A propos de Fiducia Supplicans, Ed Pentin a interrogé « don » Nicola Bux, théologien éminent, ex-consultant de la CDF et proche de Benoît XVI. Selon lui, le soupçon d’ignorance et de mauvaise foi pèsera sur Fernandez dans tout document qu’il signera par la suite. Il devrait démissionner. Et François devrait annuler Fiducia Supplicans et remplacer le préfet par un homme à la « doctrine sûre, solide et pure ».

Don Bux : « Fiducia Supplicans » n’appartient pas au magistère authentique, appel au cardinal Fernández à démissionner.

Selon l’ ex- consulteur du Dicastère pour la Doctrine de la Foi, parce que Fiducia Supplicans  » n’appartient pas au Magistère authentique « , elle n’est pas contraignante et donc « on ne peut pas y adhérer avec l’assentiment religieux de la volonté et de l’intellect ».

Il a également demandé la démission ou la destitution de son principal auteur, le cardinal Víctor Manuel Fernández, car « le soupçon d’ignorance et de mauvaise foi pèsera sur [lui] dans tout document qu’il signera par la suite. »

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Dans une interview accordée à ce site le 18 janvier, don Nicola Bux, théologien respecté et ami du défunt pape Benoît XVI, a évoqué les retombées de la publication de la déclaration qui autorise les bénédictions entre personnes de même sexe sous certaines conditions.

Fiducia Supplicans, approuvée par le pape François, a été signée par le cardinal Fernández, préfet du dicastère de la doctrine de la foi, et le secrétaire du dicastère, Mgr Armando Matteo, et publiée le 18 décembre.

Don Bux explique comment le document a été reçu en Italie, ce qu’il a pensé du communiqué de presse du 4 janvier visant à clarifier la déclaration, et ce que tout cela pourrait signifier pour l’avenir de l’Église et le prochain conclave.

« Le drame de l’Église aujourd’hui, c’est la séparation de la pastorale et de la doctrine, c’est-à-dire de l’amour et de la vérité », explique don Bux. « Et nous le payons très cher, comme l’avait prédit Jean-Paul II ».

« Le pape François devrait annuler Fiducia Supplicans et remplacer le préfet par un homme à la « doctrine sûre, solide et pure », pour reprendre les mots de l’apôtre à Tite. »

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Père Bux, quelle a été la réaction générale à Fiducia Supplicans en Italie – majoritairement contraire, selon vous, favorable ou ambivalente ?

En raison de leur proximité avec le Siège apostolique, les évêques italiens semblent être comme des chiens muets : ils approuvent ou ils sont dissidents, ou ils craignent les « représailles ». Parmi les fidèles et les non-pratiquants, il y a ceux qui considèrent Fiducia Supplicans, et les tentatives de la justifier, comme une insulte à leur intelligence. Puis il y a ceux qui connaissent la doctrine de la foi et de la morale, en particulier les normes de la Révélation, et qui posent le premier dubium des cinq cardinaux, envoyés l’été dernier : Est-il possible que l’Église enseigne aujourd’hui des doctrines contraires à celles qu’elle a précédemment enseignées en matière de foi et de morale, que ce soit par le pape ex cathedra, ou dans les définitions d’un concile œcuménique, ou dans le magistère ordinaire universel des évêques dispersés dans le monde entier (cf. Lumen Gentium 25) ?

A coup sûr, Fiducia Supplicans n’appartient pas au « Magistère authentique » et n’est donc pas contraignante parce que ce qui y est affirmé n’est pas contenu dans la parole écrite ou transmise de Dieu et que l’Église, le Pontife romain ou le Collège des évêques, soit définitivement, c’est-à-dire par une sentence solennelle, soit avec le Magistère ordinaire et universel, propose de croire comme divinement révélée. On ne peut même pas y adhérer par un assentiment religieux de la volonté et de l’intellect.

Que pensez-vous du communiqué de presse du 4 janvier visant à clarifier la déclaration ? A-t-il résolu quoi que ce soit ?

Chez la majorité des baptisés, c’est l’ignorance qui prédomine, parce que pendant des décennies, les questions sociales ont été préférées à la catéchèse ; pour les couples hétérosexuels et homosexuels irréguliers, ce qui s’applique désormais est : love is love (l’amour, c’est l’amour). Ceux qui utilisent la logique s’y opposent et c’est alors que surgit le deuxième dubium des cardinaux : Est-il possible que, dans certaines circonstances, un pasteur puisse bénir des unions entre personnes homosexuelles, suggérant ainsi que le comportement homosexuel en tant que tel ne serait pas contraire à la loi de Dieu et au chemin de la personne vers Dieu ? À ce dubium s’en ajoute un autre : L’enseignement soutenu par le magistère ordinaire universel reste-t-il valable, à savoir que tout acte sexuel en dehors du mariage, et en particulier les actes homosexuels, constitue un péché objectivement grave contre la loi de Dieu, quelles que soient les circonstances dans lesquelles il a lieu et l’intention avec laquelle il est accompli ? La déclaration du 4 janvier est donc une tentative classique de masquer les fissures.

