Après des semaines d’abstinence médiatique, il est à nouveau présent dans les médias avec pas moins de « trois interviews en trois jours consécutifs »… de quoi faire pâlir d’envie le pape lui-même, qui pourtant les délivre en rafale. Sur la NBQ, Stefano Chiappalone souligne que l’essentiel des propos du secrétaire de Benoît XVI concerne non pas sa situation personnelle (sur laquelle il garde un silence prudent, inutile d’irriter le chef) mais le parcours synodal allemand – et là sa position est plutôt sans surprise: il est fortement critique.

Gänswein : Rien que la vérité sur le synode allemand

Stefano Chiappalone
lanuovabq.it
22 avril 2023

Le secrétaire de Benoît XVI revient dans l’actualité avec pas moins de trois interviews en trois jours. Pas de nouvelles sur son avenir, mais beaucoup de place au controversé Synodaler Weg dont le prélat considère qu’il ne répond absolument pas aux besoins des fidèles, et qu’il n’est pas contraignant au niveau canonique. Au contraire, il a contribué au déclin de la foi.

De Mgr Georg Gänswein nous arrive une estocade sur le controversé « Chemin synodal allemand » : un chemin qui a aggravé la crise de la foi et qui n’a même pas de valeur juridique. Et il le dit en tant que canoniste : en effet, peu de gens se souviennent que le secrétaire de Benoît XVI (et au moins officiellement préfet de la Maison pontificale) a obtenu son diplôme de droit canonique à la Ludwig-Maximilians-Universität de Munich, matière qu’il a ensuite enseignée à Rome à l’Université pontificale de la Sainte-Croix.

Le long silence qui a suivi l’ « affaire médiatique » qui a éclaté après la publication de Nient’altro che la verità ne semble plus être qu’un souvenir.

L’archevêque allemand réapparaît peu à peu sur la scène publique, depuis les occasions liturgiques de suffrage et de souvenir du pape émérite jusqu’au « salon » de Bruno Vespa début mars. Mais cette fois, il le fait avec pas moins de trois interviews en trois jours consécutifs (à faire envie au pape François, qui donne lui aussi des interviews sans nombre et en succession rapprochée).

Le dimanche 16 avril, jour du 96e anniversaire de la naissance de Benoît XVI, il était l’invité de l’émission Verissimo. Le lundi 17 avril, c’était au tour de l’émission autrichienne Zib 2 (cf. youtu.be/gPFXNGy7aoY). Enfin, dans son Allemagne natale, une longue interview est parue le mardi 18 avril dans le Passauer Neue Presse (des extraits de ces deux dernières ont été relancés en Italie par Silere non possum).

Rome a clairement posé les limites (Rom hat ganz klar die Grenzen aufgezeigt) : c’est le titre du Passauer Neue Presse et les « limites » sont celles que le synode allemand ne peut pas dépasser.

Toute la seconde moitié de l’interview est consacrée à ce thème, tandis que la première partie aborde le présent et l’avenir de l’archevêque. Rien de nouveau sur la nomination éventée au Costa Rica qui semblait imminente après l’audience avec le pape François en mars ( » Non, je ne sais rien de plus « ). Ayant quitté le monastère Mater Ecclesiae, où il a vécu jusqu’au 31 décembre dernier aux côtés de Benoît XVI,  » je vis maintenant dans une maison à côté de Sainte Marthe, où vit le pape François  » et  » j’exerce mes fonctions d’exécuteur testamentaire « .
Gänswein a hérité « d’une belle croix bavaroise en bois qu’il [Ratzinger] avait dans sa maison lorsqu’il était cardinal ». Et la tâche de détruire la correspondance privée (« les lettres que les parents de Ratzinger ont écrites à leurs enfants et ensuite aussi eux, entre frères et soeurs ») : un « moment douloureux », « mais j’ai bien sûr exécuté sa dernière volonté sans discuter ».

La conversation glisse ensuite sur le « 11 septembre de l’Église », c’est-à-dire le fléau des abus, le casus belli qui a déclenché le Synodaler Weg avec toutes ses dérives, toujours en cours.

« Je doute que la voie synodale, telle qu’elle s’est développée, ait été la bonne réponse à la crise des abus », dite Gänswein, notamment parce que les thèmes du synode « vont bien au-delà de la réponse nécessaire à la crise des abus », se dirigeant « vers des objectifs complètement différents », qui présentent plutôt le risque de conduire « loin de l’unité de l’Église universelle ». Plutôt que des réponses, le synode allemand a déclenché « des tensions au sein de l’Église catholique en Allemagne et avec le Saint-Siège », qui, à l’occasion de la visite ad limina des évêques allemands en novembre 2022, puis avec la lettre des cardinaux Parolin, Ouellet et Ladaria, « a clairement et sans équivoque montré des limites qui doivent être prises au sérieux ».

Et Gänswein est également clair et sans équivoque : « Je ne considère pas la voie synodale comme une réponse utile aux besoins réels des fidèles », ajoutant que « en tant que canoniste » (comme nous l’avons dit au début), elle « n’a pas de force juridique contraignante en vertu du droit canonique ».

Par ailleurs, la réponse immédiate du Vatican à la lettre des évêques de Cologne, Eichstätt, Augsbourg, Passau et Ratisbonne (les rares voix à contre-courant dans l’épiscopat allemand) « démontre l’urgence avec laquelle le Vatican aborde la question ». Une situation si grave que l’archevêque confie : « Je prie et j’espère qu’une scission peut être évitée ».

Bref, la « voie » allemande s’avère être un remède pire que le mal. Le déclin de la foi s’est en fait accentué à la suite du chemin synodal », déclare Gänswein, réfutant l’autre « slogan » (rappelé par l’intervieweur) selon lequel il faut faire quelque chose pour raviver la foi. Il faut le faire, mais la vraie réponse vient « de l’approfondissement de la foi et non des questions structurelles. La foi, si je la prends au sérieux, ne peut être ravivée que par une véritable conversion et un approfondissement personnels », ce qui « présuppose un engagement et une détermination personnels. C’est un combat et ce le sera toujours ».

En somme, ce n’est pas une Eglise à la mode que Gänswein espère, concluant en rappelant les paroles prophétiques, datant de 1958, d’un « jeune professeur de théologie nommé Joseph Ratzinger », selon lesquelles « l’Eglise de l’avenir » sera « une Eglise de petites minorités qui vivent de la foi et en témoignent et la transmettent dans ce monde ».

Ne sommes-nous pas aujourd’hui les témoins de cette prophétie ? En effet, si à première vue les « vents » synodaux peuvent aboutir à un consensus illusoire (mais à quoi : à une coquille vidée de l’intérieur ?), l’Eglise ne doit pas craindre de perdre son « influence politique et sociale », ce n’est pas son but – affirme-t-il – « mais de témoigner de l’Evangile de Jésus-Christ, de la Bonne Nouvelle, en paroles et en actes ».

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