« Con Dio, non sei mai solo ». C’est le titre donné à un recueil de 10 « grands » discours du pontificat de Benoît XVI (le choix n’a pas dû être facile!) paru après sa mort. J’ai traduit le 20 février dernier une interview du Père Lombardi, donnée à l’occasion de la sortie du livre. Je trouve aujourd’hui sur la NBQ une présentation de l’ouvrage, qui propose un aperçu de quelques-uns (en fait presque tous) des discours présentés. J’ai mis les liens vers les différents textes sur le site du Vatican

Article du 20 février 2023

Dix discours de Benoît XVI pour laisser Dieu nous guider

Chiara Pajetta
lanuovabq.it/it/dieci-discorsi-di-benedetto-xvi-per-lasciare-dio-alla-guida

Quand Benoît XVI a prononcé son homélie au début de son ministère pétrinien, il s’est demandé avec une courageuse sincérité : « Comment puis-je faire cela ? ». Et il a immédiatement répondu avec calme : « Je ne suis pas seul. Je ne dois pas porter seul ce que, en réalité, je ne pourrais jamais porter seul. La foule des saints de Dieu me protège, me soutient et me porte […]. Nous sommes tous la communauté des saints […]. Oui, l’Église est vivante ». Le titre du livre « Avec Dieu, tu n’es jamais seul » reflète donc bien la personnalité du pape bavarois, sa profonde expérience de la vie et de la foi, et nous offre également une promesse de proximité avec le Seigneur. « Mon véritable programme de gouvernement est […] de me laisser guider par Lui ». (1)

Et Dieu l’a certes guidé, l’inspirant également dans ses rencontres avec les jeunes, par exemple dans son discours lors de la veillée du 20 août 2005, lorsqu’il a proposé les figures des saints comme modèles pour « vivre selon la voie de Dieu » (2). « C’est seulement des saints, seulement de Dieu que vient la vraie révolution, le changement décisif dans le monde. La vraie révolution consiste uniquement à se tourner sans réserve vers Dieu, qui est la mesure de ce qui est juste et en même temps l’amour éternel. Et sachant bien que « l’on peut beaucoup critiquer l’Église » pour ses erreurs, Benoît XVI a ajouté une humble remarque pour les réconforter face au mal, qui est aussi présent dans la maison de Dieu. « Après tout, il est consolant qu’il y ait de la discorde dans l’Église. Ainsi, avec toutes nos fautes, nous pouvons néanmoins espérer nous retrouver toujours à la suite de Jésus, qui appelait précisément les pécheurs ».

Ce n’est pas que le pape veuille minimiser le poids du mal, comme le montre clairement sa lettre pastorale aux catholiques d’Irlande (3) sur les abus commis par des prêtres et des religieux sur des garçons et des jeunes hommes. Son appel, au contraire, est fort et décisif, pour que ceux qui ont péché reconnaissent leur erreur et suivent la proposition d’un « chemin de guérison et de réparation ».

D’ailleurs, c’est précisément aux prêtres de notre époque difficile que le pape Ratzinger a consacré une attention et un soin particuliers, en célébrant l’Année sacerdotale 150 ans après la mort du saint curé d’Ars (4). « Le sacerdoce n’est pas seulement une fonction, mais un sacrement : Dieu se sert d’un pauvre homme pour être, à travers lui, présent aux hommes ». Une véritable « audace de Dieu », qui se confie à l’homme en connaissant ses faiblesses. Et Ratzinger a voulu montrer cette vocation aux jeunes, en soulignant qu’il faut la demander à Dieu, car c’est un don de sa part.

