Selon des rumeurs qui circulent, mais n’ont pas été confirmées, il aurait été reconsacré évêque par le trouble Mgr Williamson, A vrai dire, il n’y aurait rien de vraiment nouveau, ce n’est pas comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. Mgr Vigano a déjà été très loin, et à ce stade, on ne peut plus parler d’opposition, mais au minimum de sécession. Riccardo Cascioli a enquêté, et il nous fait part de ses réserves, citant Benoît XVI dans la lettre consacrée aux abus sexuels et publiée en avril 2019 : « Que devons-nous faire ? Devons-nous créer une autre Église pour que les choses puissent s’arranger ? Cette expérience a déjà été faite et elle a déjà échoué. Seuls l’amour et l’obéissance à notre Seigneur Jésus-Christ peuvent nous montrer le bon chemin ».

Trois remarques:

  1. François a tout fait pour créer le schisme (si schisme il y a), et sans doute même était-ce ce qu’il souhaitait dès le début. Dans l’Eglise « en sortie » qu’il a appelée de ses vœux, ce sont les fidèles à la doctrine qui doivent sortir. Si son intention était de créer une nouvelle église, il ne s’y prendrait pas autrement. Et Mgr Vigano ne serait qu’une victime.
  2. La comparaison entre l’ex-nonce à Washington et Mgr Lefebvre n’est pas appropriée. Quand le second a accompli le geste définitif de 1988, le Pape était Jean-Paul II, et le préfet de la Doctrine de la foi, nul autre que… le cardinal Ratzinger! C’est évidemment une différence abyssale.
  3. Reste que l’alliance avec le sulfureux Williamson laisse une impression de malaise.

La crise engendre des schismes : c’est maintenant au tour de Mgr Viganò.

Riccardo Cascioli
La NBQ
11 janvier 2023

La reconsécration épiscopale annoncée marque un point de non-retour pour Mgr Carlo Maria Viganò, ancien nonce apostolique aux États-Unis et grand accusateur du pape François dans le scandale McCarrick. Et après avoir procédé à des ordinations sacerdotales illicites dans toute l’Europe, il fera d’une structure monastique à Viterbe le centre de son mouvement. Une réponse erronée et infructueuse à la crise de l’Église.

La rumeur circulait déjà depuis quelques mois et voilà que la nouvelle est relancée par certains sites traditionalistes : Mgr Carlo Maria Viganò a été reconsacré évêque par Mgr Richard Williamson, l’évêque anglais ordonné illicitement par Mgr Marcel Lefebvre en 1988 puis expulsé de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X (FSSPX) en 2012. Depuis, Williamson, qui est excommunié, s’est consacré à la fondation d’un réseau de groupes appelant à la résistance contre toute tentative de normalisation des relations avec l’Église catholique romaine.

La reconsécration épiscopale de Mgr Viganò, « sub condicione », signifie que l’ancien nonce apostolique aux États-Unis s’est convaincu de la thèse (d’abord soutenue puis rejetée par Lefebvre) selon laquelle tous les sacrements administrés après le Concile Vatican II sont « douteux », c’est-à-dire que leur validité ne serait pas certaine en raison des déviations doctrinales opérées par le Concile lui-même.

Malgré quelques démentis circulant en ligne, plusieurs sources ont confirmé cette démarche « schismatique » de Mgr Viganò. Et lui-même, interrogé par Bussola dans un courriel, n’a pas voulu démentir la nouvelle, se déclarant seulement étonné de l’intérêt que nous portons actuellement à ses affaires personnelles. Par conséquent, si la nouvelle était officiellement confirmée, Mgr Viganò serait excommunié latae sententiae.

Cette démarche de Mgr Viganò, aussi spectaculaire soit-elle, n’est certainement pas un coup de tonnerre : devenu soudainement célèbre en août 2018 avec sa dénonciation publique contre le pape François, accusé d’avoir couvert le cardinal Theodore McCarrick, auteur de multiples abus, malgré la connaissance de la gravité des faits le concernant, Mgr Viganò a progressivement élargi l’horizon de ses critiques : certes ecclésiales – à l’ensemble du pontificat de François, à ses prédécesseurs, jusqu’au rejet substantiel du Concile Vatican II -, mais aussi politiques et économiques en tentant même de se placer à la tête d’un mouvement altermondialiste international. Avec des tons de plus en plus enflammés et des jugements de plus en plus sévères (« Le pape François est un faux pasteur et un serviteur de Satan », a-t-il déclaré il y a vingt jours à propos du feu vert donné aux bénédictions d’unions homosexuelles), Viganò a accompagné ses paroles d’actes, tissant un réseau de relations qui a culminé en mai dernier avec l’annonce officielle de la naissance d’une association qu’il a parrainée, Exsurge Domine. L’objectif affiché : apporter une aide financière et logistique aux prêtres et religieux victimes de harcèlement de la part de leurs évêques ou supérieurs, un phénomène décidément très répandu sous ce pontificat.

