Un très réjouissant article et une très fine analyse des nominations du dernier consistoire sur une site laïc (si l’on en croit son nom) français, Boulevard Voltaire. L’auteur, Georges Michel, ne hante sans doute pas les Palais sacrés, il n’est pas payé pour recueillir les ragots qui circulent derrière la muraille léonine, mais il pourrait en remontrer à pas mal de « vaticanistes » qui pontifient dans les médias, en particulier français. Tout en cultivant un humour de bon aloi et la distanciation nécessaire que requiert le statut « laïc » de BV.

Samedi 30 septembre, la fête était belle [ndr; c’est la seule erreur, juste factuelle, et qui peut passer pour de l’humour], sur le parvis de la basilique Saint-Pierre de Rome. Le pape François a posé la barrette écarlate sur 21 têtes, créant ainsi 21 nouveaux princes de l’Église. Le pape ne nomme pas mais crée les cardinaux, selon la formule consacrée. Au verbe « créer » correspond à merveille le substantif « créature »… Certes, c’est, dit-on, le Saint-Esprit qui agit, lorsqu’en conclave les cardinaux élisent un nouveau souverain pontife, mais Bergoglio, qui est avant tout un politique, sait bien qu’il faut lui donner un petit coup de main, à ce sacré Saint-Esprit !

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Une majorité posthume écrasante

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Et il faut avouer que François n’a pas ménagé sa peine depuis qu’il a été élu, il y a maintenant plus de dix ans. Avec cette nouvelle promotion, neuvième consistoire de son pontificat, François a créé 143 cardinaux, dont 113 électeurs, s’assurant une majorité posthume écrasante dans le collège cardinalice qui élira le futur pape : plus de 75 % de ces prélats lui doivent la pourpre !

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Certes, l’élection d’un pape ne marche pas à coups de retour d’ascenseur, comme celle, parfois, d’un président de conseil départemental, d’autant qu’une fois mort, on est généralement peu sensible à l’ingratitude de ses créatures qui, d’ailleurs, le savent très bien.

Mais en nommant à tour de bras des prélats acquis à sa sensibilité, même si on n’est jamais sûr de rien dans une élection, cela permet d’envisager les choses sereinement pour après.

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Les cardinaux électeurs nommés par Benoît XVI ne sont plus que 24, par Jean-Paul II, 9. Certes, comme disait Alphonse Alais, « on a beau dire, plus ça ira et moins on rencontrera de gens ayant connu Napoléon », mais ce Grand Remplacement ressemble à s’y méprendre à un bourrage des urnes. Les âmes les plus charitables diront que c’est préparer sa succession. Il y a tellement de gens qui ne savent pas préparer la leur, dans nos familles, nos nations… Les moins charitables diront que c’est la verrouiller, façon ceinture et bretelles.

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Fuite en avant

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Après ce qu’on pourrait appeler une tentative de restauration avortée sous le pontificat de Benoît XVI, on a comme le sentiment, aujourd’hui, d’une fuite en avant vertigineuse, d’une marche accélérée vers l’irréversibilité, avec ce pape pressé. Irréversibilité, on l’a bien vu, avec l’affirmation que la réforme liturgique issue du concile Vatican II était justement « irréversible ». Pressé, ce pape, car il sait que le temps lui est compté, que son avenir personnel ici-bas est derrière lui.

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Vers l’irréversibilité mais aussi vers l’inconnu : jusqu’où ira l’Église catholique ? Mariage des prêtres, ordination des femmes, mariage homosexuel ? À ce sujet, on ne va pas embêter nos lecteurs avec des histoires de sacristie, mais l’on voit, que le doute existe et qu’il s’est exprimé très officiellement par le truchement de cinq cardinaux réputés conservateurs, dont Robert Sarah et Raymond Burke. Un doute, notamment, « sur l’affirmation que la pratique répandue de bénir les unions de personnes de même sexe est en accord avec la Révélation et le Magistère »La réponse du pape exclut, certes, le mariage homosexuel dans l’Église mais entrouvre, en quelque sorte, la porte en précisant que « la prudence pastorale doit donc discerner correctement s’il existe des formes de bénédiction, demandées par une ou plusieurs personnes, qui ne véhiculent pas une conception erronée du mariage ».

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Le confusionnisme en perspective ?

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Certes, ces doutes n’ont été exprimés que par cinq cardinaux, mais comme on sait que dans toute bergerie, il y a plus de moutons frileux que de pasteurs intrépides, on peut imaginer que ces doutes sont partagés, sinon par une majorité silencieuse, du moins par un grand nombre d’hommes d’Église.

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