Le cas de l’évêque de Tyler, au Texas, dont le diocèse fait l’objet d’une visite apostolique (Joseph Strickler est un électron libre dans l’épiscopat US, très prolixe – peut-être TROP, mais sous François, ce n’est pas un délit – sur son compte Twitter (@Bishopoftyler), et surtout très critique du cours actuel) est emblématique de la « miséricorde » bergoglienne, mais l’édito de la NBQ étend la réflexion au cas de ces évêques (notamment français) qui abandonnent la mitre ou sont « rétrogradés » pour des raisons pas forcément claires…

A noter:

Dans le diocèse de Tyler, qui ne compte que 125 000 catholiques, 21 séminaristes se préparent au sacerdoce. C’est nettement plus que la moyenne. En zone germanophone, les diocèses ne peuvent qu’en rêver. 

Le diocèse a également des finances saines à un moment où certains diocèses américains sont au bord de la faillite suite à d’énormes indemnités versées aux victimes d’abus sexuels.

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Giuseppe Nardi
https://katholisches.info/2023/06/26/bischof-joseph-strickland-von-tyler-im-visier-von-santa-marta/

Un exemple récent de tweet…

Affaire Strickland : les évêques non alignés finissent mal

Stefano Chiappalone
lanuovabq.it/it/caso-strickland-i-vescovi-non-allineati-finiscono-male
28 juin 2023

Le diocèse texan de Tyler reçoit une visite apostolique. Qu’est-ce qui ne va pas ? Les finances sont bonnes, le séminaire est plein, mais il est dirigé par un prélat loquace et franc : critique à l’égard du synode, il ne ménage pas le Pape (qui apprécie la parresia, au moins en paroles).

La visite apostolique du diocèse texan de Tyler, ordonnée par le Dicastère des évêques et conduite par deux évêques émérites, Mgr Gerald Kicanas et Mgr Dennis Sullivan, s’est achevée, interrogeant clercs et laïcs. Dans l’attente du verdict, on se demande quel est le « motif ». Qu’est-ce qui ne va pas dans un diocèse qui – selon les données rapportées par CNA (Catholic News Agency) – a une bonne situation financière et un nombre supérieur à la moyenne d’aspirants prêtres ?

Ce qui ne va peut-être pas, Oltretevere, c’est l’évêque lui-même : Mgr Joseph Strickland, 64 ans, qui siège dans la cathèdre de Tyler depuis 2012. Bien que le diocèse n’ait fait aucune déclaration à ce sujet et que « pour le moment, le but immédiat de la visite est inconnu », ce n’est pas un mystère que Strickland a « certainement irrité des membres haut placés de la hiérarchie en défendant le dépôt de la foi et en condamnant les points de vue plus hétérodoxes de divers autres prélats ». Il suffit de jeter un coup d’œil au compte Twitter de cet évêque loquace et franc pour se rendre compte qu’il n’est pas exactement « aligné » sur le climat ecclésial dominant.

Le tweet le plus récent (à l’heure où nous écrivons ces lignes) est consacré à Nancy Pelosi : Mgr Strickland prie pour que le cœur de l’ex-Speaker, connue pour ses positions en faveur de l’avortement, soit détourné « des voies de la mort et embrasse la voie de la vie du Seigneur ». L’opposition à la « pride » et au lobby LGBT est claire (avec de nombreux coups de gueule contre le président Biden et le jésuite arc-en-ciel James Martin, qui a reçu à plusieurs reprises les éloges du Saint-Père). Ajoutons à cela la lettre critiquant l’approche du Vatican sur le vaccin. Sans oublier la réaffirmation claire de la spiritualité « classique », par exemple sur le Rosaire ou l’Eucharistie.

Un franc-parler même face à Pierre et sans pour autant en renier l’autorité : Strickland précise que « le pape François est le pape » (face à ceux qui ne le considèrent pas comme tel) mais ajoute « pour moi, il est temps de dire que je rejette son projet qui sape le dépôt de la foi » – par exemple, en ce qui concerne le synode.

