La chronique d’aujourd’hui de John Allen, le directeur de The Crux, dans une rubrique de circonstance intitulée « The Synod files » est un méchant mix de dérision et de mépris destiné à faire passer la courageuse intervention du vieux lion chinois pour le bavardage sans intérêt d’un vieillard déphasé, pour ne pas dire sénile, ressassant indéfiniment les mêmes vieilles lunes. Et si on en a parlé, selon lui, c’est tout simplement parce qu’il n’y avait rien de plus intéressant à se mettre sous la dent.
Voilà qui doit faire plaisir à François.
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Au passage, l’article permet au vaticaniste de sortir un de ces « bons mots » souvent hermétiques pour les non-américains dont il est friand. Cette fois, il cite un ouvrage d’un philosophe qui, malgré les apparences, n’a rien à voir avec le cardinal Zen, sinon le mot « zen » contenu dans son titre (contrairement à « L’art du baiser », qui lui, a bien été écrit par le cardinal Tucho!). Une « private joke » que je ne suis pas sûre d’avoir saisie…
J’ai dû écrire quelque part qu’il fallait se méfier des minimiseurs. Quand je lis cet article, je me dis que je n’avais pas tort…
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Le plus grave, c’est que dans son genre, John Allen est une star, dont les compte-rendus et les analyses font autorité.

Synod Files: Zen and the Art of Narrative Maintenance

John Allen
cruxnow.com

La grande nouvelle d’hier concernant le Synode des évêques est vraiment venue de l’extérieur, c’est-à-dire qu’elle n’a pas émané de la salle d’audience Paul VI où se déroule l’événement, mais plutôt de quelqu’un qui n’y est même pas : Le cardinal Joseph Zen, 91 ans, évêque retraité de Hong Kong, dont la lettre critique du 21 septembre a fait le tour de divers médias catholiques.

Officiellement, la seule nouvelle provenant de l’intérieur du synode hier est venue du laïc italien Paolo Ruffini, chef du Dicastère pour la communication du Vatican, qui a donné le premier de ses briefings réguliers et s’est retrouvé dans la position peu enviable de ne pas dire aux journalistes ce qui s’est passé, mais plutôt d’essayer de défendre les raisons pour lesquelles il ne peut pas le faire.

Pressé par le Regolamento [en italien,, ça fait plus « initié »], le règlement du synode, qui exige une confidentialité plus ou moins absolue, notamment en interdisant aux participants de discuter de leurs propres contributions ou de celles des autres, Ruffini a fait de son mieux.

Selon Ruffini, ces mesures visent à obtenir une « suspension du temps » et, par conséquent, un « silence qui est assourdissant à sa manière, parce qu’il est totalement différent de la routine habituelle habituée au point/contrepoint stéréotypé ».

« La façon dont une institution aussi importante que l’Église s’accorde un moment de silence dans la foi, dans la communion, dans la prière, est une nouvelle », a courageusement [?] insisté Ruffini.

Pour être honnête, Ruffini n’a pas la tâche facile. Comme l’a dit un média italien, être le porte-parole d’un événement où il n’y a pas d’information est en quelque sorte « mission impossible ».

Notez, cependant, que Ruffini a utilisé deux fois le mot « silence ». En réalité, ce que nous avons eu hier n’était pas du tout du silence, c’était beaucoup de bruit autour de la lettre Zen, en grande partie parce qu’il n’y avait pas d’autre voix sur le synode qui avait quelque chose d’intéressant à dire.

En substance, la lettre Zen soulève des objections désormais familières, notamment la perspective d’innovations doctrinales, la crainte d’une superposition et d’une manipulation des résultats, et la crainte d’une subversion du caractère hiérarchique de l’Église. Tous ces messages ont déjà été entendus à de multiples reprises par diverses personnalités, y compris d’autres prélats de haut rang.

Zen était l’un des cinq cardinaux conservateurs et critiques bien connus de François qui ont récemment soumis une série de dubia, ou doutes, au pontife au sujet du synode, ce qui rend sa lettre divulguée encore moins digne d’intérêt – en effet, l’histoire est retombée à « Quarante-huit heures plus tard, le cardinal des dubia est toujours mécontent ».

En termes journalistiques, il s’agit d’un cas classique de « chien qui mord l’homme » [càd nouvelle insolite? franchement, je ne vois pas le rapport], mais il a illuminé le tableau d’affichage hier parce qu’il n’y avait tout simplement pas grand-chose d’autre à signaler.

En fin de compte, le résultat de l’exigence de secret ne sera pas le son du silence. Au contraire, elle donnera le micro aux détracteurs du synode, ce qui permettra à la controverse et aux plaintes de dominer le récit, comme la journée d’hier l’a bien montré.

En 1974, Robert Pirsig a publié son livre classique Zen and the Art of Motorcycle Maintenance. Peut-être que lorsque ce synode sera terminé, quelqu’un nous donnera une version actualisée intitulée Zen and the Art of Narrative Maintenance – je ne sais pas si ce serait un best-seller comme l’original, mais ce serait tout de même une lecture instructive.

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