Les Français quittent le Mali.
Tout ça pour ça pourrait-on dire, si l’on ne craignait pas d’offenser les 57 Français morts là-bas et la douleur de leurs familles.
Mais remontons le temps
L’opération Barkhane faisait suite en 2014 à l’opération Serval, lancée le 11 janvier 2013 à la surprise générale par un président Hollande affaibli, qui cherchait, selon les observateurs, à casser son image de mou et à se donner tant sur la scène internationale que dans notre petit théâtre national une image de chef de guerre. Vaste chantier , voire mission impossible.

Quoi qu’il en soit, le Vendredi 11 janvier marquait le début de l’intervention militaire française au Mali. Au même moment, toute la France catholique pro-vie se préparait à converger vers Paris pour participer à une grande manifestation prévue le dimanche 13 janvier pour protester contre le projet de « mariage pour tous ».

13janvier 2013 à Paris

La manifestation fut un immense succès populaire, malgré les comptages aberrants des médias elle avait rassemblé près de 1 million de personnes dans les rues de Paris, mais elle avait été complètement éclipsée par l’intervention au Sahel. Arthur Touchot, correspondant du NYT à Paris (un journal peu suspect de complaisance vis-à-vis des opposants au « mariage pour tous ») en convenait:

Il [Hollande] a fait baisser la pression intérieure sur lui pour faire reculer sa proposition visant à légaliser le mariage homosexuel, détournant la conversation nationale vers la politique étrangère. Une semaine plus tôt, toutes les conversations en France portaient sur la grande manifestation appelée pour dimanche contre le mariage homosexuel. La proposition de loi a créé une forte opposition car elle permettrait aux couples gay mariés d’adopter des enfants.

Selon la police, quelque 340.000 manifestants sont venus dimanche à Paris pour protester contre le projet de loi, alors que les organisateurs ont donné un nombre de participants de 800.000 personnes.

*

http://www.nytimes.com/2013/01/14/world/europe/francois-hollande-moves-away-from-his-image.html

Le témoignage amer d’une lectrice qui participait à la manifestation confirme cette impression:

Il paraît évident que le choix de la date du 13 janvier pour le déclenchement de la guerre au Mali n’est pas innocent.
En route pour la manif dimanche matin, je m’attarde sur les titres des journaux, aux arrêts de l’autoroute et je constate ce que j’avais prévu. Tous les journaux ‘de gauche’ titrent sur la guerre avec des photos et des lettres ÉNORMES. Sur certains un entrefilet minuscule sur la manif ou même aucune mention. Pareil aujourd’hui.

C’était l’effet recherché, et le minable petit calcul du président (ou l’incroyable coup de pouce de la Providence, sous forme de « hasard du calendrier », mais j’ai du mal à y croire) parvint à lui faire gagner quelques points dans les sondages. Très fugitivement, en réalité, quatre ans plus tard, il ne fut même pas autorisé à solliciter les suffrages des Français pour sa réélection… et nous eûmes Macron.
Quant à la grande manifestation, elle ne put malheureusement pas empêcher quelques mois plus tard le vote de la loi, assurée d’avance par une Assemblée aux ordres.

Voilà à quoi j’ai pensé ce matin en entendant les titres de la presse tous copiés de l’AFP: « Fin de Barkhane, la France tourne la page »

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