La fiesta (ou ce qui devait l’être, voir ICI) organisée ce dimanche sur la Place Saint-Pierre, en liaison avec d’autres lieux (on n’ose imaginer le naufrage des « autres lieux », tendons un voile pudique) sous le Haut patronage du Grand absent, indisponible, s’est soldée par un bide gigantesque. Et pendant ce temps là, la ferveur populaire déployée lors du traditionnel Pèlerinage de Chartres du dimanche de la Pentecôte, témoigne de la vigueur de la mouvance traditionaliste et de la persistance de la foi, hors du « centre » – sauf que là, les périphéries ne sont pas celles que chérit le Pape! Récit de Luisella Scrosatti.

Fratelli tutti introuvables

Saint-Pierre se vide tandis que l’ancien rite s’épanouit

Luisella Scrosatti
La NBQ
14 juin 2024

Fête-Dieu au Vatican et échec total de l’événement organisé par le cardinal Gambetti : cinq heures de spectacle, une énième déclaration et une place aussi vide que les bavardages sur la « fraternité humaine » prouvent que les fidèles cherchent quelque chose d’éternel et se tournent vers d’autres sources. Comme les réalités liées à la liturgie traditionnelle, dont la vitalité devrait susciter plus d’une interrogation.

A Rome, on n’a même pas remarqué la Fête-Dieu. Le pape est à l’hôpital, donc pas de procession. En y regardant de plus près, il semble qu’il y ait eu une procession, partant du Collège Teutonique et se terminant dans les Jardins du Vatican. Mais, justement, personne ne l’a remarquée: ni les organisateurs, ni les médias du Vatican ne se sont damnés pour montrer au monde que la Présence divine sacramentelle est le cœur de l’Église. Une procession tardive, présidée par Mgr Josef Clemens, ancien secrétaire du cardinal Ratzinger, car les cardinaux n’avaient manifestement pas de temps à perdre.

L’année dernière déjà, il n’y avait pas eu de procession solennelle « en raison des limitations imposées au pape par la gonalgie » et « des exigences liturgiques spécifiques de la célébration », a expliqué le Bureau de presse du Vatican. Comme si le pape devait marcher toute la procession. Et dire que le pape François avait déplacé la procession solennelle du jeudi au dimanche soir pour des raisons pastorales, sans doute pour permettre à un plus grand nombre de personnes d’y participer.

En revanche, il s’est passé beaucoup de choses à Saint-Pierre la veille du dimanche de la Fête-Dieu. Pour les premières vêpres de la solennité ? vous n’y êtes pas. Pour le « World Meeting on Human Fraternity », Signori, et avec un hashtag : #notalone.

Un hashtag qui a porté la poisse à la Fondation Fratelli Tutti et au factotum de service le cardinal Mauro Gambetti, celui qui a permis que la basilique vaticane devienne le théâtre de nudistes [allusion à l’irruption d’un homme qui s’est dénudé sur l’autel majeur, voir ICI]. Oui, car en réalité, non seulement le Pape n’était pas là, puisqu’il était caché à l’hôpital, mais il y avait aussi très peu de monde. Malgré les cadrages serrés, limités aux premiers rangs, quelques photos du haut de la place ont été prises.

Résultat ? Un flop total. Quatre secteurs ont été mis en place, dont l’un est resté entièrement vide et les autres n’ont été remplis qu’au tiers, peut-être.

Près de cinq heures de discours, de spectacles, de vidéos, et la signature par le secrétaire d’État du Vatican, le cardinal Pietro Parolin, de la Déclaration sur la fraternité humaine, énième feuille de mots vides et démesurés, où – heureusement – le nom de Notre Seigneur n’apparaît même pas par erreur : « Tout homme est mon frère, toute femme est ma sœur, toujours. Nous voulons vivre ensemble, comme des frères et des sœurs, dans le Jardin qu’est la Terre. Le jardin de la fraternité est la condition de la vie pour tous ».

Amen.

Et comme si cela ne suffisait pas, le cardinal Gambetti a, pour l’occasion, transformé l’atrium de la basilique Saint-Pierre en centre de rafraîchissement, avec des bancs « écologiques » faits de palettes de bois: une maison de fous.


En médaillon, le « fameux » cardinal Gambetti

Et tandis que la basilique Saint-Pierre se vide, les messes de l’ancien rite explosent avec les enfants et les jeunes familles. L’impression laissée par le pèlerinage Paris-Chartres, il y a quinze jours, continue de secouer le monde catholique français. Le journal La Croix a publié une réflexion intéressante de Jean Bernard, collaborateur du journal La Nef, qui note que « beaucoup d’observateurs, y compris dans les grands médias, ont été frappés par la ferveur et la foi des pèlerins, en contraste total avec la désolation générale de l’Eglise de France, paralysée par le scandale des abus ».

La vitalité de cette réalité était également bien connue il y a quelques années à Rome. Bernard rappelle qu’un cardinal, présent à la session plénière de la Congrégation pour la doctrine de la foi le 29 janvier 2020, avait appelé à une restriction soudaine du rite ancien, précisément face au succès de ces pèlerinages. L’année suivante, Traditionis Custodes a vu le jour, avec pour résultat une nouvelle augmentation du nombre de participants, jusqu’à faire le plein. Et tout porte à croire, poursuit le journaliste français, que non seulement la messe traditionnelle ne disparaîtra pas, mais […] qu’elle continuera à croître, tant en termes absolus qu’en termes relatifs, compte tenu de l’abandon progressif d’un certain nombre de paroisses de rite ordinaire.

(…)

L’explication du miracle de l’ancien rite et de l’échec de la Rencontre sur la fraternité humaine se trouve dans cette phrase de saint Irénée, que l’on répète souvent, tout en lui enlevant la seconde moitié :

« La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant, et la vie de l’homme, c’est la vision de Dieu ».

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