Ce qui suit est la préface d’Aldo Maria Valli à un ouvrage paru en Italie en septembre 2020 et récemment mis à jour, intitulé Libertà e coronavirus: Riflessioni a caldo su temi sociali, economici, politici, e teologici. L’auteur est un prêtre, don Beniamino Di Martino. Pour ne pas oublier…

Réflexion après le pandémonium pandémique

Résister, c’est possible

Les épidémies, ou pandémies, vont et viennent. Il y en a eu beaucoup dans l’histoire et celle du Covid disparaitra elle aussi. Mais nous, comment serons-nous après ?

Déjà maintenant, nous voyons que nous ne sommes plus les mêmes. « Tout se passera bien », lisait-on sur les panneaux au début. Cela ne s’est pas bien passé. Nous ne sommes pas devenus meilleurs. Au contraire.

Le virus va s’affaiblir et se lasser de nous poursuivre. Mais en nous, les scories resteront. Morales, politiques, culturelles, sociales.

A propos de scories, nous, Italiens, devrons en éliminer plus que d’autres, car ici la peur a davantage agi. Ici, la terreur a été répandue et utilisée à bon escient, sans limites, sans pudeur.

Nous devrons réfléchir à tout ce qui s’est passé, au comment, au quand et au pourquoi. La tâche en incombe aux hommes de bonne volonté. Qui seront dépeints, et le sont déjà, comme des fous complotistes. Mais peu importe. L’analyse devra être faite. Nous le devons d’abord à nous-mêmes, à notre dignité de personnes et de citoyens. Et ensuite à nos enfants et petits-enfants, dans l’espoir qu’ils auront encore la possibilité de se remettre en question.

Au cours de la prétendue pandémie, nous avons assisté à la liquidation des principaux droits de liberté, avec des systèmes politiques entiers virant au totalitarisme du jour au lendemain. La santé, transformée en absolu, est devenue le Moloch auquel tout peut être sacrifié. Et l’État a pris la forme d’un Léviathan qui contrôle et établit tout, éliminant tout espace de liberté responsable. Le citoyen est devenu un sujet. Un patient-sujet, qui a besoin des soins du médecin-état.

La société a été divisée entre bons et mauvais, entre vertueux et réprouvés. De nouvelles formes de racisme – il faut appeler les choses par leur nom – ont à nouveau fait rage. La haine sociale, savamment alimentée, a frappé sans pitié, sans retenue.

Le récit dominant a contribué à créer une chape de terreur, avec toutes ses conséquences. Face à un tel ensemble, ceux qui prétendaient continuer à faire usage de la raison, peut-être éclairée par la foi, étaient immédiatement catalogués comme des ennemis et marginalisés. La vaccination obligatoire était le dernier maillon de la chaîne de coercition.

La vraie maladie, celle de la peur, a pu se répandre parce que le terrain avait été correctement préparé. Très peu se ,sont interrogés sur les droits de liberté. La liberté n’était pas importante. « La santé d’abord », tel était le slogan. Le scientisme et le réductionnisme ont fait rage. Nous avons accepté d’être réduits à des organismes unidimensionnels, uniquement concernés par l’immunisation. Nous nous sommes suicidés par peur de mourir.

Des raisons d’espérer ? Ce n’est pas être visionnaire que mettre en évidence le réseau de relations et de résistance qui s’est spontanément constitué entre ceux qui, malgré tout, ont trouvé le moyen de ne pas se creuser la cervelle. Ceux que Giuseppe Prezzolini appelait les apoti, autrement dit ceux à qui on ne la fait pas, on ne la leur a pas fait cette fois non plus. La résistance est donc possible, même dans les conditions les plus difficiles. Même quand on vous retire votre travail, même quand on essaie de faire de vous un être détestable.

Le prix à payer, pour beaucoup, a été et reste élevé. Mais c’est souvent au moment de l’épreuve que les caractères et les sensibilités produisent le meilleur. Les puissances qui dirigent le nouvel ordre mondial illibéral et antidémocratique sont convaincues d’avoir marqué un point décisif : il a été prouvé que le tournant autoritaire, au nom de l’état d’exception, peut se produire rapidement et avec une ampleur sans précédent. Mais peut-être ne peuvent-ils pas chanter complètement la victoire. Les témoins de la vérité et de la liberté ne se sont pas laissés abattre complètement. Beaucoup, après être allés métaphoriquement dans le bois, se sont fait des amis, ont alimenté un récit alternatif, ont entretenu le feu des droits de la liberté.

Le pandémonium de la pandémie a profondément divisé la société, les groupes, les paroisses, les familles elles-mêmes. Les blessures ne vont pas guérir facilement. Peut-être ne guériront-elles jamais. Pour les croyants, la douleur a été rendue plus aiguë par l’attitude des hommes d’église qui ont honteusement bradé la libertas Ecclesiae pour se montrer plus royalistes que le roi. Dans l’œuvre de reconstruction, il faudra partir des fondamentaux : la personne qui vient avant l’État, l’équilibre des pouvoirs, l’exécutif qui doit être remis à sa place, le parlement qui doit retrouver sa dignité, la politique qui ne peut se laisser vider par une prétendue science qui est une superstition. Un travail immense, mais qui doit être fait. Alors la lecture de l’ouvrage de don Beniamino Di Martino sera nécessaire et utile. Elle nous rappellera que tout le monde n’accepte pas de se laisser réduire à des hommes unidimensionnels. Elle nous donnera consolation et courage. Le courage de la liberté.

Aldo Maria Valli

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