C’est une véritable bombe qui vient d’être lancée à deux jours de l’ouverture des travaux, Riccardo Cascioli titre justement dans son éditorial « Une rafale de Dubia s’abat sur le Pape ». Sept ans après les fameux « Dubia des 4 cardinaux », formulés après la parution d’Amoris Laetitia et qui n’ont jamais reçu de réponse, cinq cardinaux (*), venant des cinq continents (il devait y en avoir six, mais le cardinal Pell, initiateur du projet, est mort subitement en janvier dernier) ont écrit au Pape le 10 juillet dernier, et lui ont posé des questions précises sur tous les sujets brûlants dont doit débattre le Synode imminent (synodalité, immuabilité de la doctrine, bénédictions des partenariats homo, ordination des femmes). Ils ont reçu une réponse dès le lendemain (on imagine la colère de François… mais la lettre, adressée aux seuls cardinaux Burke et Brandmüller, n’a pour le moments pas été publiée) aussi vague que dilatoire, qui en réalité ne répond à rien.

Selon Sandro Magister:

Dès le 11 juillet, le pape leur avait répondu par une lettre qui parvint aux destinataires le 13.

Seulement, cette réponse a semblé aux cinq cardinaux aussi redondante (sept feuillets dans l’original espagnol) que vague et évasive, loin de résoudre les cinq « dubia ».

Bien que signée par François, la lettre dénote le style d’écriture de son théologien de confiance, l’Argentin Victor Manuel Fernández, sur le point d’assumer le rôle de nouveau préfet du dicastère pour la doctrine de la foi.

magister.blogautore.espresso.repubblica.it

Les cinq cardinaux ont donc envoyé une seconde lettre, très précise, demandant une réponse par oui ou par non, qui à ce jour, presque deux mois après, n’a pas reçu de réponse.

(*) Je ne doute pas que les commentateurs vont dauber sur l’âge des signataires, tous émérites ou sans charge (preuve en réalité de la peur qui règne au sommet de l’Eglise). Aux deux survivants des précédents dubia (Burke et Brandmüller) se sont ajoutés les cardinaux Sarah, Zen, et le moins connu de tous, le mexicain Juan Sandoval, né en 1933, créé cardinal par Jean Paul II en 1994 et cible d’attaques pour ses positions jugés « homophobes » .

Ce qui compte, ce n’est pas leur âge, mais le mouvement qu’ils auront initié: y aura-t-il d’autres « pères » synodaux, voire d’autres cardinaux (on pense forcément au cardinal Müller, pourquoi n’a-t-il pas signé? est-ce parce qu’il participera en personne aux débats?), qui auront le courage de se joindre à eux? C’est tout l’enjeu de ce Synode qui s’annonce déjà explosif.

Défi au Synode. Une rafale de Dubia s’abat sur François

Riccardo Scioli
La NBQ
2 octobre 2010

Cinq cardinaux des cinq continents – Burke, Brandmüller, Sarah, Zen, Sandoval – rendent publiques les cinq questions de clarification doctrinale posées au pape François et restées sans réponse. Les thèmes : immutabilité de la doctrine, bénédiction des couples homosexuels, nature de l’Église, sacerdoce féminin, sacrement de la réconciliation.

Chers catholiques, à l’occasion du Synode (et pas seulement), de « hauts prélats » font des déclarations gravement contraires à la foi catholique qui ne sont jamais corrigées par ceux qui devraient le faire. C’est pourquoi nous avons posé des questions précises au pape François, selon la tradition de l’Église, auxquelles pourtant il ne répond pas. Nous les rendons donc publiques, afin que vous ne soyez pas déconcertés par la confusion régnante et que vous ne tombiez pas dans l’erreur.

Telle est la substance de la Lettre aux fidèles laïcs signée par cinq cardinaux – Raymond Leo Burke, Walter Brandmüller, Robert Sarah, Joseph Zen Ze-kiun et Juan Sandoval Íñiguez -, rendue publique aujourd’hui, 2 octobre, dans le monde entier et accompagnée de la publication des cinq Dubia soumises au pape François, que La NBQ publie en exclusivité pour l’Italie (avec Settimo Cielo, le blog de Sandro Magister).

Les « Dubia » sont des questions formelles posées au pape et à la Congrégation pour la doctrine de la foi pour demander des éclaircissements sur des points particuliers concernant la doctrine ou la praxis. Comme on s’en souvient, le pape François s’est déjà vu poser cinq Dubia en 2016 après la publication de l’exhortation post-synodale Amoris Laetitia : à cette occasion également, les cardinaux Burke et Brandmüller avaient signé, rejoints par les cardinaux Carlo Caffarra et Joachim Mesner, entretemps décédés. Depuis lors, le pape François n’a jamais répondu directement aux Dubia, se contentant de réponses indirectes découlant de ses attitudes.