La cerise sur le gâteau est la récente redécouverte de la liturgie traditionnelle, que Mgr Strickland a célébrée pour la première fois en 2020 (son témoignage est rapporté dans le blog Messainlatino), ce qui rend son dossier ecclésial résolument « indietriste », donc peu apprécié à Sainte Marthe et même par le nouveau préfet du Dicastère des évêques, Mgr Robert Francis Prevost, qui, venant précisément des Etats-Unis, est supposé avoir une sollicitude particulière pour « dépelagiser » [allusion à l’obssession papale conte les prétendus « pélagiens ») l’épiscopat à star and stripes.

Pour l’instant, le diocèse de Tyler n’a pas fait de déclaration, l’évêque ne veut pas en faire une affaire d’état, il est même « confiant » quant à l’issue de la visite, selon une source de The Pillar; selon une autre, cependant, le sujet d’un éventuel remplacement a également été abordé au cours de la visite.

Si tel était le cas, Mgr Strickland viendrait s’ajouter à la liste des « chômeurs de la Sainte Eglise romaine », dont fait depuis peu partie Mgr Georg Gänswein, unis par une vision plus ou moins critique de la tendance dominante depuis 2013, toute entière engagée à « déclencher des processus » pour autant qu’ils aillent dans le sens souhaité (le problème étant que le déclenchement de processus déclenche inévitablement des frictions).

Selon les sources de The Pillar, ce n’est certainement pas le tweet sur le Pape qui a déclenché la visite : de toute façon, il serait assez surréaliste d’être « remarqué » par le Dicastère à cause d’un tweet, mais il serait encore plus surréaliste de faire l’objet d’une visite apostolique pour avoir répété ce que l’Église a toujours dit sur, par exemple, le mariage et la famille (a fortiori à l’heure du  » laboratoire  » allemand qui, au-delà de quelques reproches débonnaires, reste libre de continuer à expérimenter et à subvertir tout ce qui est possible). On ne rappellera jamais assez que même les voix critiques à l’égard du pontificat ratzingerien étaient libres de s’exprimer à l’époque du soi-disant « pasteur allemand », sans jamais être taxées d' »ennemis du Pape » (expression récurrente sur les lèvres des anti-papistes d’hier).

Quel que soit le sort réservé à Mgr Strickland, ce qui est certain, c’est que l’épiscopat aurait dû être inclus depuis longtemps parmi les « métiers pénibles » : pour avoir déplu à Dieu, à ses propres ennemis, et parfois même à l’intérieur des murs sacrés, il y a de plus en plus d’évêques qui, sous le poids de l’épuisement épiscopal, démissionnent avant les 75 ans canoniques; certains regrettent même d’avoir accepté la nomination (comme le Français Ivan Brient) et s’empressent de signer la renonciation avant l’ordination, évitant ainsi qu’on lui impose, avant même qu’il ne la porte, une mitre qui pèse autant qu’une couronne d’épines.

Deux nominations curieuses ces derniers jours ont mis en lumière l’instabilité de la chaire épiscopale : en France, deux ordinaires ont été rétrogradés en auxiliaires lundi 26 juin. Il s’agit de Mgr Thierry Brac de la Perrière, qui a abandonné la charge pastorale de Nevers pour devenir auxiliaire de Lyon. Et de Mgr Jean-Pierre Batut, qui n’est plus évêque de Blois mais qui est depuis avant-hier auxiliaire de Toulouse. Le premier revient d’un congé sabbatique pour manque de forces (autre illustre victime du burnout). Du second, Mgr Batut, on ne sait pas grand-chose, si ce n’est que le Saint-Père l’a relevé de ses fonctions à sa demande (« à ma demande » [en français dans le texte], écrit-il dans sa lettre de congé). Détail curieux : lors de sa nomination épiscopale, Mgr Batut était originaire de la paroisse parisienne de Saint-Eugène-Sainte-Cécile, où l’on célèbre dans le rite traditionnel (une liturgie que le prélat n’a pas oubliée, même en tant qu’évêque).

Toujours en France, le diocèse de Fréjus-Toulon dirigé par Mgr Dominique Rey, à qui le Saint-Siège a ordonné de suspendre les ordinations depuis l’année dernière, attend toujours le verdict romain. Même les évêques ne peuvent plus compter sur la tant attendue « sécurité de l’emploi », surtout s’ils ne sont pas alignés.

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