Dans l’interview accordée à “Catholic Family News” (François a jeté le discrédit sur la papauté), Mgr Vigano n’a pas abordé que le sujet de la « méthode Bergoglio », et d’autres passages méritent aussi l’attention (même si l’on n’est pas d’accord sur tout). Dans un échange particulièrement polémique, il s’en prend, sans citer de noms (mais les initiés les ont bien en tête…) aux cardinaux nommés par Benoît XVI, qui, par légalisme ou toute autre raison moins avouable, n’ont pas dénoncé les présumées irrégularités du conclave de 2013. Ce faisant, en plus d’avoir manqué d’honorer la pourpre dont ils sont en principe revêtus (qui évoque le sang du martyre qu’ils seraient prêts à verser pour défendre leur foi… on en est loin), ils ont déçu les attentes des fidèles et surtout, leur reculade ne manquera pas de peser sur le prochain conclave.

CFN : Dans une récente interview, vous avez déclaré que certains des cardinaux « créés par Benoît XVI n’ont absolument pas répondu aux attentes des fidèles conservateurs » et que certains d’entre eux « ont été témoins de choses au dernier Conclave qu’ils ne dénoncent pas publiquement« . Selon vous, de quoi ont-ils été témoins et pourquoi ne les dénoncent-ils pas?

Mgr Vigano: Certains cardinaux entrés au Conclave en 2013 semblent ne pas comprendre la gravité de ce qui s’est passé et se passe, sous de fausses apparences de légalité formelle. On les a entendus défendre bec et ongles la papauté en déclarant que les erreurs propagées par Bergoglio et ses provocations ponctuelles ne sauraient être considérées comme du magistère papal ; on les a entendus demander à Bergoglio d’éclaircir les dubia sans que ce dernier daigne répondre, et ça s’est arrêté là. Mais cette dénonciation des effets – c’est-à-dire du « pontificat » actuel – ne sert à rien quand elle refuse, malgré tout, d’en reconnaître les causes dans la révolution conciliaire. Leur volonté inébranlable de « sauver » le pseudo-magistère de Vatican II, cause lointaine de la crise actuelle, rend vaine toute action de défense de l’Église.

Quant au silence sur les événements qui se sont déroulés pendant le Conclave, je vois là aussi la mentalité légaliste l’emporter sur l’impérieuse nécessité de mettre fin au coup d’État subversif de la Deep Church. Leur principale préoccupation est de ne pas compromettre le respect des normes valables en période de normalité relative, de sorte qu’on ne puisse pas dire qu’ils ont violé des préceptes humains, alors que par leur respect des procédures, ils se retrouvent à approuver la violation des préceptes divins par – rien de moins que – les échelons supérieurs de la Hiérarchie catholique.

Je ne comprends pas qu’un membre du Collège des Cardinaux puisse confier à des amis qu’il a été témoin de faits qui rendraient l’élection de Jorge Mario nulle et non avenue, et en même temps ne pas vouloir les dénoncer publiquement pour ne pas rompre le secret pontifical : ce secret qu’il a déjà rompu en en parlant à quelqu’un qui n’y peut rien, obligeant Son Éminence à se taire devant l’Église dont les Pasteurs pourraient peut-être trancher la question. Mais il ne s’agit pas ici du sceau de la confession, mais de choses qui ont des raisons d’être réservées tant que cela ne se fait pas au détriment de l’institution qui les a mises en place ; sinon nous nous retrouvons comme les pharisiens de l’Évangile, qui demandaient à Notre-Seigneur s’il était permis de tirer un âne hors du puits le jour du sabbat.

Les indiscrétions de ces cardinaux se concentrent sur les preuves de graves irrégularités, sans donner plus de détails. (…) Si ces confidences étaient vraies, je n’ose penser à l’angoisse morale de ceux qui s’apprêtent à emporter le secret dans leur tombe, alors qu’ils auraient eu l’occasion de démasquer les manœuvres de la mafia saint-galloise. Si elles n’étaient pas vraies, il n’y aurait aucune raison d’en parler, même avec les personnes les plus dignes de confiance (qui en ont parlé à quelqu’un, pourtant, depuis que la nouvelle a été divulguée).

CFN : D’un point de vue humain, pensez-vous que le prochain Conclave ne répétera pas les résultats de 2013 ?

Mgr Vigano: Sauf interventions extraordinaires de la Providence, le Collège des cardinaux a été largement discrédité par Bergoglio : Caligula s’est limité à la menace de nommer son cheval Incitatus comme prêtre et consul ; celui-là, par contre, crée des cardinaux qui, sous Pie IX, auraient été envoyés in partibus infidelium [dans les contrées des infidèles]. L’issue du prochain conclave semble donc connue d’avance, rebus sic stantibus [les choses demeurant en l’état].

Mais si des preuves d’irrégularités graves lors du conclave de 2013 devaient apparaître, cela rendrait ipso facto nulle et non avenue l’élection qui a suivi et, par conséquent, tous les actes de gouvernement et de magistère accomplis par les élus. Parmi ces actes figurerait la création des cardinaux, de sorte que tous les consistoires de Bergoglio seraient nuls et non avenus : nous nous retrouverions comme par magie dans la situation de 2013 et cela perturberait les plans de Bergoglio, car les Électeurs du prochain Conclave seraient certainement moins enclins à répéter les erreurs déjà commises et, forts de l’expérience de cette décennie, ils pourraient élire le moins pire d’entre eux.

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