J’aime bien Rino Cammilleri qui écrit (trop rarement) dans la NBQ, et qui tient un blog décalé, « Antidoti », dont chaque article tient en cinq lignes maximum, ce qui ne l’empêche pas de proposer des pensées souvent très profondes. Ici, en plus de l’écrivain au ton très personnel, c’est le catholique de « bout de banc » qui s’exprime, la voix du bon sens. Beaucoup se reconnaîtront dans ces réflexions sur ce Synode « inutile » qui marque une nouvelle évolution d’une Eglise qui n’a plus rien à dire au monde à force de vouloir lui parler..

Publication de l’Instrumentum laboris sur les gays, les femmes et les prêtres mariés. C’est l’acte qui prépare l’assemblée d’octobre

L’inutile « synode arc-en-ciel » : que l’Eglise parle peu (et clair)

Rino Cammilleri

Quand on regarde les grands convertis de l’histoire (St Paul, St Augustin…), on se rend compte que ce sont des gens qui étaient bien là où ils étaient mais qui ont dû se rendre à quelque chose de plus fort qu’eux et que leurs constructions : l’évidence. Ou la vérité, comme ils l’appelaient. Et à partir de ce moment-là, ils ont préféré se faire tuer pour la proclamer. Je suis moi aussi un converti. Pas un grand, bien sûr, mais moi aussi j’étais bien là où j’étais avant de devoir faire face à des torrents de trolls, de haineux et d’insulteurs (dont vous trouverez certains ci-dessous, parmi les commentaires).

Je suivais [Marco] Pannella avant de tomber sur le chemin de Damas. Et, comme saint Paul et saint Augustin, ne sachant rien de ce qui m’avait foudroyé, j’avais besoin de quelqu’un pour m’expliquer, pour me dire quoi faire ensuite, comment me comporter, comment vivre (le pourquoi, désormais, je le savais). J’ai découvert que c’était à cela que servait l’Église. Le Christ, si on veut le mettre au rang des grands fondateurs de religions, n’avait rien laissé d’écrit. Il avait seulement formé son staff qu’il avait instruit pendant trois ans avant de s’en aller. C’est-à-dire qu’il avait créé une Église. A qui il avait confié toutes les tâches. Avec l’assistance de l’Esprit. En fait, dans l’instruction de trois ans, beaucoup de choses avaient été omises. Et tout de suite, les apôtres se sont retrouvés à décider d’une chose sur laquelle le Christ n’avait laissé aucune directive : les païens devenant chrétiens, devaient-ils être circoncis ou non ? Les apôtres, après avoir consulté l’Esprit, ont décidé que non. Et nous, les garçons, nous leur en sommes reconnaissants.

Eh bien, j’ai eu la chance de me convertir alors que l’Église était encore celle du Concile de Trente, qui avait le don de parler court et clair : « Si quis dixerit…anathema sit ». Si quelqu’un dit telle ou telle chose, qu’il soit anathème ».

La vie d’un chrétien qui veut se comporter comme tel est déjà assez difficile sans être compliquée par le flou et l’indéfini. Oui, non, boh, et j’en passe [propos effectivement tenus par François, ndt]: tel semble être le style actuel. L’important est de ne pas faire de prosélytisme (ça veut dire quoi?) et de s’entendre avec tout le monde. Le dernier Concile n’était que « pastoral », essayant de répondre à l’homme moderne d’il y a soixante-dix ans. Et d’un langage rigoureux, on est passé à des catéchismes de huit cents pages, alors que le précédent n’en comptait que dix. On est également passé à la messe que tous peuvent comprendre, de sorte que si l’on traverse, disons, l’Espagne, on l’entend en catalan, en castillan, en basque. Je l’entends en italien et, comme ce que j’entends est toujours identique, je pense aux chansons des Beatles qui, précisément par manque de connaissance de l’anglais, étaient pleines de charme (sinon, c’étaient des textes insignifiants). Mais passons.

Nous voici au fameux Synode, qui durera – pensez donc – deux ans. Ouvrira-t-il au mariage gay ? Ouvrira-t-il la prêtrise aux femmes ? Ouvrira-t-il à Pincopallino [ndt: nom générique à connotation ironique ou péjorative, en français, on dirait Tartempion… ou Dugland!] à condition qu’il soit écolo? Avec toutes ces ouvertures, les pères – et les mères – synodaux vont avoir du grain à moudre! Bah, l’important, c’est de synoder. Même le fameux Instrumentum laboris (et qui sait pourquoi ils ont utilisé le latin au lieu des tonnes de langues nationales ; veulent-ils discriminer ?) semble avoir été conçu exprès pour que seuls eux puissent le lire. Peut-on imaginer un croyant ordinaire assis sur son banc froid, en train de compiler un exemplaire? Langage clérical, fumeux, émoussé, l’important est de s’aimer, de lancer des processus, deux pas en avant, un pas en arrière, et puis nous verrons, pas de chance, dans trois ans, nous aurons un autre synode.

Mais après, que signifie « synodalité » ?

Qu’ils devront s’épuiser en conférences plus ou moins permanentes ? Est-ce que ce sera le synode arc-en-ciel (demandent les journalistes) ? Personnellement, je ne le pense pas, ils laisseront toutes les voies ouvertes comme d’habitude. Oui, car si l’on laisse entrer certains, il est certain que d’autres partiront.

Reste la question: pourquoi les gays tiennent-ils tant à se marier ? Pourquoi les prêtres aussi ? Pourquoi les femmes sont-elles impatientes de devenir prêtres ? Si seulement il y en avait un qui était heureux à sa place!

Pour conclure. Pendant trente ans, j’ai tenu la rubrique « Le Saint du jour » dans Il Giornale et je sais que les grands réformateurs des ordres religieux ont fait fleurir des plantes sèches en les taillant et en les ramenant à leur austérité initiale. Ceux qui suivaient saint François et son extrême rigueur étaient-ils attirés par les animaux et l’environnement ? Padre Pio a-t-il attiré les foules par son approche synodale ? Allons donc…

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