« Le vademecum des pères synodaux recommande d’écouter tout le monde, mais surtout les ‘marginaux’, dont les polygames et les LGBTQ. La majorité, qui faisait autrefois la loi, aujourd’hui se tait ou acquiesce ». (Tommaso Scandroglio, La Bussola). Ainsi s’étend à l’Eglise un principe éminemment anti-démocratique déjà largement appliqué dans le monde laïc.

Techno-oligocratie

Le Synode sanctionne la dictature des minorités

Tommaso Scandroglio
La NBQ
28 septembre 2023

Citons cet extrait du vade-mecum du Synode sur la synodalité préparé par le Secrétariat du Synode :

« Il est important que nous fassions de notre mieux pour écouter les voix de tous, en particulier de ceux qui sont marginalisés. […] La synthèse devrait accorder une attention particulière aux voix de ceux qui ne sont pas souvent entendus et intégrer ce que nous pourrions appeler un ‘rapport de minorité’. […] La synthèse diocésaine doit refléter la diversité des points de vue et des opinions exprimés et accorder une attention particulière aux expériences vécues par les participants, qu’elles soient positives ou négatives. Les points de vue opposés les uns aux autres ne doivent pas être omis, mais reconnus et énoncés comme tels. Certains points de vue ne doivent pas être exclus simplement parce qu’ils ont été exprimés par une petite minorité de participants. En effet, parfois la perspective de ce que nous pourrions appeler un ‘rapport de minorité’ peut être un témoignage prophétique de ce que Dieu veut dire à l’Eglise » .

Quelles sont ces minorités marginalisées ? Le document de travail pour l’étape continentale du Synode « Élargis l’espace de ta tente » propose à cet égard la liste suivante :

« Parmi ceux qui réclament un dialogue plus incisif et un espace plus accueillant, nous trouvons aussi ceux qui, pour diverses raisons, ressentent une tension entre l’appartenance à l’Église et leurs propres relations affectives, comme : les divorcés remariés, les parents célibataires, les personnes vivant dans un mariage polygame, les personnes LGBTQ, etc… « .

Nous souvenant de la leçon de Rousseau, nous étions restés à l’idée que c’était la majorité et non la minorité qui dictait la loi. En réalité, dans les documents préparatoires du Synode, tout se tient de manière « hegelienne ».

Qu’entendons-nous par là?

Au Synode, comme dans presque tous les organes de décision politique dans le monde, les décisions seront prises à la majorité (et ensuite approuvées par le Saint-Père : un détail qui n’existe pas dans d’autres systèmes). Mais la majorité au synode, et c’est souvent le cas dans d’autres contextes séculiers, est conduite par un petit groupe de personnes qui impriment une certaine orientation aux choix de la majorité. Voilà une vraie minorité, certes pas marginalisée, mais dotée de grands pouvoirs. C’est ce qu’on appelle une oligocratie. Comme leurs Seigneuries usent de leur rôle qualifié, très bien identifié dans l’organigramme du Synode, pour faire le meilleur et le pire, cette oligocratie s’appelle technocratie. La techno-oligocratie est le vrai visage du Synode. La majorité n’en est que le masque.

Ces quelques personnes, dans le but d’introduire une nouvelle éthique et de nouvelles théologies non catholiques, prétendent, entre autres arguments, qu’il faut protéger les minorités, c’est-à-dire ceux qui vivent déjà en contradiction avec la doctrine correcte. Voici donc la référence aux minorités marginalisées. Ce n’est pas nouveau : pensez à Greta Thunberg et à ses disciples imberbes. On nous a fait croire que ces gamins peuvent tirer les oreilles des grands de ce monde, mais en réalité ce sont des personnages conçus par ces derniers et gérés par eux.

Mais cela ne s’arrête pas là. La prise en compte des demandes de la minorité dans l’assemblée synodale se fait dans un rapport dialectique avec la majorité d’où naît, comme nous le lisons dans le premier document, la synthèse.

Il s’agit d’un processus purement hégélien : thèse, antithèse, synthèse. Relisons le premier document cité :

« La synthèse […] devrait refléter la diversité des points de vue et des opinions exprimés […] tant positifs que négatifs ».

La synthèse, selon le philosophe allemand, est en effet quelque chose de nouveau, dans le sens où elle dépasse les deux moments antithétiques décrits ci-dessus, mais c’est une nouveauté qui préserve les éléments communs et élimine les différences. Et en effet, qu’écrit le Vademecum ?

« Les points de vue qui s’opposent ne doivent pas être omis, mais reconnus et déclarés comme tels ».

Qu’est-ce que cela signifie concrètement par rapport aux objectifs du synode ?

Cela signifie, par exemple, que si dans le passé la « famille » était uniquement constituée d’un homme et d’une femme mariés, en opposition aux unions libres, à la polygamie, aux relations entre personnes de même sexe et aux seconds mariages civils, dans un avenir proche, la nouvelle synthèse verra tous ces phénomènes sociaux enveloppés dans le titre de « famille ». La synthèse rassemble tout, en éliminant les différences particulières qui, auparavant, faisaient dire que telle relation était un péché et que telle autre ne l’était pas. De même, les différences entre les laïcs et les prêtres pour le célibat, entre les hommes et les femmes pour les ordres sacrés, entre l’homme et la bête pour la protection de la création, etc. doivent être éliminées. Le prétexte est que ces différences sont discriminatoires : mais en réalité, les différences, essentielles et accidentelles, identifient les personnes et les choses. Les processus révolutionnaires ont précisément cette caractéristique : tout uniformiser en faisant appel au principe d’égalité (en réalité, on parle d’égalitarisme), c’est-à-dire trouver une synthèse supérieure qui annule l’identité propre d’une personne, d’une entité, d’une condition, c’est-à-dire ses différences spécifiques.

En synthèse – c’est vraiment le cas de le dire – les passages mentionnés ci-dessus prouvent que la dynamique qui tissera les travaux du Synode sera la suivante : quelques hommes idéologisés dirigeront le consensus de la majorité, et donc le principe majoritaire ne sera brandi que pour se mettre à l’abri de la critique d’autoritarisme. Cette minorité hautement qualifiée prendra en compte les demandes des minorités sociales hétérodoxes. Par un processus dialectique, tout se tiendra – du mariage aux unions homosexuelles, du célibat à l’absence de célibat pour ceux qui veulent choisir cette voie, des femmes ordonnées aux femmes non ordonnées – et donc tout disparaîtra car, par exemple, si toute relation affective est le mariage, le mariage en tant qu’institution disparaîtra.

Il faut cependant noter que nous n’en sommes qu’au début de ce processus dialectique. Il est fort probable que les deux années du Synode ne se termineront pas, par exemple, par l’acceptation pastorale, claire et explicite de l’homosexualité et des femmes prêtres (doctrinalement, aucun changement ne pourra jamais avoir lieu car il s’agit de dogmes irréformables), mais ces deux années serviront à initier des processus, tout aussi dialectiques, pour que ces objectifs et d’autres puissent devenir une réalité sociale dans l’Église du futur.

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