Vittorio Comencini, un tout jeune député italien de la Ligue du Nord (vous savez, ces horribles fachos qui sont la honte de l’Italie et la cible des critiques vertueuses des grands démocrates de l’UE) vient de prononcer devant la Chambre des députés de son pays un discours que j’imagine impensable en France. Marco Tosatti le reproduit (accompagné d’un riche appareil de notes que je ne reprends pas ici). Même si la hiérarchie vaticane n’est pas citée, il montre à quel point le cri d’alarme du cardinal Zen est justifié.


Comment Pékin persécute les chrétiens

Président, chers collègues,

Dans la période allant de la « Révolution française » à l’an 2000, mais surtout tout au long du XXe siècle, se sont déclenchées des persécutions si féroces, si vastes, y compris de moyenne et longue durée, et avec un tel nombre de victimes, que la violence subie par les chrétiens dans les 1700 premières années du christianisme est presque passée inaperçue.

En deux millénaires, 70 millions de chrétiens ont été tués, mais 65% d’entre eux (environ 45 millions et demi de baptisés) ont été tués au cours du seul 20ème siècle.

Par ce bref discours sur le régime communiste actuel en Chine, je veux seulement m’attarder sur une situation que je veux vous raconter, en essayant d’éviter ce qu’a relevé Olga Mattera dans Limes [revue italienne de géopolitique, classée à gauche], le fait que « l’opinion publique occidentale, précisément celle de ‘culture’ chrétienne, n’accorde aucune attention à ce drame, sauf dans des cercles restreints ».

S’il est vrai que les initiatives de sensibilisation et de dénonciation se multiplient progressivement, il n’en reste pas moins que les persécutions anti-chrétiennes en Chine continuent de s’étendre, prenant des formes différentes et trouvant de nouveaux coupables.

Ce qui est pratiqué par les fondamentalistes islamiques dans d’autres parties du monde (comme le Moyen-Orient, l’Afrique et certaines parties de l’Asie) est pratiqué en Chine par rien de moins que les fonctionnaires de l’État.

Dans son dernier rapport sur la persécution anti-chrétienne, la Fondation pontificale « Aide à l’Eglise qui souffre » (ACS: Aiuto alla Chiesa che soffre) a examiné les développements les plus significatifs dans les 20 pays les plus préoccupants en raison des violations des droits de l’homme dont sont victimes les chrétiens.

L’étude analyse la période de juillet 2017 à octobre 2019 et les données concernant le « géant asiatique » sont préoccupantes.

Dans la Chine de Xi Jinping, la vie des chrétiens est devenue plus difficile après l’entrée en vigueur, le 1er février 2018, du nouveau Règlement sur les affaires religieuses. Ce règlement a restreint davantage la liberté de croyance, limitant de nombreuses activités religieuses aux lieux de culte enregistrés et introduisant d’autres restrictions.

Le Parti communiste a, en effet, interdit les enseignements religieux « non autorisés », tandis que les efforts de « sinisation » des croyances religieuses se poursuivent à un rythme soutenu, tout comme se poursuivent dans certaines provinces du pays la démolition des églises et le retrait des croix, les règlements de construction étant utilisés par le gouvernement comme prétexte pour les démolitions.

En avril 2018, en attendant la publication d’une nouvelle version des Saintes Écritures des chrétiens « compatibles » avec la sinisation et le Socialisme, la vente en ligne de la Bible a été interdite.

Le 21 mars 2018, la supervision des affaires religieuses a été transférée de l’Administration d’État pour les affaires religieuses au Département du travail du Front uni, une agence du Parti communiste chinois.

Comme on peut facilement l’imaginer, ce « système de crédit social », conçu pour récompenser les bons citoyens et punir les autres, est utilisé pour discriminer les chrétiens.

Dans certaines régions chinoises, l’éducation est utilisée comme un outil de conditionnement social: les élèves ont dû signer une déclaration dans laquelle ils étaient obligés de dire qu’ils allaient « promouvoir l’athéisme et s’opposer à la foi en Dieu ».

