Il y aura tout juste 10 ans demain prenait fin le voyage historique de Benoît XVI au Royaume Uni. Présenté des mois à l’avance par les médias comme une catastrophe assurée (*), contrecarré en usant de TOUS les moyens les plus vils par les forces obscures habituelles, contraignant son entourage à déblayer les gravats à la main, le voyage s’était conclu par un triomphe, en plus d’un grand succès personnel pour le doux pasteur de l’Eglise Universelle, qui avait prononcé devant le Parlement un de ses plus grands discours. Dix ans plus tard, le Catholic Herald revient sur ces journées inoubliables.

(*) En 2014 s’était tenu à Rome un symposium sur le thème «Voyages des papes entre diplomatie et communication», avec la participation de Georg Gänswein, qui avait répondu à quelques questions du public au terme de la conférence:

Plusieurs fois, des voyages ont commencé avec un vent très contraire, le pape Benoît a dû s’habituer au «vent contraire», contrairement à ce qui se passe aujourd’hui. Mais je me souviens comment l’atmosphère changeait. En Angleterre, je me souviens quand nous sommes sortis de l’avion, l’atmosphère était très froide, puis peu à peu, après les premiers discours, les premières rencontres, on pouvait voir un changement qui est ensuite parvenu au top après le discours à Westminster Hall, un discours qui a renversé la situation. Il y a eu l’archevêque Nichols qui a dit «marvellous»! Nous avons compris que cela avait retourné l’atmosphère et de ce moment, le «vent» a changé. Et cela s’est répété dans d’autres voyages.
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http://benoit-et-moi.fr/2014-I/actualites/benoit-xvi-raconte-par-georg-gaenswein.html

Le secret du succès de Benoît en 2010

Christopher Altieri
The Catholic Herald
16 septembre 2020
Ma traduction

Ce mois-ci marque le 10e anniversaire de la visite historique du pape Benoît XVI au Royaume-Uni.

Pendant quatre jours, du 16 au 19 septembre, le monde entier a vu un public britannique qu’on avait annoncé comme incroyablement sceptique face à la visite de Benoît XVI, réagir d’abord chaleureusement, puis avec un enthousiasme grandissant, alors que le comportement modeste et aimable de l’ex-évêque et universitaire allemand, gagnait le cœur des habitants de l’île, de tous âges, de tous sexes et de tous horizons.

Benoît XVI n’a peut-être pas conquis leurs esprits, mais il a certainement – selon les mots de David Cameron, alors premier ministre – incité la Grande-Bretagne à « s’asseoir et réfléchir ». Dans son discours de congé à l’aéroport d’Heathrow, Cameron s’est fait l’écho des propres mots de Benoît deux jours plus tôt, à Westminster Hall : « La religion, a déclaré le pape Benoît, n’est pas un problème à résoudre pour les législateurs, mais un élément essentiel du débat national ».

Cette visite et, plus spécialeement, le discours de Westminster – universellement reconnu comme l’un des plus importants du règne de huit ans de Benoît – ont constitué le point culminant du catholicisme britannique public dans le premier quart du 21e siècle.

Une partie de son succès est due à la reconnaissance – sans cajolerie, ni indugence – de la contribution des habitants de l’île à la civilisation occidentale.

« La tradition parlementaire de ce pays », a dit Benoît XVI, « doit beaucoup à l’instinct national de modération, au désir d’atteindre un véritable équilibre entre les revendications légitimes du gouvernement et les droits de ceux qui y sont soumis ».

Benoît a salué la capacité des institutions politiques de la nation « à évoluer avec un degré remarquable de stabilité » et à émerger comme « une démocratie pluraliste qui accorde une grande valeur à la liberté d’expression, à la liberté d’affiliation politique et au respect de l’État de droit, avec un sens fort des droits et des devoirs de l’individu, et de l’égalité de tous les citoyens devant la loi ».

Benoît a noté la compatibilité substantielle de la doctrine sociale catholique avec le génie britannique en matière de gouvernement, en particulier en ce qui concerne la protection de la dignité unique de chaque personne humaine, créée à l’image et à la ressemblance de Dieu – et l’insistance de la doctrine sociale catholique sur le devoir de l’autorité civile de favoriser le bien commun.

La chose vraiment géniale – le secret de son succès – c’est qu’il n’a pas insisté lourdement. Il l’a dit et l’a laissé en suspens pendant une minute, puis il s’est employé à développer une vision globale – et éminemment érudite – de théorie politique, qui était étonnamment ambitieuse: d’une portée vraiment globale.

Benoît XVI a incité les gens à s’asseoir et à réfléchir parce qu’il a parlé comme quelqu’un qui croit réellement que l’homme est capable de s’autogouverner, et donc aussi à la possibilité d’une liberté ordonnée dans la société politique.

Il y avait là, à Westminster Hall, un homme qui connaissait intimement les dangers de l’idéologie et l’équilibre de l’âme humaine – précaire au mieux de ce côté de la Jérusalem céleste – mais qui ne se laissait intimider ou décourager par aucun des deux.

Aussi remarquables que soient les mots qu’il a prononcés ce jour-là, la leçon fondamentale qu’il a donnée est dans les mots qu’il n’a pas prononcés, mais qu’il a appelé tous les présents et tous ceux qui regardaient à suivre: que nous devons nous en sortir, ensemble, quoi qu’il arrive.

Il y aura des erreurs et des faux pas. Il y aura des conflits. Il y aura des échecs.

Dix ans plus tard, les grands sujets de discussion ne sont pas tous les mêmes que ceux qui se trouvaient alors devant l’opinion publique britannique ou d’autres sociétés. La question fondamentale demeure cependant : pouvons-nous faire preuve de l’imagination morale nécessaire pour relever les défis qui se présentent à nous et préserver les meilleurs anges de notre patrimoine commun ?

Le jury n’a pas encore rendu son verdict.

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