Le jésuite s’agite beaucoup, en particulier via son champ de bataille de prédilection, les réseaux sociaux, pour faire de Fiducia Supplicans « le dernier arrêt avant le mariage gay » sur le train infernal lancé par le Vatican: ces jours-ci encore, il était invité par les évêques irlandais au sanctuaire marial de Knock, et il n’a pas manqué d’évoquer « ceux qui sont en marge » et le « ministère de l’Église auprès des personnes LGBTQ ». Bref, il prépare le terrain.

Dès que le coup de la SF sera digéré, la prochaine étape sera celle du mariage gay, à condition de le distinguer théoriquement et rituellement du mariage sacramentel. James Martin le sait et, en bon ailier, commence à préparer le sprint.

Église de François, prochain arrêt: le mariage gay

Luisella Crosatti
lanuovabq.it/it
5 février 2024

Le père James Martin catéchise les évêques irlandais sur Fiducia Supplicans et, dans un tweet, « normalise » le mariage gay. Ce à quoi la réponse du pape aux derniers dubia a déjà ouvert la voie.

Il n’y a jamais eu de doute sérieux sur le fait que les bénédictions autorisées par Fiducia supplicans n’étaient que le début d’un parcours. Et les nouvelles découvertes du pionnier qu’est le père jésuite James Martin le confirment. L’ambiguïté poursuivie du document et les « clarifications » ultérieures sont le test décisif de sa nature délibérément provisoire, surtout lorsqu’il est signé par un pape qui a résumé la stratégie de son pontificat en deux principes : l’initiation des processus et la supériorité du temps sur l’espace.

C’est François lui-même, dans sa réponse au second dubium des cinq cardinaux (25 septembre 2023), qui avait initié le processus des bénédictions aux couples « irréguliers » et de même sexe, baptisant le principe selon lequel le point indispensable serait simplement de maintenir la distinction entre les bénédictions nuptiales et les « autres » bénédictions. Un principe qui, à peine trois mois plus tard, sera à la base de la Déclaration du Dicastère pour la Doctrine de la Foi, qui – rappelons-le – envisage précisément « la possibilité de bénir les couples en situation irrégulière et les couples de même sexe ».

Tous les imbroglios ultérieurs et les déclarations maladroites qui ont conduit à parler de bénédictions non pas de « couples », mais de « personnes en couple », ou de bénédictions de couples, mais pas d’unions, tout cela fait partie d’une retraite apparemment nécessaire du champ ouvert afin de tenir les tranchées, une retraite rendue nécessaire par l’opposition massive impliquant un continent entier, de nombreuses conférences épiscopales, des évêques individuels et un grand nombre de fidèles. Une marée de catholiques, même si le pape a tenté de jeter de la poudre aux yeux, d’abord en déclassant l’opposition massive africaine, [la réduisant] à une question culturelle, puis, dans l’entretien avec Domenico Agasso [La Stampa], en parlant de « petits groupes » qui témoignent de « réflexions de couleur schismatique ».

Revenons au père Martin. Le site canadien Lifesitenews d’abord, puis le quotidien La Verità vendredi 2 février ont rapporté que le jésuite avait été invité à prendre la parole au sanctuaire marial de Knock, à l’occasion de la réunion annuelle de la conférence épiscopale irlandaise [c’est lui-même qui l’a annoncé] .

Deux jours au cours desquels Martin lui-même a parlé de « ceux qui sont en marge » et du « ministère de l’Église auprès des personnes LGBTQ ». Une source irlandaise du site canadien confie que les évêques mettraient également sur la table les moyens d’appliquer FS et d’essayer d’obtenir le mariage gay.

Le Père Martin serait donc l’éclaireur du Vatican pour tenter de sortir de la tranchée dans laquelle FS a été acculé ces dernières semaines, selon la maxime bien connue que la meilleure défense, c’est l’attaque. En même temps, le jésuite montre aux arrière-gardes quel est le véritable objectif pour lequel FS est né : le mariage gay et la bénédiction de la sodomie.

