« Les premiers jours des « vacances d’été » de la Curie romaine ont été marqués par deux changements radicaux : le démantèlement de la Congrégation pour la doctrine de la foi et un acharnement à assurer des majorités bergogliennes pour l’après-François ». Le commentaire de Giuseppe Nardi à l’annonce du consistoire et aux noms choisis par le Pape. Et la première interview de Fernandez à un média italien pour … La Repubblica.

François nomme plus de nouveaux électeurs du pape que jamais

UN NOUVEAU PRÉFET DE LA FOI DEVIENT CARDINAL – ET D’AUTRES RÉCOMPENSÉS

Giuseppe Nardi
katholisches.info
9 juillet 2023

Bien que le corps des électeurs dans un conclave soit en sureffectif, le pape François nommera en septembre 21 nouveaux cardinaux, dont 18 seront des électeurs du pape

(Rome) Le 1er juillet, en nommant son ghostwriter Mgr Victor Manuel Fernández préfet du dicastère romain de la foi, le pape François a entamé la transformation finale du Saint-Siège, car la Congrégation pour la doctrine de la foi représente une pièce maîtresse de la réforme de l’Eglise. Aujourd’hui, François a déjà annoncé, plus rapidement que prévu, l’élévation de son protégé au rang de cardinal.

Pendant dix ans, le pape argentin a tourné autour de la Congrégation pour la doctrine de la foi. On savait qu’il n’était pas tendre pour elle. Pour les milieux progressistes de l’Eglise, le « refuge des gardiens de la foi » figurait depuis longtemps en tête de la liste des institutions à abattre. François a suivi la voie des petits pas, sans se lancer dans une attaque frontale. Avec la mort de son prédécesseur Benoît XVI, le principal obstacle avait disparu. Son propre âge avancé a poussé François, qui semble toujours être un impulsif, à agir pour mettre en œuvre son plan de changement de paradigme irréversible.

Neuf jours seulement après la nomination de Fernández comme futur préfet de la foi, François a annoncé aujourd’hui la convocation d’un nouveau consistoire pour l’élévation au cardinalat, bien qu’il n’y en ait pas besoin. Actuellement, l’Église dispose de 121 électeurs papaux qui auront le droit de vote dans un éventuel conclave. Le pape Jean-Paul II a fixé le nombre maximum d’électeurs à 120. La définition qu’il a donnée est claire. Il ne doit pas y avoir au moins, mais au plus 120 cardinaux électeurs. Depuis son élection, François transforme systématiquement le corps électoral dans son sens. Cette transformation a toujours été trop lente pour lui, c’est pourquoi il a déjà créé par le passé plus de cardinaux que ne le permettrait la limite maximale.

Le consistoire convoqué aujourd’hui par François aura lieu le 30 septembre. D’ici là, deux cardinaux atteindront l’âge de 80 ans, ce qui ramènerait le nombre d’électeurs du pape à 119, soit un seul porteur de la pourpre de moins que le nombre maximal. François a toutefois annoncé aujourd’hui la nomination de pas moins de 18 nouveaux électeurs pontificaux, un nombre jamais atteint auparavant. Le nombre total d’électeurs du pape passera ainsi à 137 :

François enfreint une autre loi non écrite de l’Église en créant cardinal l’archevêque José Cobo Cano de Madrid, bien que son prédécesseur, le cardinal Carlos Osoro Sierra, n’atteigne l’âge de 80 ans qu’en 2025, ce qui signifie que deux archevêques de Madrid participeront d’ici là à un éventuel conclave en tant qu’électeurs du pape.

Parmi les nouveaux nommés figurent trois diplomates du Vatican dans les rangs desquels François a recruté une garde prétorienne, dont Mgr Emil Paul Tscherrig, nonce apostolique pour l’Argentine à l’époque où il a été élu pape, qu’il a nommé nonce pour l’Italie en 2017, et Mgr Christophe Louis Yves Georges Pierre, nonce pour les États-Unis, que François a nommé après la retraite de l’archevêque Carlo Maria Viganò. L’Italie et les Etats-Unis sont deux nonciatures clés qui revêtent une importance capitale pour l’Eglise. François apprécie la loyauté, y compris envers un confrère jésuite, le père Ángel Sixto Rossi [qui figure dans la liste], qu’il avait nommé archevêque de Cordoba en Argentine en 2021.

