Un autre livre dans la perspective du Synode, celui d’Andrea Gagliarducci, à paraître (en italien) en septembre. Au lieu de se focaliser sur les irrégularités qui ont marqué le parcours synodal, à commencer par l’Instrumentum laboris, et sur le rôle du pape et de son « cercle magique » (qui passeront), Andrea Gagliarducci (qui se définit comme un journaliste qui a décidé de travailler en tant que journaliste catholique) pose les vraies questions

Le véritable problème de l’Église n’est pas le fait qu’elle ne s’est pas ouverte au monde, mais plutôt que l’Église (..) s’est sécularisée, elle a perdu de vue son langage, son histoire, sa façon de faire…

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Le problème n’est pas de savoir si l’Église sera synodale ou non, il n’est pas dans la réforme des structures ou dans une réforme de l’écoute, il n’est pas dans une vie renouvelée de l’Église. Le problème est de savoir si l’Église croit encore en Jésus-Christ et à la manière dont elle a raconté Jésus-Christ pendant deux mille ans. Le problème est de savoir si l’Église veut être l’Église ou si elle veut répondre à des situations contingentes.

Présentation par l’éditeur

LE VRAI CŒUR DU CHEMIN SYNODAL
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La question est claire : le processus synodal initié par le pape François n’a pas d’ordre du jour, ni de conclusions prédéterminées. Il s’agit plutôt d’une ouverture de processus, à laquelle chacun est appelé à participer. L’Église sur le chemin souhaité par le pape est cependant confrontée à des défis qui seront cruciaux pour son avenir. Dans quelle mesure la synodalité est-elle inhérente à la vie de l’Église ? Et quel sera l’impact de cette nouvelle approche sur celle-ci ? Ce livre explore les expériences synodales d’aujourd’hui et d’hier et esquisse les défis que le peuple de Dieu sera appelé à relever dans les années à venir.
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www.ibs.it/chiesa-del-futuro-dieci-sfide-libro-andrea-gagliarducci

Le Synode est-il l’avenir de l’Église ?

Andrea Gagliarducci
vaticanreporting.blogspot.com
24 août 2023

Le processus synodal en cours, lancé par le pape François, qui est complexe, long et probablement irréversible, suscite de nombreuses questions. On se demande si et comment le Synode fera partie de la vie de l’Église, et comment une Église synodale peut réellement être créée. On se demande si l’Église synodale vise à changer la doctrine même de l’Église, ou si elle n’est qu’un forum de discussion. On évoque la possibilité que cette voie synodale ne soit pas vraiment telle, parce qu’en fin de compte, dans l’Eglise, tout doit être centralisé et que c’est toujours le pape qui décide. On souligne même que, dans le processus d’écoute, certaines voix n’ont pas été entendues. Il y a des tons critiques, des tons alarmistes, des tons très positifs, des tons excessivement positifs, des tons modérément positifs dans le débat.

Je ne suis qu’un journaliste, et je suis un journaliste qui a décidé de travailler en tant que journaliste catholique. C’est-à-dire que j’ai décidé de ne pas cacher mon point de départ et d’essayer d’écouter l’Église d’une manière différente. Nous avons beaucoup de débats sur l’Église qui relèvent de la sociologie, de la politique, du reportage. Nous comprenons mal le point de vue de l’Église, son histoire, le fait qu’elle se place dans une perspective d’éternité et jamais de contingence.

Dans la perspective de ce synode, j’ai vécu diverses expériences, j’ai parlé à beaucoup de gens, j’ai été impliqué et j’ai vécu de près beaucoup de débats. En tant que journaliste, je me suis posé des questions, et ces questions m’ont amené à esquisser des défis. Le résultat est un livre, intitulé “La Chiesa de futuro. Dieci sfide per i Sinodi che verranno”, qui sortira en septembre.

Ceux qui me lisent et savent ce que je pense ne seront pas surpris par ce qu’ils trouveront dans ce livre. On y retrouve beaucoup de choses que j’ai écrites ces dernières années dans divers articles et analyses, avec des thèmes qui reviennent toujours dans mon travail.