L’intervention en Irlande est parallèle à une autre prestation de Martin il y a quelques jours. Le prêtre controversé, toujours prêt à commenter sur X (Twitter) tout ce qui est utile pour pousser les catholiques vers le politiquement correct – c’est-à-dire comment mettre un pied et quatre orteils en Enfer sans en faire trop -, avait cru bon de ne pas rater l’actualité du compagnon masculin du secrétaire américain aux Transports, Pete Buttigieg. Qui avait fait savoir qu’il voyageait aux frais des États-Unis avec un mari à charge. Le 22 janvier, le jésuite a tweeté :

 » Surprenant que cette nouvelle ait reçu autant d’attention. Qu’on le veuille ou non, Pete Buttigieg est légalement marié. Vous pouvez ne pas être d’accord avec le mariage homosexuel (ou pas). Mais @SecretaryPete est tout aussi marié aux yeux de l’État et de son église que n’importe qui d’autre. Prétendre le contraire, c’est ignorer la réalité ».

Ainsi, pour Martin, il peut y avoir un vrai mariage « aux yeux de l’État » et d’une « église » qui est en contradiction avec le mariage naturel, ordonné par Dieu. On peut être, à ses yeux, véritablement marié à des personnes du même sexe, ‘comme n’importe qui’, alors qu’avoir quelque chose à dire à ce sujet reviendrait à ‘ignorer la réalité’. Il est clair que dans cette perspective, l’Église catholique elle aussi devrait prendre acte de la « réalité » et, si elle ne peut vraiment pas assimiler ce mariage au mariage catholique, elle devrait néanmoins le reconnaître comme quelque chose de similaire. Le fait est que dans l’esprit de James Martin, deux hommes ou deux femmes peuvent se marier, qu’il s’agit bien d’un mariage, même si l’Église catholique ne peut pas l’appeler ainsi.

En y regardant de plus près, à cet égard aussi, James Martin n’est qu’un éclaireur, pour indiquer la voie que l’Église devrait suivre ; et c’est un éclaireur soutenu par le pape, qui non seulement ne trouve aucune objection à sa « mission » pro-LGBTQ, mais lui a déjà fourni un soutien théorique pour le mariage gay « catholique ».

Le § 292 d’Amoris Lætitia a introduit l’idée d’une gradation de la réalisation du mariage chrétien, qui « se réalise pleinement dans l’union entre un homme et une femme, qui se donnent l’un à l’autre dans un amour exclusif et une fidélité libre, s’appartiennent jusqu’à la mort et s’ouvrent à la transmission de la vie ». L’exhortation post-synodale considérait que « d’autres formes d’union contredisent radicalement cet idéal », et l’on peut supposer qu’il s’agit des « unions » entre personnes de même sexe, « alors que certaines le réalisent au moins de manière partielle et analogue », référence probable à des unions more uxorio [hors-mariage].

Mais dans la réponse au second dubium, déjà mentionnée plus haut, le pape ne mentionne plus cette distinction et ne retient que l’idée d’ « autres formes d’union » qui réalisent le mariage « seulement de manière partielle et analogue » (…) c’est pourquoi elles ne peuvent pas être strictement appelées ‘mariage’ « . Il faut préciser que cette réponse concernait la question non pas sur la possibilité de bénir les unions irrégulières génériques, mais spécifiquement « les unions avec des personnes du même sexe ». Le pape passe donc sous silence le fait que ces « unions » contredisent radicalement le mariage, précisément parce que la question lui a été posée en référence à ces « unions », qui deviennent au contraire des réalisations partielles et analogues du mariage chrétien.

Dès que le coup de la SF sera digéré, la prochaine étape sera donc celle du mariage gay, à condition de le distinguer théoriquement et rituellement du mariage sacramentel. James Martin le sait et, en bon ailier, commence à préparer le sprint.

D’un autre côté, FS a déjà posé tous les jalons en la matière, car l’existence de bénédictions données par un prêtre au nom de l’Église qui ne seraient pas liturgiques relève de la pure fiction. Et parce que bénir le couple signifie bénir l’union qui forme ce couple, le type de relation qui forme ce couple. James Martin peut continuer son ministère qui consiste à faire avancer la barre vers le mariage gay, afin que les bénédictions de la SF soient digérées comme un moindre mal à accepter, de peur que le pire n’arrive.

Entre-temps, le 3 janvier, après avoir béni le premier couple gay à la suite de FS, le jésuite avait écrit pour Outreach, que « l’accent mis sur les prêtres bénissant les couples de même sexe ne soulignait pas à quel point les couples de même sexe ont béni l’Église. Ils m’ont certainement béni ».

Marquant ainsi la dernière vraie étape du voyage : la sodomie n’est plus un péché, c’est une bénédiction.

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