Comme il le fait souvent, AM Valli, après avoir proposé à ses lecteurs un texte roboratif et inspirant, ouvre un débat. Les lecteurs écrivent (je suppose qu’il trie les réponses car elles sont généralement d’un très bon niveau) et proposent leurs commentaires, leurs suggestions. C’est donc une sorte de « salon » virtuel, dans le meilleur sens du terme, mettons celui que l’on donnait à ce mot au XVIIIe siècle, la technologie d’aujourd’hui en plus (qui osera dire après cela qu’internet est un fléau?). Cette fois, le point des départ est un article de The Wanderer que j’ai traduit ici, et qui prenait acte de la décomposition de l’Eglise (bergoglienne, spécialement)

L’un des lecteurs propose, en guise de réponse à la question « Que faire » un texte de Louis Bouyer, et deux textes de Joseph Ratzinger, l’un du cardinal, l’autre du Pape. Ce sont ces deux derniers que je reprends ici:

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(…) Rappelons qu’avec saint Jean-Paul II, puis avec Benoît XVI, l’Église a été invitée à la « nouvelle évangélisation, nouvelle dans son ardeur, ses méthodes et ses expressions ».

Voici un texte tiré de L’elogio della coscienza (Cantagalli, 2009) [je ne sais pas dans quel recueil le texte est paru en français] de Joseph Ratzinger, qui repropose une conférence donnée à Sienne en 1991, à laquelle j’ai eu la joie d’assister.

(…) Un jour, un collègue plus âgé, très préoccupé par la situation des chrétiens à notre époque, a exprimé l’opinion, au cours d’une discussion, que nous devrions vraiment être reconnaissants à Dieu d’avoir permis à tellement d’hommes d’être non-croyants en toute conscience. Car si leurs yeux s’étaient ouverts et s’ils étaient devenus croyants, ils n’auraient pas pu, dans un monde comme le nôtre, porter le fardeau de la foi et des devoirs moraux qui en découlent. Maintenant, par contre, dès lors qu’ils empruntent un autre chemin en toute bonne conscience, ils ne peuvent pas moins accéder au salut.

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Ce qui m’a étonné dans cette affirmation, ce n’est pas d’abord l’idée d’une conscience erronée accordée par Dieu lui-même pour sauver les hommes par ce stratagème, l’idée, en quelque sorte, d’un aveuglement envoyé par Dieu lui-même pour le salut des personnes en question. Ce qui m’a dérangé, c’est l’idée que la foi est un fardeau difficile à porter et qu’elle ne convient qu’aux natures particulièrement fortes : presque une forme de punition, la foi, loin de rendre le salut plus accessible, le rendrait plus difficile.

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Heureux donc celui qui n’a pas le fardeau de devoir croire et de se soumettre au joug moral qu’implique la foi de l’Église catholique. La conscience erronée, qui permet de vivre plus facilement et indique une voie plus humaine, serait donc la vraie grâce, la voie normale du salut. La non-vérité, l’éloignement de la vérité, serait meilleure pour l’homme que la vérité. Ce n’est pas la vérité qui le libérerait, mais il faudrait qu’il s’en libère. L’homme serait plus à l’aise dans les ténèbres que dans la lumière, la foi ne serait pas un beau cadeau du bon Dieu, mais plutôt une malédiction.

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Dans ces conditions, comment la joie pourrait-elle naître de la foi ? Qui aurait même le courage de transmettre la foi aux autres ? Ne vaudrait-il pas mieux leur épargner ce fardeau ou même les en préserver ?

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Au cours des dernières décennies, de telles conceptions ont visiblement paralysé l’élan de l’évangélisation. Ceux qui conçoivent la foi comme un lourd fardeau, comme l’imposition d’exigences morales, ne peuvent pas inviter les autres à croire, ils préfèrent les laisser dans la liberté supposée de leur bonne foi.

Je crois que de nombreux membres de l’Église qui occupent aujourd’hui des postes à haute responsabilité sont des disciples du collègue anonyme du professeur Joseph Ratzinger.

Alors que faire ? Voici quelques passages d’un discours prononcé par le pape Benoît XVI devant les communautés du Chemin néocatéchuménal le 20 janvier 2012.

Apporter le Christ aux hommes et apporter les hommes au Christ: tel est ce qui anime toute œuvre évangélisatrice. Vous l’accomplissez sur un chemin qui aide à faire redécouvrir à celui qui a déjà reçu le baptême, la beauté de la vie de foi, la joie d’être chrétiens. Le fait de «suivre le Christ» exige l’aventure personnelle de la recherche de sa Personne, d’aller avec Lui, mais comporte également de sortir de l’enfermement du moi, de briser l’individualisme qui caractérise souvent la société de notre temps, pour remplacer l’égoïsme par la communauté de l’homme nouveau en Jésus Christ. Et cela se produit dans une profonde relation personnelle avec Lui, dans l’écoute de sa parole, en parcourant le chemin qu’il nous a indiqué, mais cela a lieu également indissociablement en croyant avec son Eglise, avec ses saints, chez qui se fait toujours à nouveau connaître le véritable visage de l’Epouse du Christ.

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C’est un engagement — nous le savons — qui n’est pas toujours facile. Vous êtes parfois présents dans des lieux qui nécessitent une première annonce de l’Evangile, la missio ad gentes ; souvent, en revanche, dans des zones qui, bien qu’ayant connu le Christ, sont devenues indifférentes à la foi: le sécularisme y a éclipsé le sens de Dieu et voilé les valeurs chrétiennes. Que votre engagement et votre témoignage soient là comme le levain qui, avec patience, en respectant les temps, avec sensus Ecclesiae, fait croître toute la masse. L’Eglise a reconnu dans le Chemin un don particulier que l’Esprit Saint a donné à notre époque et l’approbation des Statuts et du « Directoire catéchétique » en sont un signe. Je vous encourage à offrir votre contribution originale à la cause de l’Evangile. Dans votre œuvre précieuse recherchez toujours une profonde communion avec le Siège apostolique et avec les pasteurs des Eglises particulières dans lesquelles vous êtes insérés: l’unité et l’harmonie du Corps ecclésial sont un important témoignage au Christ et à son Evangile dans le monde dans lequel nous vivons.

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Chères familles, l’Eglise vous remercie; elle a besoin de vous pour la nouvelle évangélisation. La famille est une cellule importante pour la communauté ecclésiale, où l’on se forme à la vie humaine et chrétienne. C’est avec une grande joie que je vois vos enfants, de nombreux enfants qui vous regardent, chers parents, qui regardent votre exemple. Une centaine de familles sont prêtes à partir pour 12 missions ad gentes. Je vous invite à ne pas avoir peur : celui qui apporte l’Evangile n’est jamais seul. Je salue avec affection les prêtres et les séminaristes : aimez le Christ et l’Eglise, transmettez la joie de l’avoir rencontré et la beauté de tout Lui avoir donné. Je salue également les itinérants, les responsables et toutes les communautés du Chemin. Continuez à être généreux avec le Seigneur : son réconfort ne vous fera jamais défaut !

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https://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/speeches/2012/january/documents/hf_ben-xvi_spe_20120120_cammino-neocatecumenale.html
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