Êtes-vous d’accord pour dire que la déclaration a révélé des divisions qui étaient déjà présentes, mais qui sont maintenant étalées au grand jour ?

Benoît XVI, dans ses Notes du 11 avril 2019, a décrit l’origine de la débâcle de la morale catholique, et donc aussi des divisions entre catholiques, du fait de considérer que la cohabitation d’un couple hétérosexuel et d’un couple homosexuel n’est pas un péché. La division ou le schisme, auparavant immergé, a maintenant émergé. Nous verrons si elle sera officiellement déclarée lors d’un prochain événement ecclésial, tel qu’un synode ou un conclave. Il est certain que le prochain pape devra faire ses comptes et décider s’il faut approfondir la division ou la réparer en convoquant un concile. Quel que soit le candidat au poste de pape, il faudra que les congrégations pré-conclaves lui demandent de répondre aux dubia accumulés depuis 2015, sinon la division de l’Église s’approfondira.

Pourquoi pensez-vous qu’il y a eu une opposition principalement en Afrique, en Europe centrale/de l’Est et pas tellement aux États-Unis et dans d’autres pays principalement occidentaux ?

Parce que dans ces régions […], l’Église a contré l’idéologie relativiste qui avait pénétré la morale et démoli la loi naturelle avec la formation dans la doctrine et la vie dans le Christ – c’est-à-dire la morale catholique, en combattant la pensée néo-païenne. Ainsi, les gens sont restés fidèles. Demandez ensuite à un juif si c’est une bénédiction (berakah) quand elle n’a pas de caractère sacré (disons qu’elle n’est pas liturgique) et si on peut bénir quelque chose que Dieu maudit et abhorre, comme un péché contre la nature. Un ami juif qui a entendu parler de Fiducia Supplicans m’a dit : « Le pape ne connaît-il pas la Bible ? ». Sans parler du ridicule des musulmans et de l’éloignement des orthodoxes qui ont désormais déclaré impossible l’unité avec les catholiques. Fiducia Supplicans et les communiqués ultérieurs sont le résultat de l’ignorance du préfet Fernandez.

Quelle est la meilleure façon de résoudre la confusion et la division résultant de Fiducia Supplicans?

Expliquer qu’il n’y a rien de pastoral sans « pasto » (repas) parce que « la doctrine est en fait comme la nourriture, dont le possesseur est celui qui la distribue » ( Saint Grégoire de Nazianze). La doctrine est donc pastorale, mais si le berger ne l’a pas, il ne peut pas faire de pastorale. Le drame de l’Église aujourd’hui, c’est la séparation de la pastorale et de la doctrine, c’est-à-dire de l’amour et de la vérité. Et nous le payons très cher, comme l’avait prédit Jean-Paul II. Le pape François devrait annuler Fiducia Supplicans et remplacer le préfet par un homme à la « doctrine sûre, solide et pure », pour reprendre les mots de l’apôtre à Tite.

Comment pensez-vous que cette affaire affectera le prochain conclave ?

Il est certain que le prochain pape, s’il ne veut pas l’être uniquement pour une partie de l’Église, devra se poser la question : quelle est la mission de l’Église ? Celle de se conformer au monde ou de le sauver ? L’unité de l’Église catholique est compromise par Fiducia Supplicans car, sur une vérité morale aussi essentielle, elle accepte, en pratique, des points de vue opposés entre les Églises dispersées dans le monde. Un exemple : Le nouvel évêque de Foggia a déclaré que son église sera « l’église de François qui bénit tout le monde. » Mais l’Église n’est-elle pas celle de Jésus-Christ ?

Fernandez s’est discrédité en publiant un document à l’opposé de celui de son prédécesseur, [le cardinal Luis] Ladaria, en 2021. S’agirait-il d’un « développement » ou plutôt d’une hétérogénéité de la doctrine ? Le dicastère et le Saint-Siège se sont humiliés. Quelqu’un a déjà rebaptisé le dicastère « pour la destruction de la foi ». Le soupçon d’ignorance et de mauvaise foi pèsera sur Fernandez dans tout document qu’il signera par la suite. Il devrait démissionner.

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