progressisme conciliaire dans le monde. Mais ils ne sont certainement pas l’expression de l’Église universelle : d’abord parce qu’ils n’en font pas partie, ne serait-ce qu’en apparence, étant hérétiques ; ensuite parce que, par la grâce de Dieu, les fidèles et le clergé apprennent – après soixante ans d’horreurs [post-conciliaires], depuis dix ans encore plus évidentes – à ne pas prendre pour argent comptant tout ce qui sort de la bouche du pape, de l’évêque ou du curé. Ceux-ci, après avoir prêché la désobéissance au vrai Magistère, se retrouvent donc à subir les conséquences d’une désobéissance qui, cette fois, est bonne et légitime, parce qu’elle obéit au Christ.

Nous assistons à l’effacement systématique de toute une partie de l’Église – identifiable géographiquement, mais aussi idéologiquement – qui reste catholique : quelques évêques américains, avec leurs diocèses ; de nombreux évêques africains, fidèles surtout sur le plan moral ; et un nombre croissant de curés, de prêtres, de religieux et de religieuses qui se rendent compte qu’ils sont les prochaines victimes des purges de Santa Marta (…)

Pourquoi François continue-t-il à ignorer des villes comme Milan, Turin, Venise, Gênes et Naples ? [et Paris!!]

Il le fait parce qu’il veut enlever le prestige moral de certains sièges épiscopaux, traditionnellement cardinalices, au profit d’une gestion des nominations à la pourpre marquée par un népotisme idéologique flagrant. Tous les amis de Bergoglio, et les amis de ses amis, voient leur carrière facilitée, même au prix d’un déni obstiné de leurs scandales, de leurs erreurs doctrinales, de leur indignité ou de leur incompétence manifeste. Il aime les « bergers qui sentent l’odeur des brebis », même s’ils sont mercenaires et si les brebis n’ont aucune envie d’être conduites par eux. Ce qui révèle un manque de vertus humaines encore plus décourageant que l’absence totale de vertus théologiques. (…)

Le message pour ceux qui aspirent au cursus honorum du Vatican est de se plier au pouvoir avec une servilité courtoise, sous peine de contrôle par une commission, de visite apostolique, de transfert ou même de renvoi sans nouvelles nominations (voir Burke et Gaenswein, entre autres).

Tucho Fernández sera cardinal. Jusqu’à récemment, cela semblait être une plaisanterie. Ce n’est pas le cas.

Cela reste une plaisanterie, car ce qui se passe depuis dix ans relève plus de la farce que de la tragédie. Tout ce que la secte de Santa Marta enfante est une supercherie : la prétendue « démocratisation » du synode sur la synodalité, où les questions soumises aux communautés locales sont formulées de manière à obtenir les réponses souhaitées, toujours selon un dessein subversif précis qui part de Bergoglio lui-même. L’implication des femmes dans le gouvernement de l’Église est un mensonge : c’est contraire à la volonté de Notre Seigneur et aucun pouvoir, aussi tyrannique et autoritaire soit-il, ne peut changer le sujet du sacrement de l’ordre. Les clins d’œil scandaleux des prélats et des clercs aux vices et aux modes de vie de la soi-disant « communauté LGBTQ » sont une tromperie : ils utilisent les faiblesses des laïcs égarés par l’idéologie woke pour légitimer leurs péchés personnels, qui émergent tôt ou tard dans leur prosaïsme embarrassant. Fernández lui-même, qui courtise Bergoglio depuis des années avec des déclarations publiques d’estime, de confiance en sa capacité réformatrice, de certitude de l’inexorabilité de son action « prophétique » (dans le néo-langage du Concile, synonyme d’ « hérétique ») en tant que Pasteur suprême de l’Église, est lui aussi un personnage construit.

Fernández est à Bergoglio ce que Zelensky est à Biden : des marionnettes dans les mains de marionnettes. Les ficelles sont toujours tirées par cette même élite subversive qui relie la Maison Blanche au Vatican, les mails de Podesta à l’abdication de Ratzinger, l’État profond à l’Église profonde, Nancy Pelosi au « père » James Martin sj.

Il ne fait aucun doute que Fernández a été placé à la tête de l’ancien Saint-Office pour ne rien faire de ce que devrait faire le préfet de ce très important dicastère, aujourd’hui rétrogradé. Il fera exactement le contraire: il encouragera les hérésies et les déviations morales des théologiens en vogue aujourd’hui, des évêques impatients de déménager à l’hôtel Santa Marta, des partisans du gender ; et en revanche, il agira avec une fermeté impitoyable pour le prêtre qui critique une déclaration hérétique de Bergoglio ou de l’un de ses protégés, pour l’évêque qui dénonce les déviations du Synode, pour le professeur de séminaire qui enseigne encore les actes magistériels antérieurs à Vatican II. Nous verrons jusqu’où ira le zèle de ce Fernández pour plaire à son commanditaire, et combien de temps ceux qui sont visés par les talibans de la Pachamama supporteront ces attaques sans y répondre, voire en les ignorant tout simplement.

Les cardinaux voulus par François sont-ils tous des béni-oui-oui ou y a-t-il quelqu’un capable d’un jugement indépendant ?

Pour être cardinal aujourd’hui, il faut avoir ce que nos anciens appelaient « du poil sur l’estomac » [pelo sullo stomaco: je garde mot à mot la savoureuse expression italienne, en français, nous dirions « avoir la peau dure », ne pas avoir d’états d’âme]: depuis soixante ans, les purges se poursuivent sans relâche, et même certains des cardinaux les plus éminents créés par Benoît XVI se sont révélés tout à fait en deçà des attentes des fidèles conservateurs, et, ce n’est pas rare, opportunistes ou lâches. Des courageux – disons les choses ainsi – des Dubia, il ne reste plus beaucoup de survivants, qui ont été témoins, lors du dernier Conclave, de choses qu’ils ne dénoncent pourtant pas publiquement. Alors oui, ce sont tous des béni-oui-oui, ce qui, pour ceux qui devraient défendre la Sainte Église usque ad effusionem sanguinis, est pour le moins incohérent.

La crise actuelle est le châtiment par lequel le Seigneur punit l’Église et le monde de l’infidélité de ses ministres et des gouvernants des nations. Nous considérons ce fléau comme le geste sévère d’un Père trop longtemps offensé, mais qui veut encore nous sauver. La conversion est la seule voie possible : revenons à Dieu, avant que la Miséricorde ne cède à la Justice.

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