Presque sans exception, tous les futurs porteurs de la pourpre ont été nommés par François à leurs postes actuels.

L’une des particularités de cette annonce est que parmi les futurs cardinaux se trouve Mgr Agostino Marchetto. Cet ancien diplomate du Vatican est un ami personnel de longue date de François. De 2001 à 2010, il a été secrétaire du Conseil pontifical pour les migrants. Mais ces dernières années, il s’est surtout fait remarquer comme l’un des apologistes les plus actifs d’une « herméneutique de la continuité » du pape Benoît XVI. Selon la biographie publiée aujourd’hui par le Saint-Siège, il a demandé, à l’âge de 70 ans, à être déchargé de sa fonction au sein du Conseil des migrants afin de pouvoir se consacrer entièrement « à l’étude du Concile Vatican II » : le pape François le considère comme le plus grand herméneute du Concile Vatican II . Cette connexion a déjà étonné à plusieurs reprises ces dernières années et a suscité la confusion.

Selon toute vraisemblance, la solution de l’énigme est à chercher dans le fait que pour François, les catégories des anciennes oppositions à l’interprétation du Concile ne jouent plus aucun rôle, raison pour laquelle le terme de « continuité » a une toute autre signification que pour les représentants de « l’école de Bologne », qui opposait la continuité comprise de manière « restaurative » à la rupture [plus vraisemblablement, selon moi, François n’est pas à une contradiction près, il peut dire tout et le contraire de tout quand cela ne lui coûte rien, et là, il a probablement remercié un « ami ». Sur les relations entre Marchetto et François, voir Sandro Magister en 2013]. Mgr Marchetto a eu 80 ans en 2020, lui et deux autres cardinaux n’auront plus le droit de vote dans un conclave.

Ce n’est probablement qu’au tournant de l’année 2024/25 que le nombre maximal d’électeurs du pape sera à nouveau inférieur [au seuil]. Le grand nombre de nouveaux cardinaux souligne le fait que François estime que le temps lui est compté et qu’il veut s’assurer que le « processus » entamé avec lui se poursuive après lui.

Le nouveau préfet de la foi a accordé sa première interview dans un média italien au quotidien de gauche La Repubblica, le « seul » quotidien que François lit quotidiennement – une déclaration qui n’est plus répétée depuis quelque temps, mais atténuée, car elle a fait l’objet de critiques considérables. Le choix du média n’a donc pas été fait au hasard. A la question de savoir si, selon le mandat de François, il ne fallait effectivement plus s’attendre à ce que « les erreurs dans la doctrine soient corrigées », Mgr Fernández a répondu dans un sens anti-autoritaire :

« Le sens profond de ces paroles n’est pas de faire un commentaire historique. Il est clair que le Vatican ne se comporterait pas aujourd’hui comme il le faisait à l’époque de l’Inquisition. Ce que François exprime, c’est que la doctrine ne doit pas tant être traitée par le contrôle, la sanction, l’interdiction, mais surtout en élargissant notre compréhension de celle-ci, en l’approfondissant et en mettant en valeur toute sa richesse dans l’étude et le dialogue entre les théologiens, mais aussi dans le dialogue avec le monde contemporain ».

Capture d’écran Giuseppe Nardi
https://www.repubblica.it/

….

Dans l’ensemble, Mgr Fernández s’est montré très « dans l’air du temps », ce qui a amené La Repubblica à titrer : « Plus de pouvoir aux femmes. En ce qui concerne les couples homosexuels, l’Eglise ne peut pas seulement interdire« .

Les premiers jours des « vacances d’été » de la Curie romaine ont été marqués par deux changements radicaux : le démantèlement de la Congrégation pour la doctrine de la foi et un acharnement à assurer des majorités bergogliennes pour l’après-François.

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