Dans diverses zones de la Chine, des membres du clergé sont toujours soumis à des arrestations arbitraires. En novembre 2018, par exemple, l’évêque Peter Shao Zhumin de Wenzhou a été arrêté pour la cinquième fois en deux ans et a été détenu à l’isolement et soumis à un endoctrinement à l’idéologie communiste pendant deux semaines. Le même évêque, en mai 2017, après avoir été kidnappé par des fonctionnaires du gouvernement, avait été détenu pendant 7 mois.

Naturellement, ce sont les évêques de l’Église « clandestine » nommés par le Pape, la véritable Église catholique, qui sont persécutés, et non ceux de l’Association catholique patriotique chinoise, au sein de laquelle les évêques sont choisis par les autorités communistes.

Malgré l’accord provisoire discutable entre le Saint-Siège et la Chine, daté de septembre 2018, la situation de l’Église catholique reste complexe. Souvent, les évêques de l’Église clandestine sont officiellement remplacés dans leur office par les évêques de l’Association catholique patriotique chinoise.

Malgré ces accords, des agents de l’État ont détruit des sanctuaires mariaux au Shanxi et au Guizhou.

En mars 2019, dans la ville de Guangzhou, des fonctionnaires ont introduit des primes en argent pour ceux qui fournissent des informations sur les églises clandestines et autres lieux de culte « non officiels ». Ceux qui fournissent des informations utiles reçoivent 100 yuans (l’équivalent de 12 euros et 85 cents), qui peuvent devenir 10 000 yuans, soit environ deux mois de salaire moyen, pour ceux qui aident le gouvernement à identifier et à arrêter les ministres et les membres de groupes religieux indésirables pour le régime.

Inutile de rappeler les continuelles arrestations par la police dont sont victimes les chrétiens, et que certains d’entre eux sont aussi sauvagement battus lors des arrestations.

En paraphrasant le professeur Ernesto Galli della Loggia, nous devrions nous demander: « comment se fait-il que notre culture ait peu de conscience et de mémoire de ces phénomènes? Devons-nous atteindre les niveaux de persécution anti-chrétienne comme celle pratiquée par les Boxers [où près de 30 000 Chinois chrétiens furent assassinés, ainsi que plus de 300 missionnaires, dont l’évêque français Laurent Guillon, vicaire apostolique de Mandchourie-Méridionale, dont la tête est promenée au bout d’une pique, ndt] au début du XXe siècle pour nous réveiller? Faut-il revenir aux niveaux de cruauté exprimés par l’infâme Mao Tse-Tung et sa persécution des chrétiens pour faire quelque chose.

Un nombre incalculable de chrétiens chinois risquent chaque jour leur liberté ou leur vie même pour leur fidélité au Christ et à la vraie Église. Comme nous le savons bien, de la discrimination idéologique, on passe très vite à la discrimination légale pour arriver progressivement à la discrimination physique, y compris à travers les laogai, les camps de travail forcé chinois, les nouveaux camps de concentration de 2020, que nous pourrons vraiment connaître quand quelqu’un décrira leurs caractéristiques, comme l’a fait Soljenitsyne pour les goulags soviétiques, ou quand sera surmontée en Italie la censure progressiste de l’historiographie et de l’édition, qui a sévèrement limité la possibilité de faire connaître les histoires de persécution et de martyrs parmi les fidèles chrétiens chinois, arrivant à la « démythification » de Mao, responsable de crimes égaux, voire supérieurs, à ceux de Staline et d’Hitler (jusqu’à 80 millions de morts dans le soi-disant « Grand Bond en avant » de 1958 à 1961).

Last but not the least, un autre problème qui émerge, est celui des fuites de divers territoires pour des raisons religieuses. Garantir le droit des minorités religieuses à habiter leur propre patrie pourrait permettre d’endiguer les migrations forcées, tout en réduisant la tension sociale qui frappe les pays qui accueillent des migrants sur leur territoire, comme l’Italie. Les chrétiens chinois persécutés expriment le désir de rester dans leur patrie et demandent de l’aide pour ne pas être contraints d’émigrer. Aisons-les! Ne nous cachons pas la tête sous le sable!

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