La nocivité de ce qu’il appelle avec une pointe de mépris « chiacchiericci » ou « pettegolezzi » (en français ragots, ou commérages) et qu’il condamne comme « lèpre » ou « cancer », a toujours été un thème de prédilection du pape, récurrent notamment dans les homélies à Sainte Marthe (autrefois..) et même dans des circonstances plus « officielles », comme les voeux à la Curie romaine. Sans doute pense-t-il -il n’a pas tort- en être l’objet, sinon la victime. Mais ses « chiachiericci » à lui, on ne les compte plus, ils franchissent toutes les limites de la vulgarité, tout en étant « sanctifiés » par son ministère suprême. C’est ce que souligne ce bref texte d’un lecteur du blog d’AM Valli.

Il y a commérages et commérages.

Et le pape ne met aucune limite aux siens

Les « bonnes pages »du livre El sucesor qui vient de sortir (pour l’instant seulement en version espagnole) méritent quelques considérations.

Tout d’abord, j’observe la singularité d’un pontife qui, d’un côté, critique sévèrement le « bavardage » et, de l’autre, continue à donner des interviews et à publier des livres dans lesquels le bavardage, l’indiscrétion et les ragots sont les protagonistes.

Manifestement, il y a le bon bavardage (s’il vient du pape ou de ses amis) et le mauvais bavardage (s’il vient de ceux qui osent critiquer les prouesses de l’église sortante). Le bon bavardage peut même permettre au pape, legibus solutus, de violer les règles imposées aux cardinaux sur le secret de ce qui se passe au conclave avec le double effet que le pape ne peut être contredit (puisque les cardinaux sont toujours tenus au secret) mais surtout que dans les futurs conclaves les électeurs ne seront plus libres d’exprimer leurs opinions qui pourront être portées dans la rue par le pape nouvellement élu (le prochain Sucesor).

Concernant les « bonnes feuilles », trois affirmations m’ont frappé.

En premier lieu : le cardinal Bergoglio aurait été l’un des grands électeurs de Ratzinger. Ce serait lui qui aurait évité une manœuvre de palais et favorisé son élection, convaincu de la nécessité « d’un pape qui maintienne un équilibre sain, un pape de transition ». En réalité, son propre récit semble dire autre chose. Voici le passage du livre en question:

‘La manœuvre consistait à mettre mon nom en avant, à bloquer l’élection de Ratzinger et à négocier ensuite un troisième candidat différent. Ils m’ont ensuite dit qu’ils ne voulaient pas d’un pape ‘étranger’… Il s’agissait d’une manœuvre en bonne et due forme. L’idée était de bloquer l’élection du cardinal Joseph Ratzinger. Ils m’utilisaient, mais derrière eux, ils pensaient déjà à proposer un autre cardinal. Ils n’arrivaient pas encore à se mettre d’accord sur qui, mais ils étaient déjà sur le point de prononcer un nom’.

En fait, selon Bergoglio, il semblerait que la décision de ne pas accepter sa candidature n’était pas liée à une préférence pour Ratzinger mais à la conscience qu’il n’aurait de toute façon pas été élu et que sa candidature ne dérangeait que parce que ses électeurs « pensaient déjà à proposer un autre cardinal ». Qui sait s’il aurait renoncé si sa candidature avait été effective (comme cela s’est produit lors du conclave suivant).

Deuxièmement, la tentative de narrer une proximité et une pleine communion avec Benoît XVI qui est en réalité démentie non seulement par les critiques prolixes du pontificat actuel, mais à plusieurs reprises par Benoît XVI lui-même ; il suffit de rappeler, pour ne donner que quelques exemples : le refus clair de revoir les ouvrages sur l’œuvre théologique du pape François ; la publication du livre Dal profondo del nostro cuore avec le cardinal Sarah ; les notes sur le scandale des abus sexuels préparées à l’occasion de la réunion des présidents des conférences épiscopales du monde pour réfléchir à la crise de la foi et de l’Église.

Sans oublier le refus de proclamer le deuil au Vatican le jour des funérailles de Benoît XVI et l’attitude glaciale (par euphémisme) du pape François dans les jours qui ont suivi sa mort et pendant les funérailles.

En troisième lieu: l’attaque directe contre Mgr Gänswein qui aurait utilisé le pape Benoît pour l’attaquer avec la publication du livre Nient’altro che la verità :

Mais ça m’a fait mal que Benoît ait été utilisé. Le livre a été publié le jour des funérailles, et je l’ai vécu comme un manque de noblesse et d’humanité.

Même en supposant que des « choses qui ne sont pas vraies » aient effectivement été racontées dans ce livre, il semble pour le moins inconvenant et inopportun que le pape s’abaisse au niveau de n’importe quel polémiste, de surcroît en accusant publiquement un évêque de manquer de noblesse et d’humanité.

Et tant pis pour les bavardages et les ragots.

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