En réalité, derrière cette façade aux relents d’ « aide blanche » ecclésiastique, se cachent aussi des manœuvres économiques et immobilières opaques, qui impliquent également une ancienne Société de vie apostolique, Familia Christi, d’abord commissariée puis dissoute par la Congrégation pour la doctrine de la foi en décembre 2019, et les bénédictines de Pienza (monastère « Marie Temple du Saint-Esprit ») protagonistes d’un différend avec l’archevêque de Sienne, le cardinal Augusto Paolo Lojudice.

Nous reviendrons avec d’autres articles sur cette affaire qui mérite d’être étudiée en profondeur, mais ici il est important de comprendre comment Exsurge Domine se présente comme une tentative de consolider et d’institutionnaliser ce réseau de résistance anti-François qui a vu Viganò ces deux dernières années ordonner des prêtres de manière clandestine et anonyme et créer des communautés dans toute l’Europe. Des faits très graves dont les preuves sont nombreuses : comme l’ordination en 2021 de deux moines en France au monastère Saint-Benoit de Brignoles, diocèse de Fréjus-Tolon, usurpant illicitement le droit-devoir de filtrer les vocations de l’évêque Dominique Marie Jean Rey, lui-même victime de la foudre vaticane.

Il y a eu plusieurs autres ordinations illicites et clandestines par Mgr Viganò, les prêtres étant ensuite livrés à eux-mêmes, obligés de célébrer seuls chez eux, n’ayant aucun mandat. Mais un cas retentissant mérite au moins d’être mentionné : celui du diocèse de Milan, où un curé d’un petit village périphérique est aidé par l’ancien nonce apostolique à mettre sur pied une sorte de séminaire paroissial clandestin qui suit le rite extraordinaire. Au début, un jeune homme de 20 ans, sans formation théologique ni âge minimum requis par le droit canon, est ordonné diacre. Mais ensuite, au printemps 2023, les relations se rompent entre Viganò et le groupe ambrosien : Viganò refuse d’ordonner prêtre le nouveau diacre, qui reste donc dans les limbes.

Ces derniers mois, des rumeurs insistantes ont également fait état d’une consécration épiscopale déjà réalisée par Mgr Viganò, mais nous n’avons encore trouvé aucune confirmation certaine que cela ait déjà eu lieu, même si cette intention – à l’instar de ce qu’a fait Mgr Marcel Lefebvre en 1988 – a été clairement exprimée. Mgr Viganò aura 83 ans la semaine prochaine et ressent manifestement le besoin d’agir rapidement pour consolider sa réalité.

Ainsi, le 2 décembre dernier, il a annoncé que dans la structure monastique de l’Eremo della Palanzana à Viterbe, qui est en train d’être rénovée grâce à l’argent récolté dans le cadre d’une campagne de collecte de fonds visant initialement à donner un lieu aux religieuses de Pienza, une maison de formation pour les clercs sera établie, qui prendra le nom de Collegium Traditionis. Cet ermitage abrite actuellement les quatre clercs de l’ancienne Familia Christi, qui partagent avec Mgr Viganò le projet et l’opération commerciale-immobilière susmentionnée, que nous traiterons dans les prochains jours.

En bref, Viterbe, dans les desseins de Mgr Viganò, qui y passe déjà beaucoup de temps, devrait devenir le nouvel Écône, la ville suisse qui est le siège du séminaire international de la FSSPX. Et avec la nouvelle de la reconsécration épiscopale, la nature schismatique de ce nouveau mouvement devient encore plus claire. Grâce au consensus construit ces dernières années autour de la figure de Mgr Viganò, le souffre-douleur de ce pontificat, il est facilement prévisible que cette initiative conduira elle aussi de nombreux croyants hors de l’Église, et de surcroît en conflit avec d’autres initiatives de ce type.

Tel est le drame que vit l’Église : à la crise provoquée par ceux qui s’entêtent à vouloir renverser la doctrine révélée s’opposent des personnalités qui, à leur tour, bien que partant d’analyses justifiables, s’illusionnent sur le fait qu’elles trouveront une solution dans la construction d’une Église à leur mesure. Une voie qui a déjà échoué, comme l’a écrit Benoît XVI dans sa lettre-réflexion consacrée aux abus sexuels et publiée en avril 2019 :

« Que devons-nous faire ? Devons-nous créer une autre Église pour que les choses puissent s’arranger ? Cette expérience a déjà été faite et elle a déjà échoué. Seuls l’amour et l’obéissance à notre Seigneur Jésus-Christ peuvent nous montrer le bon chemin ».

Et cet amour et cette obéissance viennent de la persévérance dans la Vérité au sein de l’Église catholique.

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