Un curieux et très intéressant article de Luis Badilla sur Il Sismografo (continue-t-il à régler des comptes avec le dicastère pour la communication?). Certains ayant mis en doute la gravité de l’état de François au moment de son hospitalisation (et parmi eux, l’influent et suffisant vaticaniste américain John Allen qui la joue sceptique et en profite pour se moquer de ses confrères italiens d’une manière très peu… confraternelle), Badilla fait une chronologie des 42 dernières années, et met en perspective l’hospitalisation de François avec celles de ses deux prédécesseurs, Jean-Paul II et Benoît XVI. Confirmant que François ne souffrait pas d’un rhume de cerveau (façon de parler évidemment, Allen dixit), mais était bien « en urgence absolue ».

Pour moi, c’est aussi une occasion de me souvenir du 17 juillet 2009, cette « journée pas comme les autres », où après une chute bénigne, Benoît XVI, en vacances dans le Val d’Aoste et en pleine rédaction de son « Jésus de Nazateth », s’était cassé le poignet, et retrouvé aux urgences du petit hôpital local.

A relire ici: benoit-et-moi.fr/2009..la main droite du Pape

En près de 42 ans, trois papes ont réclamé les secours d’urgence : deux en « code rouge » et un en « code vert ».

ilsismografo.blogspot.com
(L.B., R.C. – Rédaction de « Il sismografo »)

Du 13 mai 1981 au 29 mars 2023, en près de 42 ans, les trois papes qui ont dirigé l’Eglise durant cette période ont été contraints de se rendre à l’hôpital pour un secours d’urgence dans des situations délicates nécessitant des soins médicaux urgents.

Saint Jean-Paul II (13 mai 1981) arrive mourant à la Polyclinique Gemelli, victime d’un attentat criminel, les intestins perforés par une balle. Il était en code rouge [1].

Cet événement tragique marque pour Papa Wojtyla le début d’une saison de sa vie, jusqu’à sa mort, au cours de laquelle il sera hospitalisé à dix reprises, pour un total de 149 jours [2]. Jusqu’à Jean-Paul II, aucun pontife « régnant » n’avait jamais été hospitalisé, bien que dans deux cas des hypothèses de traitement similaires aient été étudiées : dans le cas du pape saint Jean XXIII pour une tumeur à l’estomac et, selon certaines sources mais sans confirmation officielle, dans le cas de la situation cardiologique de saint Paul VI. En effet, Papa Montini est mort d’un infarctus du myocarde fulgurant.

Papa Ratzinger : « patient inconnu numéro 917 ».

Le pape Benoît XVI (17 juillet 2009) est arrivé aux urgences de la ville d’Aoste avec un poignet droit visiblement fracturé. Il est endolori mais serein. Il est entré à l’hôpital en code vert [3], accompagné de son chauffeur et de son secrétaire, Mgr Georg Gänswein. Le type de fracture, causé par une chute dans la maison des Combes (Alpes italiennes), a obligé les médecins à pratiquer une opération chirurgicale non invasive de réassemblage des os. L’opération a duré près d’une demi-heure et a été réalisée sous anesthésie locale. Le pape, enregistré pour des raisons de confidentialité sous le nom de « patient inconnu numéro 917 », s’est ensuite fait plâtrer la main et une partie du bras. Dans l’après-midi de ce vendredi 17 juillet 2009, Joseph Ratzinger est réapparu à la sortie de l’hôpital et a fait comprendre d’un geste que tout allait bien. Il a ensuite béni les nombreuses personnes présentes avec son bras gauche (ce qu’il a continué à faire pendant plus d’un mois) et est immédiatement retourné aux Combes. Benoît XVI avait alors 82 ans et était suivi comme son ombre par son cardiologue qui l’a suivi jusqu’à sa mort : le professeur Patrizio Polisca. Les reportages de l’époque, où l’information était plus libre et moins encadrée, racontent que Ratzinger a dû attendre son tour au bloc opératoire, où l’on opérait un patient souffrant d’une péritonite. Dans le cas de l’admission de Papa Ratzinger, on se souvient que la nouvelle de sa présence aux urgences a également été diffusée grâce à des images prises par des personnes séjournant à l’hôpital d’Aoste.

Les « contrôles programmés » et la version du pape François

Le 29 mars, deux lignes d’un communiqué du Bureau de presse du Vatican ont été diffusées à l’improviste pour informer que le pape François se trouvait à la Polyclinique Gemelli pour des « contrôles programmés ». Presque au même moment, des rapports ont commencé à affluer pour démentir cette version. En quelques minutes, une version très différente a été consolidée dans les médias, avec des informations précises recueillies autour de la Casa Santa Marta et de la Polyclinique elle-même : le pape est arrivé à Gemelli dans un état critique, nécessitant des soins immédiats qui ne pouvaient pas être reportés. Il s’agit donc d’un « code rouge ». Le souverain pontife a été conduit directement au dixième étage, où se trouvent les chambres réservées aux papes, et c’est là qu’une équipe de médecins et d’infirmières l’attendait.

Le pape François lui-même, au moment de sa sortie, a offert des explications opposées et plus transparentes, bien que partielles. Rencontrant des journalistes, d’abord à l’hôpital Gemelli, puis à l’entrée de Santa Marta au Vatican, il a déclaré : « Jai ressenti seulement un malaise dans l’estomac, mais je n’ai pas eu peur. Je me souviens que quelqu’un de plus âgé que moi m’a dit : « Je n’ai pas vu la mort, mais je l’ai vue venir. Elle est moche, hein ! Je suis toujours en vie. J’ai suivi les articles, vous avez bien écrit. J’ai lu le Messaggero. Bravo, bravo et merci ».


[1] Code rouge. Patient dans un état très critique. Le pronostic vital est engagé. Accès immédiat aux soins. Soins maximaux.


[2] Admissions du Pape St. Jean-Paul II (Polyclinique Gemelli)
Le pape Wojtyla a été hospitalisé au cours de sa vie pendant 149 jours, soit environ 5 mois.
Admission avant de devenir Pape : 1944 – Cracovie (il avait été renversé par une camionnette en sortant du travail et n’avait alors que 24 ans).


[3] Code vert. Patient non critique : les prestations sont reportables. Absence de risques évolutifs.

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