La décision du Pape de confier la direction du Séminaire Romain Majeur au (fraîchement nommé) évêque auxiliaire de Rome Michele di Tolve n’a pas, c’est le moins qu’on puisse dire, soulevé l’enthousiasme des connaisseurs (voir les articles de Silere non possum, et de Luisella Scrosatti qui, sur La Bussola d’aujourd’hui, titre « Di Tolve, l’homme qu’il faut pour vider le séminaire romain »). Inhabituellement, Andrea Gagliarducci complète sa chronique en anglais du lundi pour commenter cette nomination. Je ne traduis pas cette partie, trop « romaine » et donc éloignée de nos préoccupations françaises (!) mais sa conclusion, très intéressante, même si elle est, comme à son habitude, modérée… et plutôt indulgente pour le Pape.

Pape François, la confiance (manquante) dans sa révolution

Andrea Gagliarducci
www.mondayvatican.com
Mardi 11 juillet 2023

Le pape François a confié à Mgr Michele Di Tolve, évêque auxiliaire de Rome, la direction du Grand Séminaire romain et surtout la formation des prêtres.
(…)
Avec cette nomination, le pape François complète le tableau de la réforme du vicariat de Rome, mais surtout, il ajoute une pièce supplémentaire à ce qu’il veut que l’équipe soit lorsqu’il ne sera plus là. C’est, en fin de compte, un pas de plus pour sécuriser son héritage.

Nous sommes cependant confrontés à un héritage incertain. Le pape François relie constamment tout à sa personne ; il demande que tout renvoie à lui ; il veut que son rôle de pape soit pleinement reconnu, et personne ne peut faire autrement.

Ce faisant, il démontre toutefois qu’il n’a pas mis en œuvre une véritable conversion des cœurs, mais qu’il veut imposer sa vision, après avoir échoué à la faire progresser au cours des dernières années. L’excuse générale est qu’il y a des résistances à son pontificat. Le fait est qu’aucun pontificat ne naît de rien et que, pour être apprécié à sa juste valeur, chaque pape doit rendre compte de ses changements.

Il ne suffit pas de révolutionner l’image de l’Église. Il ne suffit pas de changer leurs structures. Il ne suffit pas d’essayer de briser les chaînes de la corruption, réelle ou supposée. En fin de compte, il s’agit de comprendre et d’aimer l’Église en tant qu’institution d’une manière profonde qui nous permette d’envisager l’avenir avec sérénité.

En sécurisant son héritage, le pape François démontre finalement qu’il n’a pas confiance en sa révolution et en ses effets. Il sait qu’il n’a pas conquis le cœur de tous. Ce pontificat a été caractérisé par la présence de « gardiens de la révolution », capables de qualifier toute position critique d' »anti-papiste », même si cette position était relativement modérée et ne faisait que soulever des questions plutôt que de contester l’autorité du pape.

Nous attendons maintenant un nouveau consistoire vers la fin de l’année [?], sachant déjà que le pape François le planifiera entièrement selon ses critères, comme cela a été le cas jusqu’à présent.

Les papes précédents, tout en ayant la possibilité de choisir personnellement, ont toujours pensé à une Église avec de nombreuses forces en équilibre. Les cardinaux Danneels, Martini et Kasper n’étaient en effet pas des cardinaux à l’image de Jean-Paul II. Pourtant, Jean-Paul II les a choisis et a créé des cardinaux qu’il savait nécessaires pour des situations contingentes. Il voulait une Église où toutes les positions pouvaient être représentées et où les idées étaient équilibrées [ndt – ce que je disais hier ici: François « assure-t-il » son héritage?]. En fin de compte, le pape était responsable de la synthèse et de la garantie de l’unité de l’Église.

Le pape François tient un raisonnement différent. La papauté est missionnaire ; elle doit rester à la périphérie et se fonde sur les relations plutôt que sur la garantie de l’unité. Ainsi, pour maintenir la cohérence, il a besoin d’évêques et de cardinaux alignés sur lui. Mais pour équilibrer, il a créé un processus synodal pour permettre un débat qui permette à chacun de se sentir inclus.

C’est une révolution différente qui cherche un équilibre [???] entre des positions différentes. Mais elle vise surtout à légitimer le rôle du pape qui, finalement, tend à tout centraliser.

La question qui se pose est la suivante : combien de temps tout cela va-t-il durer ?

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