Aujourd’hui, le scénario semble se répéter, mais avec deux nouveautés importantes : tout d’abord, le nombre de cardinaux qui ont apposé leur signature sous les Dubia est élargi (il y a désormais un représentant de chaque continent). Il convient de rappeler qu’il aurait dû y avoir six cardinaux signataires, car le cardinal australien George Pell, décédé subitement le 11 janvier, a joué un rôle très actif dans le processus de formulation des Dubia.

Deuxièmement, nous avons cette fois deux versions des Dubia : la première porte la date du 10 juillet. Le pape François y a même répondu le lendemain, mais pas sous la forme canonique, qui est celle d’une réponse à une question, mais sous la forme d’une lettre qui – comme c’est son style – évite le cœur de la question.

Les cinq cardinaux ont donc reformulé les Dubia de manière à ce que le pape puisse y répondre simplement par un « oui » ou un « non ». Ainsi reformulées, elles ont été envoyées au pape François le 21 août. Depuis lors, le silence s’est installé.

Mais seulement sur le contenu des questions. On comprend mieux pourquoi, ces derniers temps, le cardinal Burke a fait l’objet de polémiques tant de la part du pape – lors de la conférence de presse à son retour de Mongolie – que de la part du nouveau préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, Victor Manuel Fernández, dans l’interview accordée au National Catholic Register. C’est peut-être un signe de la nervosité que cette initiative génère et qui s’abat maintenant sur un Synode qui soulève beaucoup de controverses tant sur son contenu que sur la façon dont il est conduit et communiqué.

En effet, les cinq Dubia vont au cœur des thèmes qui seront traités par le Synode ou sont en tout cas fondamentaux pour comprendre les enjeux de l’assemblée synodale.

Le fait qu’ils soient rendus publics à la veille du Synode est significatif de l’inquiétude de larges secteurs de l’Église face à ce qui se passe et aux déclarations de ceux qui dirigeront le Synode.

Voici un résumé des questions soulevées par les cinq cardinaux :

  1. Le premier Dubium concerne la valeur immuable de la Révélation divine. La première version fait référence à ceux qui prétendent que « la Révélation divine doit être réinterprétée en fonction des changements culturels de notre temps ». Il est donc demandé au Pape « si la Révélation divine est contraignante pour toujours, immuable et ne peut donc pas être contredite ». La réponse étant évasive, la reformulation demande encore plus précisément s’il est possible que « l’Église enseigne aujourd’hui des doctrines contraires à celles qu’elle a précédemment enseignées en matière de foi et de morale ».
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  2. La seconde question est en quelque sorte une exemplification de la première. C’est-à-dire : face à la diffusion de la pratique de la bénédiction des unions homosexuelles, peut-on dire que cela est en accord avec la Révélation et le Magistère ?
    Dans la reformulation, la question devient double, car il est clair qu’une telle bénédiction ne concerne pas tant des personnes individuelles que l’homosexualité en tant que telle. En effet, la question est :  » Est-il possible que dans certaines circonstances un pasteur puisse bénir des unions entre personnes homosexuelles, impliquant ainsi que le comportement homosexuel en tant que tel ne serait pas contraire à la loi de Dieu et au chemin de la personne vers Dieu ?
    Et deuxièmement, par voie de conséquence, nous passons à tout acte sexuel hors mariage, homosexuel en particulier : est-ce toujours un péché objectivement et toujours grave ?
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  3. La troisième question concerne la synodalité, que certains considèrent comme une « dimension constitutive de l’Église ». Ne s’agit-il pas d’une subversion de l’ordre voulu par Jésus lui-même, selon lequel « l’autorité suprême de l’Église est exercée » par le pape et le collège des évêques ?
    Dans la reformulation, la question devient encore plus précise et actuelle : le Synode aura-t-il le pouvoir de passer outre l’autorité du Pape et du collège des évêques sur les sujets doctrinaux et pastoraux qu’il traitera ?
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  4. Le quatrième Dubium porte sur la possibilité de l’ordination sacerdotale des femmes, ce qui remet en cause à la fois la définition du sacerdoce ministériel, réaffirmée par le Concile Vatican II, et l’enseignement de saint Jean-Paul II qui avait déjà donné ce sujet comme réglé.
    Et dans la reformulation, la question est posée de savoir s’il n’y a pas cette possibilité dans l’avenir.
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  5. Le dernier Dubium concerne le pardon défini comme un  » droit de l’homme  » et l’absolution des péchés toujours et en tout état de cause, comme le pape François l’a insisté à plusieurs reprises. Peut-on être absous sans se repentir, en contradiction avec tout ce que l’Église a toujours enseigné ?
    En reformulant la question de manière encore plus précise : une personne peut-elle être sacramentellement absoute si elle refuse l’intention de ne pas commettre le péché confessé ?
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