Dans l’une de ses toutes dernières apparitions publiques, si ce n’est la dernière, lors d’une rencontre à Cortina, Benny Lai [*], mon mentor, interrogé sur les scandales dans l’Église (c’était à l’époque de la publication de « Vatican SPA » par Gianluigi Nuzzi), a déclaré que le véritable problème de l’Église n’était pas le fait qu’elle ne s’était pas ouverte au monde, mais plutôt que l’Église avait perdu son propre langage. L’Eglise s’est sécularisée, elle a perdu de vue son langage, son histoire, sa façon de faire, et c’est pour cela qu’elle est confrontée à toutes sortes de scandales. Benny Lai, qui est né sceptique et non-croyant, ne croyait pas que la réponse de l’Église à la crise réside dans un changement de doctrine pour une Église plus ouverte et plus inclusive. Il pensait plutôt que l’Église serait sauvée si elle restait l’Église, avec son langage et le respect de son histoire et de ses symboles.

Nous en avons parlé ensemble par la suite, et il a fait des commentaires encore plus caustiques sur certaines situations qui restent dans mon cœur. Ses propos m’ont fait réfléchir, et longuement. Et de nombreux thèmes de cette conversation, développés au fil des années, se retrouvent dans ce livre.

Parce que le thème central, que je poursuis depuis longtemps, est précisément celui-ci : le problème n’est pas de savoir si l’Église sera synodale ou non, il n’est pas dans la réforme des structures ou dans une réforme de l’écoute, il n’est pas dans une vie renouvelée de l’Église. Le problème est de savoir si l’Église croit encore en Jésus-Christ et à la manière dont elle a raconté Jésus-Christ pendant deux mille ans. Le problème est de savoir si l’Église veut être l’Église ou si elle veut répondre à des situations contingentes.

Je trouve qu’il s’agit d’une question centrale dans le débat synodal actuel, qui ne peut être éludée. Toutes les questions débattues aujourd’hui doivent passer par ce cône. Il ne s’agit pas de donner de nouvelles priorités, mais de donner à chacun son rôle.

J’ai essayé de raconter cette histoire dans ce livre, avec le souci de ne pas être nécessairement une pars destruens, critique et caustique, mais plutôt de construire à partir de ce qui existe de manière positive. J’ai essayé de donner une vue d’ensemble du processus synodal en cours, en lisant tous les documents finaux des étapes continentales, en examinant la vitalité des Églises.

Je ne crois pas à l’idée d’une démocratisation de l’Église ou d’une écoute à tout prix, mais je crois au principe selon lequel chacun fait partie du royaume de Dieu et y est utile. Et je crois que l’idée que nous n’avons pas assez écouté auparavant est aussi très bonne pour la propagande, mais pas très vraie si vous regardez l’histoire de l’Église. Il y a des exemples de hiérarchies bloquées, mais aussi de grands exemples de hiérarchies ouvertes. Cela dépend de l’histoire, des contingences, des hommes. Mais si la synodalité est la vie de l’Église, alors l’Église a toujours été synodale. Il faut juste savoir comment appliquer l’adjectif.

Ces pages qui paraissent aujourd’hui ont donc pour tâche de donner une forme complète et concrète à de nombreuses réflexions. J’espère qu’elles seront utiles. Les thèmes à développer, après ce livre, sont nombreux. À commencer par celui de la communication, car de nombreuses questions concernent précisément la manière dont les hommes d’Église parlent de l’Église elle-même lorsqu’il y a des scandales ou simplement des difficultés.

En attendant, commençons par ces premiers éléments de réflexion. Sur cette page, j’informerai de la publication et des éventuelles présentations. Après tout, c’est un blog, et le blog, c’est aussi pour les choses personnelles.

Andrea Gagliarducci

Ndt

A propos de Benny Lai, voir ici (d’Andrea Gagliarducci):

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