Peut-être que tant de trahisons et d’erreurs sont aussi le résultat d’une réception inexacte et partielle du Concile Vatican II, comme le Pontife l’a expliqué avec beaucoup de simplicité et de clarté dans un discours à la Curie romaine à l’occasion des vœux de Noël (5). En termes clairs, Benoît XVI souligne que les problèmes liés à la réception des documents de Vatican II ont une origine précise : « Deux herméneutiques opposées se sont affrontées et se sont disputées ». Il les définit comme « l’herméneutique de la discontinuité et de la rupture » et « l’herméneutique de la réforme », en montrant très clairement les dégâts de la première (bien soutenue par les médias et une partie de la théologie moderne) et au contraire les fruits de la seconde, présentée d’abord par Jean XXIII et ensuite par Paul VI. Il s’agit de questions complexes, également liées au rapport et au dialogue entre la foi et la raison, explorées d’une manière renouvelée à l’époque moderne, et plus tard, précisément selon l’orientation du Concile Vatican II.

« Où était Dieu en ce temps-là ? Pourquoi était-il silencieux ? Comment a-t-il pu tolérer cet excès de destruction, ce triomphe du mal ? » Telles sont les questions qu’à Auschwitz, avec humilité et souffrance, Benoît XVI, « fils du peuple allemand », a partagées avec tous les hommes dans le souvenir de cette horreur (6). Mais il a ensuite montré la tâche de la raison, qui doit « reconnaître le mal comme mal » et « le rejeter » pour trouver le courage du bien et la résistance à la haine et à la violence. En outre, la réflexion sur la raison conduit Ratzinger à affirmer avec certitude que « le Dieu vraiment divin est ce Dieu qui s’est montré comme logos et qui, en tant que logos, a agi et agit avec amour en notre faveur ». Mais il est indispensable d’élargir le concept de raison, d’avoir le courage de s’ouvrir à son ampleur, car rencontrer Dieu, c’est rencontrer un fait raisonnable.

Magnifique, en ce sens, le discours du 12 septembre 2008 adressé au monde de la culture à l’occasion du voyage apostolique en France, au Collège des Bernardins, lieu emblématique du patrimoine intellectuel monastique (7). « Quaerere Deum, chercher Dieu. Telle était la motivation élémentaire des moines. Elle n’est pas moins nécessaire aujourd’hui qu’hier ». En effet, « même l’impiété d’aujourd’hui est tacitement assaillie par la question qui le concerne ». Par conséquent, une culture purement positiviste, ou même confiée à l’intelligence artificielle, qui rejette comme non scientifique ou même considère comme absurde la question de Dieu, est certainement pour le pape Ratzinger « la capitulation de la raison, le renoncement à ses possibilités les plus élevées et donc un effondrement de l’humanisme, dont les conséquences ne peuvent qu’être graves ». L’effondrement de la culture européenne, qui a effectivement renoncé à cette ouverture de la raison, est tristement visible.

Mais ce qui ressort des discours de Benoît XVI, avec une simplicité et une profondeur admirables, c’est une capacité de jugement (c’est-à-dire « l’usage de la raison ») dont nous avons bien besoin pour faire face aux défis alarmants de notre temps. À commencer par la défense de l’identité humaine. En effet, « l’homme possède une nature qu’il doit respecter et qu’il ne peut manipuler à sa guise. L’homme n’est pas seulement une liberté qui se crée elle-même. Il est esprit et volonté, mais il est aussi nature, et sa volonté est juste quand il respecte la nature, quand il l’écoute et quand il s’accepte pour ce qu’il est, et qu’il ne s’est pas créé lui-même ». C’est à partir de là que nous pouvons courageusement repartir.

Liens (ndt)

(1) https://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/homilies/2005/documents/hf_ben-xvi_hom_20050424_inizio-pontificato.html

(2) https://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/speeches/2005/august/documents/hf_ben-xvi_spe_20050820_vigil-wyd.html

(3) https://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/letters/2010/documents/hf_ben-xvi_let_20100319_church-ireland.html

(4) https://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/homilies/2010/documents/hf_ben-xvi_hom_20100611_concl-anno-sac.html

(5) https://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/speeches/2005/december/documents/hf_ben_xvi_spe_20051222_roman-curia.html

(6) https://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/speeches/2006/may/documents/hf_ben-xvi_spe_20060528_auschwitz-birkenau.html

(7) https://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/speeches/2008/september/documents/hf_ben-xvi_spe_20080912_parigi-cultura.html

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