Les JMJ se sont achevées hier. Ces journées imaginées par Jean-Paul II en 1984 (dans un autre contexte pour l’Eglise et pour le monde) ont draîné sans aucun doute des foules immenses, et suscité la surprise des observateurs, obligés de constater que le catholicisme n’est pas mort (au moins comme réalité sociologique et quelle que soit la forme qu’il revêt).

Sous cet angle, c’est donc une bonne chose.

Je ne sais pas si cela vaut la peine de relancer les reportages du type « choses vues », car chacun a vu « ses » JMJ personnelles, c’est-à-dire un tableau extrêmement fragmentaire d’un ensemble gigantesque (et ce n’est pas comme un puzzle, en assemblant les fragments, on n’obtient pas l’ensemble), plus proche de l’idée qu’il se faisait de l’évènement AVANT que de la réalité (il y a eu de beaux moments, par exemple la ferveur des jeunes lors de l’adoration eucharistique…. mais aussi la « drague » sur la plage, relatée par l’envoyée de Libé, dont on se demande ce qu’elle faisait là – cela ne l’a pas empêchée d’être reprise par Il Sismografo!).

Cela vaut aussi pour les discours, ou plutôt les mots du Pape.

A propos du Pape, l’autre fait marquant est comment il a vécu cela. Deux mois après une chirurgie très invasive, avec des séquelles probablement lourdes, il n’y a aucun doute qu’il a accompli un exploit au moins physique; ou plutôt, il a essayé de toutes ses forces de prouver au monde et à ses challengers impatients qu’il était encore capable de conduire la barque de Pierre. Pas pour le bien de l’Eglise, mais par orgueil, pour lui, pour laisser sa signature et son nom à ce qu’il croit être son oeuvre, par soif personnelle de pouvoir, un pouvoir auquel il s’accroche… comme un naufragé à une bouée (quelle différence avec l’humilité de Benoît XVI, dont je commence à comprendre pourquoi il s’est, ou se serait effacé). Ce qui ne manquera pas de relancer les rumeurs de démissions et le débat sur l’éméritat.

Voyons ce que dit Jean-Marie Guénois, qu’on ne peut soupçonner d’anti-bergoglianisme (ou alors il le cache bien), et qui a couvert l’évènement à la suite du Pape comme envoyé du Figaro. Si on laisse de côté les suppositions sur la vie spirituelle « soutenue » du Pape et la « beauté des exhortations profondes et mystiques » qu’il aurait préparées et qu’il n’a pas pu lire (il n’y a pas grand monde qui est dupe de cette pieuse fiction), c’est très révélateur, dès le titre:

UN DÉBUT DE DÉCLIN POUR UN PAPE COMBATIF MAIS USÉ

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À bientôt 87 ans, le pape François a accompli une sorte d’exploit physique et mental en affrontant le défi d’une rencontre de plusieurs jours avec des centaines de milliers de jeunes.

Il a l’âge d’en être non pas le grand-père, mais l’arrière-grand-père. Après Lisbonne, il devient d’ailleurs le pape le plus âgé ayant présidé des JMJ. Ce risque, il l’a assumé, à peine sorti de la lourde convalescence liée à une opération chirurgicale aux intestins du… 7 juin dernier. Deux mois jour pour jour après sa sortie du bloc opératoire de l’hôpital Gemelli, il se retrouvait devant plus de 1 million de jeunes à Lisbonne!

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Malgré une volonté de fer et une vie spirituelle soutenue, sa fatigue, visible, l’a publiquement rattrapé au fil de ces cinq jours intenses de déplacements et de rencontres.

Le programme n’avait pas été allégé, selon la volonté de François, comme lors des dernières JMJ de Jean-Paul II à Toronto, au Canada, en 2002. Mais au Portugal, il y a eu une surcharge évidente. Comme lors de la journée de samedi, où François s’est rendu en hélicoptère à Fatima – aller et retour dans la matinée -, enchaînant dans l’après-midi sa rencontre coutumière des voyages pontificaux avec ses frères jésuites, puis la veillée avec les jeunes jusqu’à 22 h 30.

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À quatre reprises, vendredi soir et samedi, le pape a laissé tomber son discours écrit, lisant au mieux le premier paragraphe puis improvisant, toujours de manière alerte et très éveillé, mais coupant au court. Tant et si bien que samedi soir, la belle exhortation, profonde et mystique, que François avait préparé pour les jeunes, s’est transformée en quelques conseils de vie, terre à terre, sur le fait de se «lever», «d’aider les autres», de «marcher ensemble», avec cet impératif: «l’unique moment où il est licite de regarder une personne de haut, c’est pour l’aider à se relever».

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François était fatigué d’une trop lourde journée. Dimanche matin, lors de la messe de clôture, il était reposé et, en grand orateur, il a plusieurs fois improvisé, restant en lien avec son homélie, objectivement en pleine possession de ses moyens après une nuit de repos. Mais dans l’après-midi, il s’est endormi devant des jeunes volontaires qui lui parlaient.
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Au cours de ces dix années de pontificat, François a le plus souvent tenu ses discours jusqu’au bout et s’il a improvisé, c’était pour revenir à son texte, ou le donner à lire, mais non pour l’annuler en cours de lecture, comme il l’a fait vendredi et samedi à Lisbonne. Cette répétition est un signal d’affaiblissement normal pour un homme public à ce point âgé et surchargé qu’il n’a aucun équivalent sur la planète. Il faudra observer de près le voyage de François en Mongolie, dans trois semaines, puis celui de Marseille, pour confirmer cet affaiblissement inscrit dans l’ordre du temps.

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https://ilsismografo.blogspot.com/2023/08/vaticano-lindeniable-regain-de-sante.html
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